Les masses occidentales ne sont plus contre la guerre. Elles ne sont plus contre la guerre, car ce ne sont plus leurs enfants qui meurent.
Le coût humain de la guerre a été invisibilisé.
Ce sont d’autres qui paient, et c’est nous qui en profitons par le maintien de notre niveau de vie, lequel dépend de la pérennité du système dit libéral et/ou de son extension mondiale.
L’impérialisme qui sous-tend cette guerre – et la prochaine contre la Chine – n’est pas formulé, il est non-dit ; il se manifeste cependant par l’argument du maintien de l’hégémon du dollar, le maintien du système unipolaire occidentalo-centré dont tout le monde sent bien qu’il est la clef de notre niveau de vie élevé, supérieur à celui des autres populations de la planète.
Nos populations sont pour la guerre – tout comme ils sont pour le maintien du système de la dette et du crédit – parce qu’implicitement, on leur a fait comprendre que cette guerre vise à maintenir notre position privilégiée dans le monde et notre pouvoir de prélèvement sur ses richesses.
Nos valeurs sont un voile.
La défense de nos valeurs morales sociales, sociétales, woke et même LGBTQ est une construction parallèle. Ce que l’on défend, c’est notre niveau de vie, notre art de vivre, notre jouissance et nos licences de transgression, et la possibilité d’exploiter les matières premières, le travail et l’épargne des BRICS. On défend un ordre du monde qui nous permet de jouir au-delà de ce que nous nous produisons.
Délocalisations
Ce qui rend la guerre acceptable, c’est la délocalisation des victimes.
Comme en matière d’exploitation des salariés, où l’on délocalise les fabrications, ici on délocalise les combats. L’exploitation de leur vie n’est pas évidente, car elle se fait ailleurs. Hors de notre vue.
Les masses occidentales profitent du travail et de l’exploitation des salariés des pays producteurs à bas salaires. Ici, nous profitons du sacrifice de la vie des Ukrainiens et des Russes. C’est un système de division cynique du « travail » : nous jouissons, et eux produisent.
Les uns produisent des biens et services à bas coûts, et les autres produisent/reproduisent notre domination ; en mourant, ils reproduisent notre système. Leur vie est un investissement dans la reproduction de notre système, et un investissement dans le maintien de notre position centrale dominante. Les Ukrainiens se battent pour le maintien de l’unipolarité qui… nous profite ! Et plus exactement, qui profite aux Etats-Unis et aux couches sociales privilégiées des pays vassaux.
C’est un système de Tiers Payant, où on a dissocié le bénéfice pour nous des coûts… qui sont pour eux.
L’analogie tracée entre l’exploitation du travail des pays à bas salaires et l’exploitation de la vie des combattants avec la guerre en cours est évidente, mais elle n’est pas portée à la connaissance et à la conscience des masses. La propagande veille pour que cela ne se fasse pas.
Vous remarquerez que les pertes humaines sont le secret officiel le mieux gardé, et pour cause ! Si elles étaient révélées, et surtout montrées, alors le pacifisme pourrait bien se développer à nouveau.
Lors de la promotion de son film Platoon en 1987, le vétéran Oliver Stone avait déclaré lors d’une interview : « Si les fils de bourgeois avaient été envoyés au Vietnam au lieu de rester dans leurs universités, leurs parents auraient arrêté la guerre au bout de 6 mois ! »
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]
2 commentaires
Un décodage tout simplement superbe !
Voilà une analyse qui pointe le caractère surréaliste de la situation présente ! Une guerre évacuée du quotidien des Européens pour se conforter, jusqu’à plus soif, dans les standards d’une économie qui nous échappe par l’accélération des délocalisations. Maintenir la fiction par les aides et en faisant rouler la dette… Terrible sera l’atterrissage !