** Les raisons de continuer de privilégier un scénario de consolidation moyen terme des places boursières sont nombreuses, et nous allons vous faire l’économie d’une déclinaison des arguments que nous vous avons exposés tout au long de la semaine passée. Cependant, le rebond auquel nous avons commencé à assister lundi après-midi ne nous surprend pas
Certes, la journée avait bien mal commencé dans le sillage des places asiatiques, elles-mêmes victimes d’un trou d’air sur les indices américains vendredi. Tokyo chute de 2,5%, le Nikkei a enfoncé son plancher annuel, tandis que Hong Kong plongeait à nouveau de 1 000 points, soit -3,8%).Mais avec un score fleuve de -7,5% sur le Nasdaq 100 en une semaine — un record depuis fin septembre 2001 — et un test des 13 000 points sur le Dow Jones, il fallait s’attendre à ce que les gérants ayant opté pour une stratégie offensive à la baisse commencent à matérialiser leurs gains.
Après plusieurs déconvenues causées par de fausses amorces de consolidation (survenues depuis la mi-octobre), le moment est venu d’effacer les pertes sur les positions baissières constituées en anticipation d’une inéluctable correction sur les technologiques américaines et les actions chinoises (et le bon « timing » ne fut pas facile à appréhender cet automne).
Les bears viennent de se régaler avec une chute de 10% de Hong Kong, de 17% à Shanghai et de 9% sur le Nasdaq Composite (ajoutez-y -3% sur le dollar). C’est le genre d’écart qui mérite d’être matérialisé en attendant de remettre le couvert.
** Une nouvelle fenêtre de tir pourrait s’ouvrir très rapidement cette semaine car la séance des « Trois sorcières » (elle aura lieu ce vendredi même) devrait remobiliser les vendeurs à découvert. Ils devraient bénéficier cette fois-ci du renfort des trend followers, passés maîtres dans l’art d’amplifier en fin de mois la tendance sous-jacente — peu importe qu’elle soit positive ou lourdement négative comme ce sera le cas pour l’échéance novembre avec un écart de -6,5%.
De nombreux analystes estiment que les indices ne sont pas près de repartir à la conquête des sommets annuels : la Fed, le FMI, la BCE et la plupart des économistes des grandes banques d’affaires, reconnaissent que la crise des subprimes va causer de gros dégâts sur la croissance américaine et se solder par une contraction des liquidités à l’échelle mondiale.
Ce phénomène est largement corroboré par la rechute du dollar jusque vers 109,3 yen, le billet vert se redressant ensuite vers 110. Ce qui confirme (s’il en était encore besoin) qu’un vaste mouvement de rachat des ventes à découvert sur la devise nippone s’est amorcé avec le dernier assouplissement monétaire effectué par la Fed.
Le carry trade euro/yen subit le même sort puisque la monnaie unique rechute sous les 160 (soit -3,5% en 48 heures). C’est spectaculaire — et ce n’est pas sans rappeler le plongeon observé en pleine débâcle des marchés du 13 au17 août dernier.
** Mais le CAC 40, qui vient de chuter de 400 points en moins d’un mois (-6,8%), a bénéficié ce lundi d’un coup de pouce de Wall Street au cours de la dernière heure de cotations. Les indices américains, eux, ont bénéficié de rachats à bon compte après une entame de séance bien hésitante.
La séance été active à Paris puisque plus de sept milliards d’euros ont été échangés sur les seules vedettes du CAC 40. Les valeurs bancaires ont fait la différence avec une progression d’ensemble voisine de 3%. BNP Paribas signait la plus forte hausse (avec 4,05%), ex aqueo avec Dexia (3,8%) tandis que Crédit Agricole (2,8%) et Société Générale (2,3%) complétaient le quinté gagnant du jour (lequel inclut EADS avec ses 2,8%).
Le marché parisien affichait au final un gain symbolique de 0,2% après avoir testé 5 484 points au cours des premiers échanges puis de nouveau vers 13h30, lors de la publication du profit warning de l’Américain E-Trade. Ce dernier essuie de lourdes pertes sur les dérivés de crédit de type ABS et CDO (le titre s’effondre de 53%, à tout juste 4 $ alors qu’il valait encore 25 $ le 6 juin dernier).
Les financières se redressaient également outre-Atlantique, à l’image de Citigroup qui rebondit de 5%, suivi de J.P Morgan à 3%, permettant au Dow Jones d’afficher 0,5% à la mi-journée. Mais il ne faut pas s’emballer prématurément à propos du rebond de Wall Street car les volumes restaient anecdotiques en ce lundi semi-férié, marqué par les célébrations du Veteran’s Day (l’équivalent américain de notre 11 novembre).
** Les premiers chiffres américains importants ne paraîtront que jeudi, avec les ventes au détail pour le mois d’octobre, les prix à la consommation et l’indice de la Fed de Philadelphie.
Sans attendre d’en avoir pris connaissance, les analystes d’UBS ont abaissé à 2% leurs anticipations de croissance du PIB américain en 2008, soit 0,5% de moins que précédemment. Parallèlement, ils ne prévoient plus que +1,6% en Europe l’année prochaine, soit une révision de -0,25%.
De quoi calmer la spéculation sur le marché pétrolier… d’autant que l’OPEP annonce qu’elle envisage d’accroître sa production d’ici la fin de l’année. Hier, le pétrole affichait un repli de 2,5% à New York (93,65 $ au plus bas sur le NYMEX) avant de se redresser vers 94 $.
** L’or en profite — c’est une image car c’est plutôt nos lecteurs qui devraient profiter de l’occasion ! — pour se replier de 4% jusque sur 800 $. Le précieux métal subit le même type de reflux que celui qui affecte la plupart des matières premières depuis 48 heures.
Cette consolidation pourrait se prolonger durant quelques séances, surtout si la masse d’argent liquide disponible sur les marchés continue de se contracter. L’or devrait retrouver du soutien dans la zone des 750 $ l’once (moyenne mobile à 50 jours). Il ne serait pas mauvais qu’un brusque coup de vent contraire fasse lâcher prise aux « mains fragiles » : la prochaine vague n’en sera que plus puissante et prometteuse !
Philippe Béchade
Paris