Inutile pour un ennemi d’attaquer les Etats-Unis : couper le robinet du crédit suffirait à faire vaciller l’économie.
Hier, nous avons soulevé une question audacieuse. Si quelqu’un – une puissance étrangère ou des extraterrestres – voulait détruire l’économie américaine, pourquoi dépenser du temps et de l’argent dans la défense ? Il lui suffirait de nous couper l’accès au crédit fictif.
Les ventes automobiles s’effondreraient. Les chantiers immobiliers seraient stoppés net. Les restaurants et les hôtels deviendraient des refuges pour souris et cafards. Des millions de personnes perdraient leur emploi. Des millions de maisons seraient saisies. Les banques alimentaires verraient des files d’attente interminables.
Aujourd’hui, c’est le crédit qui fait tourner le monde. ABC News rapporte :
« Le niveau d’endettement des ménages américains – incluant prêts hypothécaires, prêts automobiles, cartes de crédit et prêts étudiants – atteint désormais un nouveau record, selon les données publiées mercredi par la Réserve fédérale de New York. La dette totale des ménages a atteint 18 590 milliards de dollars entre juillet et septembre, soit 197 milliards de plus que le trimestre précédent. Depuis la fin de 2019, juste avant la récession liée à la pandémie, la dette globale a augmenté de 4 400 milliards de dollars. »
Lorsque l’un de nos ancêtres est arrivé dans le Nouveau Monde, au début du XVIIIᵉ siècle, il était soumis à un contrat d’engagement. Ecossais, il avait été capturé par les Anglais lors d’une bataille, puis envoyé à Kent Island, dans le Maryland, où un planteur local l’avait acheté. Il partageait le logement et la nourriture des esclaves africains. A la différence de ceux-ci, il a été libéré au terme de son engagement, au bout de sept ans. Mais durant toute cette période, il ne disposait pas librement de son temps : il était tenu de travailler pour son maître.
Un prêt hypothécaire sur 30 ans n’est qu’une version moderne de ce type de contrat : une obligation de travailler pour enrichir quelqu’un d’autre. Un prêt sur 50 ans étend encore cette servitude… exigeant un demi-siècle d’efforts.
Ainsi, le passage de la propriété réelle de sa maison, de sa voiture ou de ses outils, à leur simple paiement mensuel, a marqué un tournant majeur. Le maître est devenu l’esclave. L’économie a basculé de l’accumulation de richesses vers l’accumulation de dettes. Et le système politique n’encourageait plus la constitution de patrimoine : il incitait, au contraire, les électeurs à s’endetter davantage pour stimuler l’économie.
L’un des programmes les plus absurdes de l’histoire du gouvernement américain fut la loi CARS de 2009. Elle rémunérait les gens pour qu’ils échangent leur vieille voiture contre un modèle neuf, puis imposait la destruction des anciens véhicules par injection létale. L’huile moteur était remplacée par du silicate de sodium, ce qui bloquait définitivement les pièces mobiles.
Quel intérêt y avait-il à éliminer des voitures encore fonctionnelles ? Une étude ultérieure du Quarterly Journal of Economics a conclu que le programme Cash for Clunkers était parfaitement inutile. Les chercheurs n’ont trouvé « aucune preuve d’un effet sur l’emploi, les prix de l’immobilier ou les taux de défaut de paiement des ménages ».
Le seul résultat notable fut d’encourager des personnes qui possédaient leur voiture… à s’en débarrasser pour en acheter une autre qu’elles ne possédaient pas, et pour laquelle elles devraient payer des mensualités. Ceux qui n’avaient aucune dette automobile se sont retrouvés liés par un contrat de quatre ans.
A l’échelle de l’économie, le passage de la monnaie réelle à la monnaie de crédit a transformé le système économique, le système politique et la structure sociale. Autrefois, les ménages devaient travailler et épargner. Ils devaient produire de la richesse avant d’en profiter. La richesse gagnée et la richesse consommée étaient en équilibre : elles augmentaient ensemble.
Aujourd’hui, vous pouvez obtenir la charrette et le cheval simultanément, sans avoir à payer immédiatement l’un ou l’autre. La personne moyenne utilise le crédit pour profiter de maisons, voitures, vacances, repas et écrans géants. Tout est accessible… à condition d’accepter un contrat de long terme, fait de paiements mensuels, et incompatible avec le chômage ou une hausse des taux.
Comme nous l’avons vu, le prix moyen d’une maison atteint aujourd’hui 420 000 dollars. Avec les intérêts d’un prêt sur 30 ans, elle coûte plus de 800 000 dollars. Avec une hypothèque sur 50 ans, la facture grimpe à 1,2 million.
Celui qui dispose de capital – d’épargne, d’argent réel – ne paie que 420 000 dollars. Il profitera de la même maison, pendant les mêmes 50 ans, que l’emprunteur à très long terme… mais pour un tiers du prix. Et il bénéficiera de l’indépendance et de la sérénité qu’offre la pleine propriété : que les temps soient bons ou mauvais, que les taux montent ou baissent, il aura toujours un toit assuré.
Aujourd’hui, nul besoin d’une loi du Congrès pour mettre les ménages américains à genoux. Pas besoin d’une attaque étrangère… ni extraterrestre. Pas même d’un décret présidentiel. Il suffit que la Fed relève les taux d’intérêt. Le crédit se tarirait aussitôt.
En 1980, Paul Volcker a porté le taux directeur de la Fed à 20 % pour purger l’inflation du système.
Aujourd’hui, avec des ménages bien plus endettés et bien plus dépendants du crédit, même un taux de 10 % suffirait à provoquer une paralysie totale de l’économie.

1 commentaire
Si les américains décident de réduire leur recours aux emprunts et donc de moins consommer , le remboursement des emprunts en cours provoquerait mécaniquement une réduction de leur masse monétaire, qui couplée à une baisse de la consommation , serait favorable à une baisse des prix…