Bercy a découvert un nouveau trou de 10 milliards d’euros dans les encaissements de 2025. Fraudes, consommation en berne, cadeaux fiscaux discrets ou manipulations comptables à visée politique : personne ne semble en mesure d’expliquer cette disparition.
Cela fait des semaines que je le répète régulièrement : les hypothèses de recettes de TVA en 2023 étaient fausses, celles de 2024 encore plus fausses, celles de 2025 le sont également (c’est très fâcheux puisque la TVA représente plus de 38 % de la totalité des recettes fiscales en France).
Bon, l’écart par rapport aux prévisions n’atteint pas les proportions des deux années précédentes, mais s’élève tout de même à 10 Mds€, et Bercy ne « comprend pas » d’où provient la différence (tout comme en 2023 et 2024, d’ailleurs).
Comment 10 Mds€ de recettes de TVA attendues ont-elles bien pu s’évaporer ? Pour que l’on saisisse bien de quoi il est question, c’est une somme supérieure au budget annuel de plusieurs ministères. Personne ne sait où est passé l’argent et Amélie de Montchalin a dû lancer une « mission d’urgence » pour comprendre ce qui s’est passé.
S’agit-il d’une « erreur comptable » volontaire comme en 2023 – quand il s’agissait de masquer l’état calamiteux de nos finances pour rassurer les créanciers de la France et les agences de notation – puis en 2024, cette fois pour tromper les Français et ne pas se faire laminer aux élections européennes pour cause de sabotage de notre économie ?
Car il faut bien garder à l’esprit que les déficits de 2021 puis 2022 (« boucliers » en tous genres, soutien aux entreprises en mode « quoi qu’il en coûte », chèques énergie, etc.) avaient pour but d’acheter la paix sociale en vue des présidentielles puis des législatives du printemps 2022.
S’agit-il d’une nouvelle tromperie, liée à un agenda politique, qui devrait prendre cette fois la tournure d’un scandale d’État ?
Il n’y avait pas d’élections en vue en 2025, sauf censure et dissolution… mais tous les sondages réalisés en 2025 démontrent que l’Élysée n’a plus rien à sauver. Si ce n’est le fauteuil des élus du « bloc central » (du PS à ceux des LR ayant renoncé à leurs racines gaulliennes) qui se maintiennent au pouvoir en trahissant leurs électeurs, grâce à des compromis dignes des pires tambouilles politiques de la IVᵉ République, avec pour enjeu quelques postes ministériels éphémères et sans réel pouvoir… mais qui rapporteront quelques avantages en termes de retraite à leurs bénéficiaires.
Les 10 milliards manquants ? Certains membres du gouvernement – comme Amélie de Montchalin – doivent avoir quelques idées à ce sujet, mais tous feignent d’être complètement pris au dépourvu.
Mais comment est-ce possible avec une croissance de 0,5 % qui – divine surprise – surpasse celle de l’Allemagne ?
Notons au passage que nos ministres et l’Élysée, qui ont le triomphe facile, ne comparent la France qu’aux pires performers d’Europe et se gardent bien d’évoquer les +1,2 % de la Belgique, les +2,6 % de l’Espagne, les +3,7 % de la Pologne (en glissement annuel)… et ne parlons pas des États-Unis.
En réalité, notre croissance du 3ᵉ trimestre repose sur un rebond des investissements et un calendrier favorable de livraisons d’Airbus aux compagnies internationales depuis Toulouse. Elle ne repose certainement pas sur la TVA assise sur la consommation, vu le coup de frein sur les dépenses lors de la saison estivale et le faible nombre de véhicules particuliers vendus. Les surtaxes écologiques à la revente (programmées), les contrôles techniques plus coûteux, la cherté des véhicules électriques (avalanche de normes) continuent de plomber le secteur automobile.
Voilà ce qui peut expliquer une chute des recettes mesurable. Mais il y a aussi le volet fraudes massives à la TVA, qui coûtent 20 à 25 Mds€ par an selon l’INSEE.
Mais ces chiffres, justement, sont connus depuis longtemps et sont devenus un marronnier : Bercy ne peut les ignorer.
En revanche, il y a quelque chose que Bercy ne saurait ignorer mais dont les données ont apparemment du mal à remonter jusqu’au bureau du ministre du Budget – ou celui de Bruno Le Maire en 2023 et 2024 : les ristournes, dégrèvements, reports de cotisations accordées aux entreprises. Et certaines mauvaises langues évoquent des arrangements entre camarades de promo à l’ENA. Des arrangements fiscaux très stratégiques (qui « sauvent des emplois », bien sûr) dans le cadre du jeu des revolving doors : à quelques mois de quitter Bercy, ce n’est pas un mauvais calcul pour un inspecteur des finances ou un directeur de cabinet que de songer à sa reconversion dans le privé… et de préférence dans une entreprise dont ils ont contribué à optimiser la fiscalité.
