Trump est pris entre deux fronts – l’Ukraine et l’Iran – au moment où le monde bascule. Pendant que les bombes tombent, c’est peut-être à la Maison-Blanche que se joue la paix… ou le chaos.
Vous avez vu les gros titres concernant ce conflit. Le 13 juin (heure de Tel-Aviv), Israël a lancé une attaque préventive massive – appelée « Rising Lion » (lion qui se dresse) – sur l’Iran, en déployant des missiles, des avions de combat, des drones, des cyberattaques et des assassinats ciblés.
Le déclencheur immédiat de cette guerre est une résolution adoptée quelques jours plus tôt par l’Agence internationale de l’énergie atomique (19 voix pour, 3 contre), stipulant pour la première fois en 20 ans que l’Iran violait ses engagements sur le nucléaire. Ce vote s’est basé sur le refus de l’Iran, ces six dernières années, d’expliquer la présence de matériaux nucléaires non déclarés sur son sol.
L’Iran a riposté en lançant des missiles balistiques sur Israël, ciblant des villes clés dont Tel-Aviv et Haifa. Certains bâtiments ont été détruits et certains civils tués, mais ces frappes n’ont pas eu un impact militaire significatif. La plupart des missiles et drones lancés par l’Iran ont été neutralisés par le Dôme de Fer d’Israël et d’autres systèmes de défense tels que le système antimissile Patriot fourni par les Etats-Unis.
Trump : la balle est dans son camp
Si Donald Trump se laisse entraîner dans la guerre en Iran ou s’il ne parvient pas à sortir les Etats-Unis de leur implication dans la guerre en Ukraine, Trump en pâtira.
En ce moment, ces deux questions sont sur le fil du rasoir.
Le programme MAGA (Make America Great Again) est contre la guerre et l’interventionnisme. Tucker Carlson et Steve Bannon en sont les principaux porte-voix, et ils sont tous les deux opposés à l’implication des Etats-Unis dans ces deux guerres.
Un événement de cette ampleur redessine la façon dont l’Amérique et le reste du monde considèrent Israël, et cela aura un impact direct sur la stratégie américaine au Moyen-Orient.
Ce que pensait Trump avant jeudi dernier a été totalement dépassé par les événements. Même ce qu’il déclare aujourd’hui, pour des raisons diplomatiques, est désormais caduc.
L’équilibre du pouvoir a résolument basculé en faveur d’Israël.
Les puissances mondiales et les Etats régionaux constatent qu’Israël est clairement puissant et que l’Iran est bien plus faible qu’on ne le pensait. Le Hezbollah l’a bien vu, et cela explique l’e-mail envoyé officiellement, où il s’engage à ne pas s’impliquer en lançant des missiles.
Les services du renseignement et le secteur des technologies de défense d’Israël ont acquis une stature mondiale. Cette tournure des événements restaure également la fierté ressentie par les communautés pro-israéliennes et la diaspora juive, dans le monde, qui considèrent à nouveau Israël comme une puissance décisive.
Au cours de la phase suivante, Israël se concentrera sur le changement de régime en Iran.
Avec leur supériorité aérienne, les forces de défense israéliennes peuvent désormais frapper les sites de production de gaz et de pétrole – l’épine dorsale de l’économie iranienne. D’autres institutions iraniennes, comme les universités et la société civile, seront également influencées de manière défavorable pour le régime iranien. Cela pourrait être l’étincelle qui déclenchera la rébellion de la population contre le régime théocratique.
Point crucial : Israël a réussi à détruire des sites iraniens qui étaient enfouis profondément sous terre.
Voici un rapport des renseignements provenant d’Iran, qui explique pourquoi ces capacités sont si importantes :
« L’Iran a longtemps supposé que ses armes les plus sensibles et ses sites de production de missiles étaient en sécurité, profondément enfouis dans le sol. Mais le raid mené par Israël en 2024 sur le site de missiles de Masyaf, en Syrie, a ébranlé cette supposition. Ce site bâti par les Iraniens, dissimulé à plus de 35 m sous terre, était sur le point de produire des missiles guidés de précision capables de frapper des villes et bases militaires israéliennes majeures. Ce raid réussi a démontré qu’Israël pouvait pénétrer même les cibles souterraines les plus fortifiées.
Longtemps, on a pensé que les sites nucléaires iraniens les plus sensibles, comme Natanz et Fordo, profondément enfouis sous des montagnes, étaient intouchables par de seules frappes aériennes. Les ‘proxies’ [NDR : terme utilisé dans le contexte de la guerre par procuration] régionaux de l’Iran, au Yémen et au Liban, ont développé des sites souterrains fortifiés répliquant les propres défenses de l’Iran. Le raid sur Masyaf a montré qu’Israël pouvait aussi éliminer ces cibles. Se cacher sous terre n’est plus une garantie de sécurité. »
Ironiquement, la clé de la résolution de la guerre en Iran se trouve en Ukraine. Le président Poutine a parlé au président Trump, samedi dernier. Il a proposé à Trump une sorte de rampe de sortie, s’agissant de l’implication des Etats-Unis en Iran. Si les Etats-Unis et la Russie parviennent à un rapprochement concernant l’Ukraine qui satisfasse Poutine, alors la Russie exercerait une pression sur l’Iran pour satisfaire les Etats-Unis (et, par extension, Israël). Cette approche permettrait de faire cesser deux guerres à la fois.
Mais d’abord, Zelensky devrait partir et l’aile du parti républicain soutenant Lindsay Graham devrait être écrasée. Or aucune de ces deux éventualités n’est garantie.
Trump est intelligent, mais il est entouré de va-t-en-guerre néoconservateurs.
Si Trump se sert de la rampe de sortie offerte par la Russie, les deux guerres pourraient rapidement être résolues. Sinon, elles persisteront indéfiniment, avec un risque concret d’escalade, au point d’une guerre nucléaire qui pourrait anéantir l’humanité.
Poutine a ouvert la porte. La balle est dans le camp de Trump.