La Fed semble assumer l’accélération de la masse monétaire, malgré une inflation persistante et une dette publique croissante.
Comme nous l’avons vu dans notre précédent article, la croissance de la masse monétaire a atteint son plus haut niveau depuis 27 mois.
Et la Réserve fédérale semble désormais tout à fait à l’aise avec cette situation, malgré le fait que le taux d’inflation mesuré par l’IPC (l’indice des prix à la consommation) ne semble pas prêt de revenir à l’objectif arbitraire de 2% par an prévu par le mandat de la Fed.
Par exemple, l’IPC et l’IPC de base ont tous les deux augmenté en novembre par rapport au mois précédent. En glissement annuel, l’IPC a atteint 2,7% en novembre, tandis que l’IPC de base est resté stable à 3,3% sur la même période. En d’autres termes, la Fed ne semble pas faire de la réduction du taux d’inflation des prix une priorité.
Les variations de la masse monétaire et de l’IPC ne suivent que rarement une relation linéaire ou proportionnelle. Mais avec le retour de la Fed à une politique monétaire accommodante, après avoir déjà injecté des milliers de milliards de dollars de liquidités en seulement quelques années, on peut s’attendre à ce que cela alimente davantage l’inflation des prix des actifs et des prix à la consommation dans les années à venir.
La Fed et le gouvernement fédéral ont besoin de taux d’intérêt plus bas
Alors, pourquoi la Fed a-t-elle repris sa politique de baisse des taux d’intérêt, alors qu’une quantité massive de liquidités injectées lors de la période COVID circule encore dans l’économie ?
L’une des raisons réside dans le fait que le gouvernement américain a besoin de taux d’intérêt bas pour que la charge de sa dette massive de 36 000 milliards de dollars reste supportable.
Le Trésor américain est déjà en passe d’enregistrer un déficit de plus de 3 000 milliards de dollars pour l’exercice 2025. Cela exerce une pression à la hausse sur l’ensemble des taux d’intérêt, et en particulier sur les taux des bons du Trésor. En effet, le gouvernement fédéral doit offrir des rendements plus élevés pour convaincre les investisseurs d’acheter toujours plus de bons du Trésor. Il compte sur la Fed pour intervenir et empêcher les taux d’intérêt de devenir incontrôlables. Sans cela, le Trésor se retrouverait écrasé par le poids du paiement des intérêts sur une dette qui ne cesse de gonfler.
En abaissant son taux d’intérêt directeur, la Fed se donne davantage de marges de manoeuvre pour intervenir sur le marché et racheter directement des bons du Trésor, contribuant ainsi à limiter la hausse des taux obligataires et épongeant une partie du « surplus » de dette publique.
Il semble qu’une telle intervention soit inévitable, car au niveau de rendement actuel, la demande des investisseurs pour les bons du Trésor est insuffisante par rapport aux besoins du gouvernement américain.
Depuis septembre, malgré les efforts de la Fed pour faire baisser les taux d’intérêt, les marchés obligataires ne semblent pas très coopératifs. Par exemple, le taux de rendement des bons du Trésor à 10 ans a bondi mercredi à 4,73%, son plus haut niveau depuis avril. Cela reflète une tendance globalement haussière qui a débuté en septembre, malgré le retour de la Fed à une politique plus accommodante. Parallèlement, le taux moyen des prêts hypothécaires à 30 ans a également augmenté et s’approche désormais des 7%.
Le fait que les marchés obligataires ne suivent pas la direction souhaitée par la Fed suggère que les investisseurs anticipent ce que la banque centrale refuse d’admettre : les dépenses publiques et le déficit devraient continuer à augmenter, alimentant ainsi l’inflation des prix.
Autrement dit, de nombreux investisseurs obligataires soupçonnent que, face à l’augmentation continue des déficits, la Fed sera contrainte d’intervenir pour absorber le surplus de bons du Trésor et empêcher les rendements d’atteindre des niveaux inacceptables pour le gouvernement fédéral. Pour racheter des bons du Trésor, la Fed devra donc créer davantage de monnaie, ce qui, comme l’anticipent les investisseurs, entraînera probablement une nouvelle poussée inflationniste.
A terme, pour lutter contre cette inflation des prix, la Fed sera de nouveau obligée de laisser les taux d’intérêt remonter. C’est pour cela que nous observons aujourd’hui une hausse des taux à long terme.
Ou, comme Bloomberg l’a résumé hier :
« Le marché des bons du Trésor américain à 20 ans a envoyé un signal particulièrement préoccupant lorsqu’un regain d’inquiétude chez les investisseurs autour de l’inflation a déclenché une vague de ventes, secouant les marchés obligataires mondiaux. Les rendements ont déjà bondi à plus de 5%.
‘Le marché américain exerce une influence disproportionnée, les investisseurs devant composer avec une inflation persistante, une croissance robuste et une incertitude extrême concernant l’agenda du président élu Trump’, a déclaré James Athey, gestionnaire de portefeuille chez Marlborough Investment Management. »
De plus, une grande partie de cette croissance soi-disant « robuste » n’est pas alimentée par des conditions économiques saines, mais par les dépenses publiques. Cela va inévitablement se traduire par une pression supplémentaire à la hausse sur les taux d’intérêt et par une inflation accrue des prix.
Tout cela est le reflet de l’accélération récente de la croissance de la masse monétaire, avec l’approbation apparente de la Fed.
Article traduit avec l’autorisation du Mises Institute. Original en anglais ici.