Derrière l’optimisme boursier, les contradictions de la politique européenne apparaissent au grand jour : sanctions maintenues, absence de retour des énergies russes à bas coût et une facture colossale pour la reconstruction. Qui en paiera le prix ?
Les places européennes ont aligné une 6e semaine de hausse consécutive pour un cumul de gain moyen de 12% (donc +6% par semaine depuis le 6 janvier), et une avalanche de records absolus (et y compris sur le CAC 40… si, si, vous pouvez vérifier, mais bien sûr, nous l’avons fait pour vous !).
Après le processus de « rattrapage » sur Wall Street enclenché dès le 20 décembre (8 semaines), les investisseurs ont salué ces derniers jours la perspective d’un arrêt des combats et la signature d’un plan de paix « durable » entre l’Ukraine et la Russie. L’espoir que les armes se taisent avant le 3e anniversaire de l’invasion russe (le 24 février 2022, du début des hostilités remontant au printemps 2014) semble quelque peu prématuré (il reste une semaine).
Si les deux présidents ont convenu d’engager « immédiatement » des négociations pour mettre fin à la guerre en Ukraine (qui pourraient se tenir à Ryad), le porte-parole du Kremlin a confirmé que l’Arabie Saoudite était l’un des lieux envisagés pour la rencontre, mais qu’aucune date pour un sommet n’était arrêtée.
Ni les représentants européens siégeant à Bruxelles (ils ne sont pas élus et ne peuvent donc « signer » quoi que ce soit au nom des pays européens), ni Zelensky ne seront conviés aux négociations. Ce dernier n’est d’ailleurs plus président « élu » de l’Ukraine (mais « par intérim », du fait de la loi martiale qu’il a lui-même instaurée) et il avait signé le 5 octobre 2022 un décret – jamais invalidé depuis – interdisant toute négociation de paix avec Poutine.
Ses propres « lignes rouges » (en revanche, celles de ses adversaires ne comptent pas) sont donc respectées à la lettre par Trump et Poutine.
Et plus la guerre dure, plus l’Ukraine enchaîne les revers sur le front militaire (Kiev aurait déjà enregistré 100 000 désertions ou exemptions de complaisance délivrés par des ministres corrompus), d’où ses appels un peu désespérés à la fourniture de missiles permettant d’aller frapper la Russie « en profondeur » avant d’entamer des négociations… à supposer que Zelensky y soit convié, ce qui paraît plus qu’incertain.
Incapable d’endiguer l’avancée des troupes russes, l’Ukraine a perdu entre 4 000 et 4 500 km² de territoire en 2024. Mais Kiev a tout de même réussi un gros coup le 6 août 2024, parvenant à envahir à son tour une petite partie du territoire russe (ses troupes occupent quelques 450 km² dans l’oblast de Koursk, ce qui n’était pas arrivé depuis la seconde guerre mondiale).
Mais le ratio de 1/10 reste impitoyable : 450 km² conquis en 2024 – et très difficiles à tenir – contre 4 500 km² perdus et impossibles à reconquérir face à un rouleau compresseur inarrêtable. La Russie se retrouve en position de force.
Elle contrôle désormais 18% du territoire ukrainien (et 20% au rythme actuel d’ici un mois), dont 300 km de la rive est du Donetsk, depuis la Mer Noire jusqu’à Zaporijia (ce qui sécurise à 100% l’accès continental à la Crimée), la totalité des rivages de la Mer d’Azov (devenue 100% russe) et tous oblasts de l’est, du nord au sud avec la prise de contrôle dès 2022 du port industriel et céréalier de Marioupol.
Mais toutes ces « conquêtes » se payent de 16 trains de sanctions occidentales successives contre la Russie, qui devient le pays le plus sanctionné de l’Histoire, tandis que d’autres guerres et invasions prospèrent au Proche-Orient, dans le Caucase, ou en République Démocratique du Congo, sans qu’aucune résolution de l’ONU ne les condamne, ni que l’Europe ou les Etats-Unis n’appliquent le moindre embargo.
Ce « deux poids deux mesures » n’est, semble-t-il, « normal » qu’aux yeux occidentaux ; le reste de la planète ne parvient pas à comprendre comment peut se perpétuer une telle duplicité.
Mais les marchés n’entrent pas dans ce genre de débat : ils se fichent que la paix soit juste ou injuste, pourvu que le risque géopolitique s’estompe.
Et cette perspective a été saluée par les records absolus de 80% des places européennes cette semaine, et même du CAC 40 « Global Return » (le jumeau du DAX40) qui a battu de près de +300 points son précédent record de la mi-mai 2024 à 25 380 points, avec un nouveau zénith de 25 660 points (et 25 553 points en clôture contre 25 250 points, neuf mois plus tôt).
A Wall Street, on assiste à une alternance de semaines de hausse et de baisse, mais les indices US avancent globalement depuis début février, même si c’est au ralenti. Le S&P 500 (+1,5% en hebdo) a de nouveau testé au point près son record des 6 128 points (record absolu du 24 janvier dernier).
Le Nasdaq a inscrit 20 045 points, sa seconde meilleure clôture annuelle (le première remontant au 23 janvier, à 20 053 points), et le score hebdo est ressorti positif de +2,6%, c’est la meilleure performance depuis début décembre.
Mais si tous ces records battus ou égalés ont pour motif l’extinction du conflit sur le sol européen, quels seront les dividendes de la paix pour l’Europe ? Bruxelles lèvera-t-il ses sanctions économiques contre Moscou ? Le gaz et le pétrole russe « pas chers » feront-ils leur grand retour dans nos gazoducs et oléoducs ? Zelensky va t-il rouvrir le robinet du gaz russe qu’il a fermé le 31 décembre dernier, plongeant son pays dans le froid et le noir ?
La réponse est, à l’heure actuelle, clairement négative.
Sans énergie bon marché, le marasme de l’Europe va continuer.
Symétriquement, les exportations européennes vers la Russie vont demeurer gelées.
En revanche, la facture d’un renforcement de nos capacités de défense pourrait nous coûter 500 Mds€ d’ici 2030, et la reconstruction de l’Ukraine à peu près autant, ce qui porterait la facture totale à 700 Mds€ d’aide, pour zéro retour sur investissement.
En revanche, les Etats-Unis qui ont accordé 120 Mds$ à Kiev auraient déjà négocié 500 Mds$ de fourniture de minerais stratégiques et de terres rares, afin de rembourser le contribuable américain. Le contribuable européen sait-il ce que sont devenus les 100 Mds€ sur 200 Mds€ de ses impôts dont Zelensky prétend qu’il ne retrouve pas la trace ?
Et d’ailleurs, qui avait la mission de tracer et de contrôler l’usage de notre argent allègrement distribué par Bruxelles (sans que nos parlements respectifs aient jamais leur mot à dire) ? Quand les Européens reprendront-ils le contrôle démocratique de leurs finances ?
Quand se remobiliseront-ils pour demander des comptes à ceux qui veulent prolonger les sanctions, poursuivre la guerre en Ukraine à tout prix, comme le réclament Kaja Kallas (chef de la diplomatie européenne à la sauce Von der Leyen) et Mette Frederiksen (Première ministre du Danemark et tout aussi va-t-en guerre que les deux précitées) ?
Et, comble de l’audace, les citoyens européens useront-ils de leur liberté d’expression pour leur demander les raisons qui ont motivé tous ces choix ?
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TRUMP : UN AJUSTEMENT NÉCESSAIRE DE PUISSANCE
Le projet de Trump est apparemment, sans aucunement perdre en puissance et en influence indirecte, de replier les USA, préférentiellement, sur les Amériques. C’est du bon sens.
Politiquement et économiquement face à un monde qui n’est plus celui des années 1850 ou 1950 les USA doivent changer de stratégie : La domination scientifique, technique, économique des Occidentaux sur le monde, n’est plus une réalité incontestable. La domination idéologique et politique suit nécessairement. Les Nations du monde sont revenues à une situation de puissance à peu prés équilibrée, même si c’est dans un monde beaucoup plus relié et plus concurrent.
Fin du Mondialisme, idéologie occidentale. Début de la Mondialisation, réalité internationale.
Faire la guerre à la Russie au nom d’une prétendue démocratie « libérale » en Ukraine en 2024 est aussi mensonger et présomptueux que pour l’URSS faire à la guerre à Cuba en 1962 au nom de la démocratie « socialiste ». Pour l’Europe c’est en outre un suicide stupide : Elle se divise au lieu de s’unir.
La politique de Trump n’est pas une démission mais un ajustement de puissance en fonction des réalités. Les dirigeants de la CEE, idéologues et politiques, héritiers de déterminismes culturels colonialistes des siècles précédents, sont très loin d’avoir compris les évolutions nécessaires : la CEE, surtout contre la Russie, n’est plus qu’un petit territoire parmi d’autres dans le monde.
Le comble de l’irrationalité est d’avoir fait la guerre à la Russie sur ordre des USA, contre tout intérêt européen, et maintenant de s’obstiner à faire la guerre à la Russie contre les USA de Trump.
Quelles Intelligences ! Outre les désastres économiques d’une guerre contre la Russie, déjà actuels, nos « éclairés » européens vont ajouter celui d’une guerre commerciale contre les USA.