Les baby-boomers ont la part du lion sur tout – pouvoir, statut, richesse, confort… mais sont-ils vraiment aussi bien installés qu’ils le pensent ?
Dans les années 1950, Tommy d’Alesandro a mis sur pied la machine démocrate à Baltimore.
Sa fille Nancy (nom d’épouse, Pelosi) était jolie – mais aussi intelligente et coriace. Elle est allée à Washington en 1963 pour travailler comme stagiaire dans l’équipe du sénateur Daniel Brewster. Elle connaît bien l’endroit.
Pendant ce temps, Fred Trump construisait un petit empire immobilier. Il a mis en place pour son fils Donald un deal au début des années 1970, sur des appartements – donnant au gamin un million de dollars de revenus par an.
Mitch McConnell est allé à Washington il y a plus d’un demi-siècle, afin de travailler pour le sénateur Marlow Cook. A part un bref séjour dans un cabinet d’avocats du Kentucky, il n’est plus jamais reparti.
Idem pour Joe Biden… Grâce à un coup de chance électoral en 1972, il est devenu sénateur de l’Etat du Delaware, quelques semaines seulement avant son 30ème anniversaire.
Il s’agit là des chanceux… de l’élite. Ils ont obtenu la gloire, la fortune, le pouvoir et le statut assez tôt… et ne les ont jamais lâchés.
A présent, plus âgés… les Grateful Dead sur leur platine… entretenus à coups de Botox, de colorations capillaires et de Viagra – selon les cas… ils cherchent désespérément à retenir le monde qui les a si bien servis.
Malheureusement, le monde qu’ils ont construit est factice… et il est de plus en plus difficile de le faire tenir debout.
Vendus !
Nous explorons la façon dont l’élite gériatrique a vendu les Etats-Unis. Ils ont lancé des guerres contre la drogue, la pauvreté, le terrorisme, le coronavirus… et surtout contre une monnaie honnête.
Les guerres ont profité aux guerriers, transférant le pouvoir, le statut… et quelque 30 000 Mds$… vers les élites ces 30 dernières années.
Mais plus ils escroquent, plus ils doivent escroquer pour que toute l’affaire continue à tenir debout…
… Et plus ils mettent de gens en colère.
Après que le président de la Réserve fédérale Paul Volcker eut « secouru » le système en 1980, le faux dollar et les taux d’intérêts factices qui en ont résulté ont produit de la fausse richesse à une échelle jamais vue encore aux Etats-Unis. Le Dow Jones a été multiplié par 29.
La richesse, cependant, était lourdement concentrée dans les zones les plus riches. Le reste du pays, en termes relatifs, s’est appauvri.
Les emplois industriels ont décampé en Chine et au Mexique. Les anciens machinistes, soudeurs et lamineurs de Gary, Detroit, Mansfield et St Louis sont restés en arrière. Ils vivent désormais dans des quartiers mal famés… grâce aux allocations handicap, s’ils réussissent à en toucher… en se rappelant le bon vieux temps.
La richesse est passée de villes où les gens fabriquaient des choses aux villes où les gens gagnaient simplement de l’argent. Comme Manhattan, où les prix des appartements ont quadruplé depuis le début de ce siècle. Là, les gens gagnaient vraiment beaucoup d’argent, grâce à la guerre de la Fed contre une monnaie honnête.
Cinq assauts
La Réserve fédérale a lancé cinq gros assauts. Il y a eu les trois vagues de baisses de taux – 1989-1992, 2000-2003 et 2007-2008 – ainsi qu’un lourd barrage d’artillerie, de 3 600 Mds$, après la crise de 2008-2009… à quoi sont venus se rajouter 3 000 Mds$ supplémentaires pour lutter contre le confinement suite au Covid-19.
Cette somme est allée, quasiment jusqu’au dernier centime, aux 10% les plus vieux et les plus riches du pays… laissant 90% de la population sur le bas-côté.
Le confinement – une autre tentative de protéger les vieux aux dépens des jeunes – a forcé une bonne partie de l’économie à passer sur internet, laissant des millions de travailleurs « en face à face » sur le flanc, parvenant difficilement à joindre les deux bouts.
Serveurs, voituriers, propriétaires immobiliers dans certaines zones, clowns à Disneyland, strip-teaseuses à Las Vegas… des secteurs entiers ont été décimés.
Nombre de gens ne retrouveront jamais leur emploi. Ils ont été laissés en arrière, peut-être pour toujours.
Pas de quoi se plaindre
Pendant ce temps, l’élite boomers (dont fait d’ailleurs partie votre correspondant et bon nombre de ses lecteurs)… bénie soit-elle… a la belle vie. Nous n’avons peut-être pas eu autant de chance que Donald ou Nancy, mais nous n’avons pas de quoi nous plaindre.
Nous avons fréquenté l’université. Nous avons évité le travail à la chaîne et l’atelier. Nous avons utilisé un clavier plutôt qu’une pointeuse… et à l’arrivée du coronavirus, nous avons pu travailler à domicile.
Nous avons aussi fait des investissements… profitant de la grande promesse du capitalisme américain dégénéré, selon laquelle le gouvernement s’assurerait que nous ne perdions pas d’argent.
Comme souvent expliqué dans ces colonnes, à trois reprises, depuis le début du siècle, les marchés ont tenté de corriger… et à trois reprises, la Réserve fédérale a riposté, s’assurant que les riches élites conservent leurs biens mal acquis.
Suite à quoi, pour améliorer encore les choses… nous pouvons déménager dans une « ville Zoom ».
Absolument : nous pouvons laisser dernière nous tout cet assortiment de criminalité, pauvreté, chômage, politique et troubles sociaux… et vivre suffisamment loin des grandes villes, là où tout est plus sûr, plus joli et plus agréable… avec, malgré tout, assez de bande passante pour que nos enfants et petits-enfants puissent nous « rendre visite »… tout en gérant agréablement notre fin de carrière.
Abandonnés…
Le tour est joué… Nous épargnons plus que jamais (où dépenser notre argent, de toute façon ?) Nous profitons de plus de temps chez nous. Personne ne nous demande de monter dans l’avion… de venir au bureau… ni même de venir dîner.
Nous les boomers, nous avons laissé les ouvriers sur le bas-côté. Nous avons laissé l’Ancienne économie et ses salariés à l’heure. Nous avons abandonné les villes où nous sommes nés.
Nous avons abandonné les personnes âgées lorsque nous nous sommes lancés dans nos carrières… et à présent, nous abandonnons nos propres enfants alors que nous nous préparons à une retraite confortable à la campagne (financée par la génération suivante !)…
Attendez… vous dites que le plus grand « Abandon » reste à venir ?
Vous dites qu’on nous a promis 210 000 Mds$ (selon le professeur Laurence Kotlikoff) d’allocations retraite et santé qu’il sera impossible de verser ?
Vous dites que les autorités dépensent déjà deux dollars pour chaque dollar qu’elles collectent en impôts ?
Vous dites que les millions de personnes laissées sur le bas-côté perdent la foi dans le « contrat social » ?
Vous dites que nos élites grisonnantes ne vont pas réussir à faire tenir tout ça encore longtemps… et que nous pourrions nous aussi terminer sur le bas-côté ?