La Bank of England est claire : le pays va manquer de gaz. Et en Allemagne ? Les dépenses des ménages se sont s’effondrées de 8,8% le mois dernier.
Nos voisins britanniques s’apprêtent à subir une récession carabinée au cours des 18 prochains mois, et il n’est pas certain que l’Amérique puisse soutenir la reprise chez son allié grand breton avant 2024.
Nous ne sortons pas cette prévision de notre chapeau, puisque c’est Andrew Bailey, le gouverneur de la Banque d’Angleterre qui l’a dévoilé ce jeudi 4 août :
« Nous prévoyons une contraction de la production chaque trimestre entre le dernier trimestre de 2022 et le dernier de 2023. Nous subirons une première contraction du PIB de 1,5% en 2023 et une deuxième de 0,25% en 2024 et la croissance après cette période restera très faible. »
Et d’ajouter :
« L’inflation poursuivra son escalade pour atteindre plus de 13% en octobre, un record depuis fin 1980, partant d’un pic de 9,4% en juin qui ne marquera donc pas le sommet de la courbe, ce qui alimentera une crise aiguë du coût de la vie. »
Après avoir pris connaissance de ces prévisions qui ont des allures d’un avis placardé sur les portes de l’enfer, la question que peuvent légitimement se poser les britanniques pour abréger leurs souffrances, c’est « la corde, ou le gaz » ?
Ca ne marche pas
La Bank of England a déjà tranché le débat par avance : le pays va manquer de gaz, d’où une hausse prévisible de 75% des tarifs de l’électricité avant Noël.
Avec un peu de chance, les britanniques qui ne pourront pas payer leur chauffage pourront mourir de froid à moindre coût.
Nous attendrons avec impatience les commentaires de la BCE en novembre si l’inflation accélère à 14% : elle devrait faire le constat que les hausses de taux, face à une flambée de l’énergie, ça ne marche pas !
La BCE au moins, fait preuve de réalisme : comme elle sait que ça ne marchera pas, elle ne les montera donc pas au-delà de 1,00%, alors que la Fed semble déterminée à les monter au-delà de 3%.
La BCE a lâché l’affaire dès juin 2021 (quand l’inflation a passé la barre des 2%) et elle n’avait pas encore levé le petit doigt quand l’inflation était à 8%. Elle se contente de sauver les apparences avec un discours de fermeté face à la hausse des prix, histoire d’éviter que l’euro dévisse vers 0,90 face au dollar, ce qui nous vaudrait 10% d’inflation importée de plus.
Un billet vert robuste, en revanche, c’est à l’avantage des consommateurs américains, et d’une pierre deux coups, cela ne pénalise même pas les plus gros exportateurs américains puisqu’ils exportent… du pétrole et du gaz, que nous autres Européens sommes obligés de leur acheter, sinon il n’y a plus qu’à fermer nos usines.
Alerte à la consommation
Je ne vais pas révéler un grand secret, nos voisins allemands se préparent déjà à du chômage partiel et à des congés de Noël, très, très longs.
Robert Rabeck, le ministre de l’Economie, a déjà placé l’Allemagne en « état d’alerte » énergétique il y a trois semaines, ce qui signifie qu’il va falloir arbitrer : faire tourner l’industrie ou chauffer les hôpitaux, les écoles et les administrations, puis permettre aux citoyens de prendre des douches chaudes.
D’où la question : de combien l’économie allemande – bien plus industrialisée que la britannique – va-t-elle ralentir ? Quel sera son taux de contraction, sachant que la Bank of England prévoit 4 ou 5 trimestres à -1,5% – et ça, c’est si la consommation ne s’effondre pas de la Cornouaille à l’Ecosse !
L’Allemagne vient déjà de tuer le suspens en la matière : les dépenses des ménages se sont s’effondrées de 8,8% en juin.
C’est presque aussi brutal que lors de la récession due aux confinements au deuxième trimestre 2020. Avec la différence qu’aucune décision politique ne pourra faire repartir l’activité sur un simple décret instaurant un retour à la normale, parce que le gouvernement décide que la pandémie est terminée.
Olaf Scholz ne peut pas décréter que le gaz russe revient, aussi abondant et pas cher que l’été dernier, à moins de se fâcher pour de bon avec les Américains, en levant les obstacles à l’ouverture de Nordstream-2 et en acceptant de payer les livraisons de Gazprom en roubles.
Donc il n’y aura pas de miracle dans l’économie réelle… contrairement au sursaut des indices boursiers depuis le 5 juillet.