▪ Les indices boursiers se sont envolés de 5% à 6% en ligne droite entre mercredi 16h30 et vendredi. Aucun lien possible entre ce rally et l’actualité économique, géopolitique ou même pétrolière, la remontée du baril de 31 $ à 34 $ n’ayant été justifiée que par l’appel à une nième réunion OPEP/Russie début mars par l’inévitable et omniprésent ministre vénézuélien de l’énergie.
Les marchés ont donné pendant 48 heures le sentiment d’avoir été dopé au nitro-méthane, le CAC 40 enchainant deux énormes gaps haussiers de 65 points et 50 points successivement.
Faites le compte : cela représente +115 points, soit +2,75% sans aucun échange auquel puisse participer un gérant de SICAV ou de fond de retraite… tandis que le score hebdomadaire s’établissait à +2,25%.
Notez comment il devient facile, dans des marchés complètement versatiles, de faire grimper les indices sans mettre d’argent dedans, en lâchant une ou deux rumeurs influençant les cours du brut au bon moment…
… Notamment quand les places européennes et asiatiques sont closes et qu’il n’est plus possible d’arbitrer/couvrir les positions.
Le pétrole n’est pas le seul levier haussier utilisé vendredi (le WTI rechutant de 1,5% sur le NYMEX) |
Pour être parfaitement objectif, le pétrole n’est pas le seul levier haussier utilisé vendredi (le WTI rechutant de 1,5% sur le NYMEX). En effet, des rumeurs d’un accord historique à l’issue du G20 ont commencé à circuler.
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Les enjeux sont devenus tellement cruciaux — la nervosité des marchés en apporte la preuve — que les grands argentiers allaient nous sortir un lapin du chapeau. Pourquoi pas un « accord de Shanghai » qui mettrait opportunément fin à une guerre des devises stérile ?
Divergences de vue
En réalité, les participants du G20 sont effectivement unanimes… pour reconnaitre que la situation est grave et qu’ils ne sont d’accord sur rien.
Ils ont fait étalage de leurs divergences de vue et plus encore de stratégie. L’Allemagne, notamment, s’oppose haut et fort à une fuite en avant dans la création monétaire, aux taux négatifs et aux relances keynésiennes par la dette comme le préconise l’OCDE — et de façon à peine dissimulée, le FMI (une option qui resterait naturellement interdite à la Grèce).
L’unanimité du G20 de Shanghai porte donc sur le constat que :
– L’activité mondiale se dégrade (les échanges marchands sont au plus bas depuis le printemps 2009) et les perspectives sont médiocres : l’OCDE, Moody’s, le FMI… abaissent leurs prévisions.
– Les politiques monétaires ultra-expansionnistes sont devenues moins efficaces. L’ont-elles jamais été ? En tout cas, il n’est plus interdit de faire part de ses doutes.
– Les menaces déflationnistes semblent justifier des taux toujours plus négatifs… sauf aux Etats-Unis. Mais l’apparente poussée inflationniste outre-Atlantique résulte essentiellement de la hausse des coûts médicaux induits par Medicare.
– Des mesures de relance budgétaires doivent donc être envisagées. La Chine a ouvert la voie avec un tsunami de liquidités sans précédent mis à la disposition du secteur bancaire depuis le 1er janvier, et une série de mesures censée accompagner la transition vers une économie « tertiarisée »… mais une hémorragie d’emplois se profile dans le secteur minier.
Les pays émergents sont de plus en plus fragilisés par la chute des matières premières et le poids de leur endettement |
– Les pays émergents sont de plus en plus fragilisés par la chute des matières premières et le poids de leur endettement.
Côté solutions, en revanche, le G20 a rendu copie blanche
Dommage, parce que le marché a sa petite idée sur la meilleure façon de résoudre tous les problèmes listés ci-dessus :
Effectuer un largage massif de billets de Monopoly par hélicoptère, non plus exclusivement au-dessus du sud de Manhattan et de Wall Street mais au-dessus des quartiers défavorisés.
Oui, les marchés commencent à approuver le principe consistant à distribuer de l’argent directement aux ménages, avec à la clé le surgissement d’une inflation importante et un coup d’arrêt à la hausse continue des inégalités.
C’est en 1998 que Ben Bernanke avait théorisé ce principe — d’où son surnom d' »Helicopter Ben » –, qui visait à sortir le Japon du marasme dans lequel il était tombé, via une relance par la consommation en 1998.
L’ex-futur patron de la Fed avait constaté il y a déjà plus de 18 ans que malgré des taux d’intérêt quasi-nuls, les ménages japonais n’achetaient pas, donc les entreprises n’empruntaient pas, et les investisseurs n’investissaient plus.
Ce dernier problème a été résolu en transformant la Banque du Japon en acheteur en dernier ressort de la plupart des actifs financiarisés (100% des bons du Trésor à long terme et 15% des actions négociées au quotidien). Si bien que le gouvernement japonais est désormais payé pour emprunter, alors que le pays est totalement insolvable.
Le G20 constate que c’est exactement la même situation « à la japonaise » que celle dans laquelle une bonne partie de l’Europe se retrouve engluée depuis maintenant plusieurs années : les dépenses des ménages sont insuffisantes.
Et l’emploi ?
L’Espagne a certes créé beaucoup d’emplois en 2015 mais en dévaluant les salaires — faute de pouvoir dévaluer la devise — et en pratiquant le temps partiel à outrance. Cela place le voisin français dans une situation de perte de compétitivité qui se traduit par le slogan : « la France, le seul pays en croissance qui ne crée pas d’emploi ».
Si la France produit plus mais sans embaucher, personne ne s’avise qu’elle fait ainsi la démonstration de sa productivité : toujours plus de richesse et toujours moins d’employés.
Le G20 est un échec… donc il convient de toute urgence de détourner l’attention des investisseurs et d’exploiter leur mémoire façon « poisson rouge » |
En résumé, le G20 est un échec… donc il convient de toute urgence de détourner l’attention des investisseurs et d’exploiter leur mémoire façon « poisson rouge ».
Wolfgang Schaüble avait averti d’emblée les 19 autres ministres de l’Economie participant au sommet de Shanghai vendredi matin. Il avait déclaré qu’il fallait arrêter avec les politiques monétaires expansionnistes et mettre l’accent sur les réformes structurelles.
Ce à quoi notre nouveau gouverneur de la Banque de France, Villeroy de Galhau, riposte via une interview accordée au Frankfurter Allgemeine Zeitung : « la BCE pourrait injecter davantage de liquidités dans le système financier de la Zone euro, nous devons agir : les rachats d’actifs peuvent être portés au-delà des 60 milliards d’euros par mois » (naturellement, puisque Mario Draghi a déclaré à maintes reprises que la BCE adoptait le mode « illimité »).
Les taux négatifs pourraient également être rendus encore plus négatifs… mais ils constituent un pousse-au-crime : il est tellement plus facile pour les gouvernements en difficulté de s’endetter que de prendre des mesures adéquates mais politiquement suicidaires… Ils sont aussi un danger pour la rentabilité du système bancaire, qui a envie de prêter de l’argent gratuitement… et enfin, à terme, un risque mortel pour les organismes qui gèrent les retraites.