▪ Alors que je me trouvais à Yangon, j’ai rencontré U Moe Myint, fondateur et gestionnaire de deux compagnies pétrolières au Myanmar (que l’on appelle aussi la Birmanie). L’une est une compagnie de services pétroliers. L’autre est une compagnie d’exploration et de production de gaz et de pétrole. Bientôt, U Moe Myint sera un homme très riche.
Les ressources naturelles inexploitées font partie de l’histoire de la Birmanie. S’y mêlent également certaines considérations géopolitiques. Tout ceci nous dit quelque chose de l’avenir des marchés du gaz et du pétrole. Voyons cela de plus près…
J’ai rencontré U Moe Myint dans son bureau ainsi que ses deux fils qui travaillent avec lui. Notre échange a débuté par des généralités. Cela vous surprendra peut-être, la Birmanie est un vieux producteur de pétrole. Le pays a exporté ses premiers barils avant que Lincoln ne soit président, en1853. En 1941, la Birmanie était le quatorzième pays producteur de pétrole au monde.
En 1963, la junte militaire nationalisa le secteur. Aujourd’hui, la Birmanie ne fait pas partie du club des 50 premiers pays producteurs de pétrole. Des pays beaucoup moins riches en pétrole comme le Tchad ou la Biélorussie produisent plus d’or noir que la Birmanie actuellement.
Toutefois, la probabilité de se rétablir est très élevée.
Il est difficile de savoir quelle quantité de pétrole et de gaz possède la Birmanie. « La Birmanie est indubitablement une région pétrolifère », explique U Moe Myint, « mais il reste encore beaucoup à explorer ». Il existe 17 bassins sédimentaires, dont 14 onshore. Les estimations sur la quantité de pétrole et de gaz qui pourrait s’y trouver varient du simple au double. Disons simplement qu’il y en beaucoup. Et sachant comment ces choses ont tendance à fonctionner, quelles que soient les estimations, elles s’avéreront certainement trop basses.
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Voilà un autre exemple qui dément l’idée très répandue que nous atteindrons bientôt le pic de la production pétrolière. Ici en Asie, on trouve une autre vaste région pétrolière encore inexploitée à ajouter à la liste de plus en plus longue de nouvelles réserves potentielles qui entreront en fonctionnement au cours des prochaines années.
▪ Une réponse au problème de la Chine ?
En tous les cas, la plupart des grandes compagnies pétrolières internationales se frottent les mains en pensant à la Birmanie et à l’exploitation de la dernière grande frontière de l’Asie. Bien sûr, le pays a également attiré l’attention des Chinois qui ont un grand besoin de pétrole. U Moe Myint et moi avons discuté de la manière dont la Birmanie pourrait résoudre une vieille inquiétude stratégique pour la Chine.
Actuellement, la plupart du pétrole arrive en Chine via le Détroit de Malacca. C’est l’une des plus importantes voies de navigation au monde. Elle voit traverser près d’un quart des marchandises mondiales – dont le pétrole. Le problème pour les Chinois est que la marine américaine contrôle le détroit. Les Chinois cherchent depuis longtemps une autre route maritime.
La Birmanie est cette route.
Un hub ou carrefour de transport majeur est en train d’être construit dans la ville de Dawei, au sud de la Birmanie. La pièce maîtresse de cette plaque tournante est un port en eaux profondes. Une fois terminé, ce port aura la capacité de rivaliser avec celui de Singapour.
Le transport des marchandises via Dawei au lieu du détroit conduira à de fortes réductions des coûts et des temps de transport. Dawei fournira aussi, via des pipelines, un pont terrestre vers la Chine permettant d’éviter le détroit. Le hub de Dawei non seulement reliera le pays à la Chine mais aussi à la Thaïlande, au Cambodge et au Vietnam. Déjà, la Birmanie fournit à la Thaïlande près de 25% de son gaz naturel ; or, le gaz naturel couvre 70% des besoins énergétiques de la Thaïlande.
Au-delà de Dawei, il existe d’autres ports qui font ou feront peau neuve. Les Chinois sont en train de construire deux pipelines de 800 kilomètres de long qui transporteront le gaz et le pétrole du port de Kyaukphyu sur la côte occidentale de la Birmanie jusqu’à Ruili dans la province chinoise du Yunnan. Une perfusion directe de pétrole dans les veines du commerce chinois.
L’importance de la Birmanie en Asie en tant que nouveau hub de transport et fournisseur de pétrole et de gaz est une raison supplémentaire pour laquelle le pays attire tant l’attention. Dans le cas présent, la géographie fait le destin.