** Les gouvernements ont agi ; ils ont mis en place des plans permettant de racheter des titres et d’injecter des capitaux directement dans les banques mises à mal et dans les valeurs financières. C’est une perfusion de capitaux destinée à sauver les banques.
– La prise de contrôle des gouvernements donne aux marchés l’impression que le plus dur est passé dans cette crise financière. Cela ne signifie pas que les actions sont tirées d’affaire. Elles doivent encore tenir compte d’une récession — ou de la gravité des conséquences de la crise financière sur l’économie réelle. Mais les actions semblent penser que le pire de la crise financière est passé.
– Nous avons toutes les raisons de douter de l’efficacité de la nationalisation du secteur bancaire. Elle ne fait rien pour arrêter la chute de l’immobilier résidentiel partout dans le monde — qui est au cœur de la pourriture qui ronge le système. Mais les Britanniques et les Européens sont passés à la recapitalisation directe le week-end dernier.
** Bien, pas bien ou toute autre point de vue, le marché traite très clairement cela comme un point de rupture. Mais n’oublions pas la seconde action des autorités. Elle remporte le pompon.
– Dans une annonce faite lundi à New York, la Fed a déclaré qu’elle (et d’autres banques centrales) fourniraient des liquidités illimitées à quiconque en voudrait, plus ou moins.
– Plus spécifiquement, elle a déclaré que les participants à son nouveau programme de prêt pourraient "emprunter la somme qu’ils voudraient, contre le nantissement approprié dans chaque juridiction". Un peu comme un prêt sans apport personnel accordé au système financier mondial. Si la Fed pouvait parler, on peut imaginer qu’elle dirait : "si vous pensez que nous ne pouvons pas lutter contre la déflation de la dette avec de la création de crédit, attention les yeux".
– La Fed a encore un atout dans sa manche. Sa dernière carte serait des achats directs, par la banque centrale, d’actions, d’obligations, de CDO et de maisons. Mais sa dernière décision est un gigantesque pari qui pourrait inverser la tendance sur les marchés en offrant des fonds quasiment illimités à quasiment tous ceux qui le désirent — tant qu’ils ont un pouls et un compte en banque.
– Cette sorte de prêt n’est pas différente, dans son principe, des prêts sans apport personnel qui ont nourri la bulle des prêts hypothécaires. Oui, celle qui a précédé le krach de l’immobilier. Au moins, avec l’immobilier, les prêts étaient adossés à un vrai actif, la maison elle-même. Dans le cas présent, le programme visant à étendre les prêts gouvernementaux acceptera toutes sortes de nantissements, voire pas de nantissement du tout.
– Dans les faits, c’est un pari géant de la part des partisans de la monnaie fiduciaire, qui tablent sur le fait que les investisseurs préfèrent l’inflation à l’insolvabilité. Parce qu’il faut être réaliste : les liquidités illimitées ne font rien pour améliorer la solvabilité des institutions financières en difficulté. Les liquidités, ce n’est pas de la richesse. Même l’argent n’est pas de la richesse.
– La Fed et sa bande de banquiers centraux ont déchaîné "l’holocauste inflationniste" dont parlait Jim Rogers le week-end dernier. Ils vont essayer de battre une dépression déflationniste avec une expansion énorme et sans précédent de prêts gouvernementaux directs et/ou d’achats de titres. Est-ce que ça va marcher ?
– Ils ne réussiront pas à regonfler la bulle de l’immobilier. Mais tout ce nouvel argent devra aller quelque part. Nous sommes d’avis que les investisseurs capables de lire dans le marc de café reviendront vers les actions survendues du secteur de l’énergie et des matières premières pour se couvrir contre l’inflation. Ces valeurs représentent une bonne valeur fondamentale. Techniquement, elles sont à des niveaux attractifs. Et l’inflation créée par les mesures d’emprunt illimité devrait être impressionnante.
– Le moment est historique. La Fed doit penser qu’elle a fait ce que ses homologues de la Grande dépression n’avaient pas fait : empêcher la transmission de la crise des marchés financiers vers l’économie réelle. C’est vrai que le moral des consommateurs a déjà été affecté. Les prix des maisons chutent encore. Les dépenses vont ralentir.
– En mettant le secteur bancaire en quarantaine et en y injectant de nouveaux capitaux, les autorités espèrent que la crise financière se terminera par la chute sévère des marchés boursiers — sans se traduire par une contraction fondamentale de l’activité économique mondiale. En fin de compte, ce sera le marché actions qui décidera à quel point, selon lui, l’économie ira mal au cours de l’année qui vient.
– Le point de vue optimiste veut qu’il ait déjà décidé, et que les actions sont en bonne voie pour remonter à partir de maintenant. Mais gardez en tête que les analystes n’ont pas encore revu leurs attentes à la baisse pour les deux prochains trimestres. Lorsqu’ils le feront, les actions pourraient reprendre le chemin du déclin. En fait, nous sommes d’avis que les marchés finiront par tester leurs planchers de 2003. Mais ce n’est peut-être pas pour tout de suite.