Après une année 2021 marquée par les problèmes d’approvisionnements, des infrastructures à l’arrêt pour diverses raisons et les premières secousses dans son secteur immobilier, la Chine fait face à… une liste de problème très similaire en 2022.
La Chine va connaître une année 2022 extrêmement difficile.
Les développements immobiliers et fonciers pointent vers une aggravation de la crise, qui pourrait s’étendre davantage jusqu’à l’effondrement d’une bulle de logements, d’appartements, de produits connexes et finalement arrivée à l’orée d’une crise systémique.
Le 3 janvier, Bloomberg détaillait l’ampleur du problème :
« Un mur de dettes qui arrivent à échéance et une augmentation de la demande saisonnière de liquidités mettront à l’épreuve les marchés financiers chinois ce mois-ci, faisant pression sur la banque centrale pour assurer une liquidité suffisante.
La demande de liquidités pourrait totaliser environ 4 500 milliards de yuans (708 milliards de dollars) en janvier, soit 18% de plus que l’année dernière, selon les calculs de Bloomberg basés sur des données officielles et des estimations d’analystes.
‘Il faut s’attendre à une augmentation du montant des prêts arrivant à échéance et une demande de liquidités pour les dépenses pendant le Nouvel An lunaire…’ [NDLR : le 1er février], a déclaré Yishuang Li, analyste chez Cinda Securities Ltd., citant les paiements d’impôts et l’échéance des prêts sur police. »
L’enjeu clé pour 2022, c’est la crise de confiance. La perception que Pékin maîtrise la crise de l’immobilier et des développeurs s’estompe. La foi dans la puissante « méritocratie » de Pékin est menacée.
La « tolérance zéro » de Pékin contre le Covid exige des sacrifices personnels considérables, avec des dizaines de millions de confinés pour quelques dizaines de « cas » détectés, et des infrastructures essentielles parfois à l’arrêt, comme le port de Ningbo l’été dernier.
Désormais, Omicron risque d’exposer une population très vulnérable (vaccins moins efficaces et immunité naturelle limitée). Les épidémies d’Omicron, les blocages généralisés, les infections massives et la crise économique ne sont pas un scénario improbable.
La compétence du leadership sera-t-elle remise en question ?
Pékin risque l’apparition d’un problème politique. Le leadership a été vénéré au niveau national pour une gestion économique habile. Il existe aujourd’hui un gouffre immense entre la perception d’une compétence inattaquable et la réalité d’un échec catastrophique à maîtriser au niveau du crédit et des bulles immobilières.
Le Financial Times nous renseignait le 4 janvier sur ce point :
« Les banques chinoises se sont précipitées pour respecter leurs quotas de prêts annuels imposés par l’État le mois dernier en achetant des instruments financiers à faible risque plutôt qu’en émettant des prêts, une attitude qui, selon les banquiers et les analystes, reflète la méfiance des institutions financières sur le ralentissement de l’économie du pays.
La hausse de la demande pour les acceptations bancaires, garanties par leurs émetteurs et classées techniquement comme des prêts, a réduit le rendement des instruments à près de 0% dans la seconde quinzaine de décembre, atteignant un plancher record de 0,007% le 23 décembre.
C’était bien inférieur au coût moyen du capital de 2,5% des banques chinoises sur la même période, ce qui implique qu’ils préféraient perdre de l’argent sur des acceptations bancaires à faible rendement plutôt que de risquer des pertes plus importantes en émettant leurs propres prêts… »
« Les autorités veulent que nous soutenions l’économie réelle tout en maîtrisant les créances douteuses », disent en somme les banquiers. Appuyer sur le frein et sur l’accélérateur : pas de meilleure recette pour un blocage.
La banque centrale à la rescousse
En cas de blocage généralisé, Pékin n’aura guère d’autre alternative que d’injecter de grandes quantités de liquidités dans le système.
Cela signifie que comme les autres banques centrales, la Banque populaire de Chine risque d’alimenter l’inflation. La confluence d’une baisse des prix des actifs (appartements et valeurs mobilières) et d’une hausse des prix à la consommation et d’une baisse du pouvoir d’achat des travailleurs va constituer un véritable défi pour les décideurs politiques et le système bancaire.
Une hausse des rendements et une instabilité monétaire affaiblirait davantage le système bancaire chinois.
La bulle chancelante de la Chine et ses ramifications augmentent les risques géopolitiques. Une crise intérieure peut être un facteur de développements plus belliqueux avec Taïwan.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]