En obligeant les acteurs économiques européens à consommer du carburant de synthèse voué à être importé, l’Europe reproduit une situation de vulnérabilité subie.
Officiellement, l’Europe voit dans les carburants de synthèse un moyen irremplaçable d’atteindre la neutralité carbone à horizon 2050.
En toute logique, Bruxelles devrait donc dérouler le tapis rouge aux producteurs pour leur permettre de fabriquer, à bas coût et sans barrières administratives, ces précieux liquides.
Une fois que tous les pans de notre économie qui peuvent être électrifiés l’auront été, ce sont en effet des dizaines, voire des centaines de millions de tonnes de carburants qu’il faudra bien produire tous les ans pour maintenir notre niveau de vie. Rappelons qu’à la seule échelle de la France, plus de 70 millions de tonnes de produits pétroliers étaient consommés tous les ans avant la pandémie.
De fait, le cadre législatif prévoit déjà une consommation importante de carburants de synthèse à partir de la prochaine décennie.
L’interdiction de la vente de véhicules dotés de moteurs thermiques à horizon 2035, abondamment commentée tant le couperet est drastique, prévoit une exception pour les moteurs consommant du carburant de synthèse produit à partir de CO2 capté ou de biomasse.
Pour les compagnies aériennes, la feuille de route est encore plus précise.
Dès 2030, les compagnies aériennes devront incorporer au minimum 6% de carburant d’aviation durable (SAF) dans le réservoir de leurs avions. Un objectif déjà difficile à atteindre au vu des capacités actuelles, et dont la hausse sera exponentielle : cinq ans plus tard, la proportion devra avoir atteint les 20%, et elle devra dépasser les 70% en 2050.
Le législateur européen a ainsi créé un marché pour les carburants de synthèse, et ce quel que soit leur intérêt écologique, économique ou énergétique. Mais dans le même temps, il laisse démunis les producteurs potentiels, obligeant les consommateurs contraints à se tourner vers les importations extra-européennes.
Création de champions européens : l’occasion manquée
Nous pourrions nous attendre à ce que cette trajectoire imposée, dont le coût se chiffrera en centaines de milliards d’euros par an pour l’économie (440 Mds€ par an pour le seul transport aérien, selon les chiffres d’Airlines for Europe), soit accompagnée d’une certaine bienveillance pour les producteurs.
Cela permettrait a minima de faire émerger sur le Vieux Continent un écosystème de la production de carburants de synthèse. Disposant d’un marché captif – puisqu’imposé par un cadre réglementaire plus strict que dans les autres zones géographiques – il atteindrait plus rapidement des volumes de production importants et pourrait bénéficier d’économies d’échelle. Nos industriels disposeraient alors d’un avantage sur la scène internationale et notre économie regagnerait d’un côté ce qu’elle a perdu de l’autre.
Mais, une fois de plus, Bruxelles manie l’arme écologique de manière uniquement punitive. Rien n’est fait pour faciliter la vie des producteurs européens, qui souffrent déjà d’un coût de production supérieure de 50% à celui de leurs concurrents installés aux Etats-Unis, du fait du coût plus important de l’énergie et de l’absence de subventions.
Ces derniers mois, nous avons assisté en Europe à une véritable hécatombe dans les projets de sites de production de carburants verts. Pour les start-ups du secteur, l’attentisme est de mise.
Encore plus inquiétant, même les pétroliers jettent l’éponge les uns après les autres, malgré leur savoir-faire dans la production, la transformation et la distribution d’hydrocarbures.
Coup sur coup, BP et Shell ont annoncé cet été l’abandon de leurs projets respectifs de production de carburants de synthèse. La production potentielle de carburants verts issus du retraitement de la biomasse et de la capture de CO2 a ainsi été amputée de plus d’un million de tonnes par an.
Quelques semaines plus tard, c’est le Danois Orsted qui a, à son tour, jeté l’éponge en abandonnant le projet FlagshipOne. Ce site pilote, qui devait être en mesure de produire plus de 55 000 tonnes de méthanol de synthèse par an dès 2025, avait été racheté en 2022 à Liquid Wind AB. Il s’intégrait pourtant parfaitement au métier d’opérateur éolien du groupe, qui pouvait espérer valoriser la surproduction de plus en plus fréquente des champs éoliens en mer du Nord.
Pourtant, malgré un outil industriel capable de produire de l’électricité à coût marginal et à valeur de marché nulle de plus en plus fréquemment, Orsted n’a pas réussi à boucler l’équation économique de production de carburants de synthèse.
Une fois toutes les dépenses prises en compte, le coût de production sur le territoire européen resterait autour des 3 000 dollars la tonne équivalent-pétrole en régime de croisière. Or, dans le même temps, les producteurs américains peuvent s’appuyer sur une énergie meilleur marché et sur d’importantes subventions dans le cadre de l’Inflation Reduction Act.
Résultat des courses, le carburant de synthèse Made in USA est devenu en quelques mois moins cher que celui produit sur le Vieux Continent, même en intégrant les coûts logistiques. Alors qu’il avait déjà baissé à un peu moins de 3 000 $/tonne l’an passé, l’équivalent de l’objectif de prix des producteurs européens d’ici à 2030, son prix s’est encore effondré ces derniers mois. Il a franchi à la baisse le seuil psychologique des 2 000 $ à la fin de l’été, et la trajectoire ne montre aucun signe d’inflexion.
Pour les producteurs européens, la messe est dite : dans le contexte économique, social, et réglementaire actuel, les projets de sites de production de carburant de synthèse n’ont aucune chance d’être rentables, alors que les prix de vente les plus optimistes se situent déjà largement au-dessus de ce que propose, dès aujourd’hui, la concurrence étrangère.
Après les hydrocarbures, les carburants verts ?
Malgré cette impasse stratégique, Bruxelles ne laisse paraître aucune volonté d’assouplissement de sa politique punitive.
La Commission européenne reste droite dans ses bottes et continue d’imposer aux acteurs économiques l’achat de carburants de synthèse, alors même qu’ils proviendront en grande majorité de fournisseurs étrangers.
Ce faisant, l’Europe se condamne à reproduire la situation de dépendance énergétique qui lui a coûté si cher par le passé, comme si se retrouver soumis au bon vouloir des producteurs du Moyen-Orient (pour le pétrole) et de Russie (pour le gaz) était une expérience à reproduire.
Cet été a pourtant l’occasion de faire les comptes de notre dépendance au gaz russe, et de réaliser à quel point les assujettissements ont la vie dure.
Contrairement au satisfecit clamé depuis deux ans par nos dirigeants, le gaz russe est simplement passé de 45% à 18% de la consommation européenne depuis 2021. Dans le même temps, l’utilisation du gaz naturel s’est effondrée de 18%, avec les conséquences économiques que l’on sait pour l’industrie manufacturière, les entreprises et les ménages. La réalité est que nous n’avons remplacé le gaz russe qu’à la marge depuis deux ans, et que le gros des achats que nous ne faisons plus est dû à une destruction de la demande.
En obligeant les acteurs économiques européens à consommer du carburant de synthèse voué à être importé, l’Europe reproduit cette situation de vulnérabilité subie, cette fois-ci au nom de la transition écologique. Un masochisme dont nous ferions bien de nous passer.
7 commentaires
Voilà ce qu’il se passe quand on est dirigé par (au choix) : des bons à rien, ou des traitres ,ou les 2 à la fois……..
Il est de notoriété publique que ce sont à minima des bons à rien, puisque sont systématiquement dirigés aux instances européennes, tous ceux qui ont tout raté dans leur pays.
Mais bien sûr que si, que l’UE est écologique ! Elle est la championne toutes catégories en matière de recyclage.
Je parle du recyclage du personnel politique et économique des Etats-Membres qui se trouve être d’une nullité crasse, le dernier exemple étant le Séjourné. Qui ira désormais séjourner à la Commission de Bruxelles où sans nul doute, il va y faire des étincelles…
Outre le fait que l’UE est une secte à l’idéologie écologiste douteuse et surtout punitive, c’est aussi le relais du mondialisme sur notre continent. Lequel mondialisme a pour corollaire le contrôle des populations, ainsi que leur diminution drastique. Objectifs qui peuvent être atteints via l’énergie, ou plutôt l’absence d’énergie : sans énergie, ou avec une énergie rare donc chère, on se déplace moins, et surtout l’on a des pénuries alimentaires et de chauffage, 2 conditions qui sous nos latitudes, peuvent concourir à réduire la population. Charmant programme que celui des dingues de l’UE. On va s’amuser follement.
J’aime la marche à pied ,le vélo, et le bus si nécessaire, ainsi que ma cabane BBC de 15m2 construite de mes mains à partir d’un plan conçu par mes soins, et posée au fond d’un grand jardin dont je suis le gardien et jardinier .
Quand on abandonne le pouvoir national au profit d’incapables en échec dans leur propre pays (Von der Layen, Séjourné…), réfugiés à Bruxelles et traîtres à leurs origines nationales mais à la solde de puissances étrangères comme les USA, quand les peuples européens se trouvent alors dirigés par des politiques non élus aux pouvoirs supérieurs à ceux des démocraties des pays autrefois souverains, alors le mot démocratie est totalement vidé de sa substantifique moëlle et les citoyens européens se retrouvent réduits à un esclavage moderne où leur avis n’a pas sa place… Seule un réveil brutal de la léthargie dans laquelle ces citoyens européens sont tombés pourrait faire vaciller voire tomber le système corrompu en place
Il va être trés intéressant de suive le projet E-CHO d’Elyse Energy, projet de production de molécules bas-carbone avec pour objectif de
contribuer à la décarbonation des secteurs de la chimie, du transport maritime et du transport aérien en produisant 200 Ktonnes de E-Méthanol par an et de 75 Ktonnes de E-biokérosène biotraités à partir de 72 Ktonnes d’hydrogène et en moyenne 250 Ktonnes de la biomasse primaire de la forêt pyrénéenne par an. Le temps de renouvellement de la forêt est incompatible avec le temps de sa destruction.
Personne n’est masochiste, l’europe corrompue de Bruxelles, qui est dirigée dans l’ombre par les USA sert à ravir leurs intérêts. Quant à nous, les français, nous sommes les spectateurs impuissants de notre naufrage! Bruxit, vite!