▪ Nous sommes à l’aéroport de Washington, en route pour l’Inde. A l’heure où nous écrivons ces lignes, le Dow chute.
Il est encore bien trop tôt pour savoir si la tendance haussière de ces cinq dernières années touche à son terme. M. le Marché est peut-être épuisé après une telle montée au pas de course. Ou peut-être qu’il joue simplement avec nous. Nous verrons bien.
La roue tourne. Ces derniers temps, les marchés émergents et l’or sont en butte à toutes les disgrâces. Dans la mesure où ce sont deux de nos investissements préférés, nous sommes contraint de réfléchir à ce qui se passe.
Lorsque les prix vont dans le sens que l’on veut, ça revient à tendre le bâton pour se faire battre. Inutile de réfléchir ; on a l’impression de déjà tout savoir. Inutile aussi de s’inquiéter ; il suffit de rester assis en attendant que l’argent vienne à vous… Jusqu’à ce que ce ne soit plus le cas. Mieux vaut que les nouvelles financières aillent contre vous — parce qu’il faut alors se poser des questions sur ses principes, ses émotions et sa santé mentale.
Il ne se passe pas une journée sans que nous remercions notre bonne étoile. Nous avons été béni, voyez-vous, par la malchance. Quand nous étions enfant, nous n’avions pas d’argent. Nous ne pouvions pas perdre la fortune familiale : elle n’existait pas. Ce qui s’est avéré être une bonne chose… parce que si nous avions eu de l’argent, nous l’aurions perdu lors du grand marché baissier de l’or de 1980-1998.
Richard Nixon a mis fin au lien du dollar avec l’or le 15 août 1971. Nous connaissions assez bien l’Histoire pour savoir ce que ça signifiait. Nous ne tarderions pas à pousser des brouettes pleines de billets de 100 $ pour acheter un pack de bière. Comment se protéger de l’inévitable hyperinflation ? Simple : en achetant de l’or. C’est ainsi que nous sommes devenu fanatique du métal jaune.
▪ Horreur, une hausse !
Puis le pire est arrivé : l’or a grimpé. De 41 $ en 1971, le métal jaune a grimpé à plus de 800 $ en 1980. Nous avions raison ! Nous étions intelligent ! Nous avons tout misé sur l’or… et nous avons attendu la fortune.
Heureusement, notre chance a tourné avant que nous allions bien loin. La déveine nous a souri… nous mettant en porte-à-faux, avec un marché baissier de 18 ans sur l’or.
Savez-vous ce que c’est, cher lecteur ? Tous les jours… tous les mois… tous les ans… on perd de l’argent… on est moqué par les dieux des marchés… on est calomnié par la famille et les voisins. Chaque jour prouvait avec plus d’emphase que le précédent que nous ne savions pas ce que diable nous faisions. Chaque jour, à la clôture, M. le Marché prononçait son jugement solennel : nous étions un idiot.
Pendant 18 ans, nous avons enduré cette punition. Dieu merci, d’ailleurs. Parce que nous savons à présent combien il est facile de se tromper. On essaie de comprendre ce qui se passe : on ne voit que des ombres, on n’entend que des échos. Comme un fantôme hantant une vieille maison, on sent une brise glacée effleurer notre visage… On voit des choses apparaître dans des endroits étranges et l’on se demande comment elles sont arrivées là. Mais on ne saura jamais comment ce monde spectral fonctionne en réalité, pas tant qu’on n’est pas en train de fumer les mauves par la racine…
Tandis que nous nous cramponnions à nos positions perdantes sur l’or, l’argent intelligent a investi dans les actions. Peut-être avait-il compris que nous vivions une gigantesque expansion du crédit qui mènerait les actions jusqu’à 20 fois leur valeur de 1971 — de 874 points en 1971 à 15 400 cette semaine. Pas mal !
Mais attendez. Et si vous vous en étiez tenu à l’or ?
Voyons voir… De 41 $ à 1 250 $. Eh bien. C’est 30 fois votre mise !
Peut-être que notre idée "fêlée" était la bonne dès le départ. Et peut-être que l’or et les marchés émergents finiront par se révéler être des investissements raisonnables, en fin de compte.