Fausse monnaie, baskets hors de prix et taux négatifs en Suisse : c’est la fin du monde, à coup sûr… surtout pour le système actuel.
La semaine dernière, la Chambre des représentants US a voté pour un accord budgétaire qui fournit plus d’argent (plus d’inflation) à quasiment tous les plans farfelus concoctés par les autorités.
Nous faisons une petite pause pour rappeler au lecteur que « l’inflation » signifie une augmentation de la quantité d’argent disponible. Elle peut se transmettre aux prix à la consommation… ou aux prix des actifs.
La chose à retenir, c’est qu’une fois l’inflation mise en place (suite à une relance par le biais d’injections d’argent et de crédit) dans une économie – que ce soit dans l’économie réelle ou sur les marchés financiers –, les gens ajustent leur comportement. Ils paient plus. Ils dépensent plus. Ils empruntent plus.
Suite à quoi leur subsistance, leur richesse, leur réputation – et l’économie tout entière – dépendent d’un accroissement de l’inflation. Il faut donc continuer sur cette voie… ou passer au sevrage.
L’inflation ou la mort. Il n’y a pas de troisième voie.
Distorsions, perversions et bizarreries
En attendant, des choses étranges et remarquables se produisent. L’inflation modifie les marchés, les économies, et même la manière dont les gens pensent. Plus elle dure, plus elle apporte de distorsions, perversions et bizarreries.
La semaine dernière, on apprenait sur le site Oddity Central que…
« Une femme de 20 ans a été récemment arrêtée en Allemagne après être entrée chez un concessionnaire automobile pour tenter d’acheter une voiture à 15 000 € avec de faux billets imprimés sur du papier ordinaire au moyen d’une imprimante à jet d’encre bon marché.
Un des employés a déclaré aux médias allemands qu’il avait littéralement demandé à la femme si elle voulait jouer au Monopoly ou acheter une voiture mais, ayant constaté qu’elle était sérieuse, il avait appelé la police. »
Et ce gros titre de CNN :
« La rare ‘Moon Shoe’ de Nike s’est vendue 437 500 $, battant à plate couture le record d’enchères en matière de baskets. »
Puis un tweet choquant est arrivé :
« La courbe des rendements de la Suisse est désormais négative sur toutes les maturités, c’est-à-dire toute durée de trois mois à 50 ans. »
Partout dans l’actualité, l’étrange gagne. On a aperçu dans le ciel des comètes en forme de signe du dollar. On a vu Elvis Presley dans un centre commercial de Kansas City. On a découvert un œuf tout frais pondu mais portant la formule du taux neutre de la Fed…
C’est la fin du monde, c’est sûr.
L’avion Boeing qui se vend le mieux est cloué au sol, après que des défauts de conception présumés ont tué quelque 350 personnes. Les fonds propres de Boeing sont négatifs de 5 Mds$ (ses dettes dépassent ses actifs).
Il y a cependant quelque chose d’étrange : le titre de ce mastodonte centenaire continue de s’échanger aux mêmes niveaux qu’une start-up toute neuve – à plus de 40 fois les bénéfices. Allez comprendre.
Comprendre, c’est précisément notre but à La Chronique. Ce que nous comprenons, c’est que le système tout entier est devenu un peu fou… et nous pensons savoir pourquoi.
Cela a peut-être à voir avec l’incapacité de Boeing de construire un avion sûr… et avec la perte de capacité industrielle des Etats-Unis. Nous pensons aussi que cela se terminera par un désastre – une dépression et une hyperinflation mondiales – au cours duquel les principales devises de la planète seront discréditées, dépréciées et dévalorisées.
La catastrophe n’a pas eu lieu… pour l’instant
Mais examinons une chose à la fois – et revenons-en à l’actualité.
Felix Salmon, correspondant financier en chef du site d’information financière Axios, exprimait probablement le point de vue majoritaire lorsqu’il a dit de l’accord de dette :
« Il n’y a aucune preuve, en 240 ans d’histoire américaine, que le niveau de dette nationale ait compté un jour.
Les Etats-Unis impriment leur propre devise et peuvent emprunter autant qu’ils le souhaitent […] Les ‘faucons’ du déficit prêchent la catastrophe depuis des décennies. Les faits ne leur ont jamais donné raison. »
C’est une idée si libératrice – les autorités peuvent accumuler autant de dette qu’elles le souhaitent – qu’il est stupéfiant que les génies guidant la politique budgétaire américaine n’y ont encore jamais pensé. S’ils l’avaient fait… ils parviendraient aujourd’hui à une conclusion toute différente.
Ah, cher lecteur, vous êtes si rapide… vous en êtes déjà à une conclusion plus avancée, n’est-ce pas ? Ce que l’on voit dépend de ce que l’on a vu.
L’endroit où vous vous trouvez à un moment donné dépend de la manière dont vous y êtes arrivé.
Les 240 années d’Amérique censées prouver qu’on ne peut pas avoir trop de dette sont les 240 années durant lesquelles les Américains considéraient, avec sagesse, qu’un excès de dette est bien un problème.
En d’autres termes, c’est uniquement parce que les décideurs politiques sont généralement restés modérés que la dette n’a pas causé de difficultés majeures sur la période.