Le « rendement » des fonds d’Etat n’en est pas un – c’est en réalité le coût de la dette des gouvernements : un principe fondamental pour comprendre la situation actuelle.
Regardez le graphique ci-dessous.
Vous constatez la baisse continue de ce que l’on appelle – à mon sens improprement – le rendement des fonds d’Etat.
Je vous propose de les désigner autrement et, au lieu de prendre la désignation mystifiante, de prendre la désignation logique : c’est le graphique du coût, pour les gouvernements, de leurs dettes.
Pourquoi prendre ce terme ? Parce que c’est celui qui respecte l’origine des phénomènes, leur genèse.
Le besoin de s’endetter
La genèse, c’est le besoin qu’ont les Etats, depuis qu’ils existent, de s’endetter – non pas le besoin des épargnants de trouver des emplois à leur argent. En choisissant cette appellation, je remets les phénomènes dans le bon ordre, celui qui permet de les comprendre. Je remets l’église au milieu du village.
Ne passez pas vite sur ce paragraphe, il est essentiel. Ce paragraphe vous fait marcher sur les pieds alors que les pouvoirs vous font marcher sur la tête.
Le phénomène historique, ce n’est pas la baisse des rendements ; non, le phénomène historique, c’est la chute continue du coût des dettes pour les gouvernements.
Comment est-elle obtenue ? Elle est obtenue par la politique monétaire volontariste de la banque centrale, laquelle est ontologiquement complice des gouvernements. C’est un couple, un couple que je qualifie souvent de maudit.
Les banques centrales administrent les taux et ont trouvé le moyen – alors qu’elles ne maîtrisent que les taux courts – de prendre le contrôle des taux longs par la création monétaire, les rachats de titres à long terme, les guidances, les promesses, etc.
La règlementation aussi joue un rôle.
On repousse les limites de la solvabilité
Grâce à la baisse des taux, le fardeau des dettes ne s’alourdit pas. On a trouvé le moyen de ralentir la progression du coût des dettes, de repousser les limites de la solvabilité.
En bonne logique, plus un gouvernement s’endette et plus sa solvabilité se réduit ; il a de moins en moins de facilités et donc de chances de pouvoir honorer ses dettes.
En clair, ses dettes doivent se déprécier. En clair, elles doivent valoir de moins en moins cher. En clair, les prêteurs doivent être de plus en plus réticents et, à la fin, refuser de prêter aux gouvernements.
Mais les universitaires ont trouvé une astuce ; elle est purement mathématique. Pour éviter que la valeur des dettes des gouvernements ne baisse sans arrêt et qu’à la fin plus personne n’en veuille, nos illusionnistes ont trouvé l’astuce qui consiste à chaque fois à baisser les taux d’intérêt.
Quand on baisse les taux d’intérêts, les actifs financiers qui rapportent à l’ancien taux, plus élevé, sont recherchés, donc ils se revalorisent !
Au lieu de valoir moins, ils valent plus. Les clients des marchés financiers viennent les acheter sur le marché secondaire, sur le marché d’occasion, parce qu’ils rapportent plus que les nouveaux.
Et le tour est joué, un tour purement mathématique qui réside dans le fait que si vous baissez les taux, eh bien, les actifs anciens se revalorisent automatiquement… même si, en réalité, du point de vue fondamental, ils perdent de leur valeur. Leur prix ne reflète pas leur valeur, il s’en écarte de plus en plus.
C’est ce que je désigne sous le nom de bulle des fonds d’Etat.
La suite dès demain…
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]