Je vous propose de faire un petit point sur l’aluminium. Son cours a perdu plus de 40% depuis son point haut en juillet et les choses bougent à toute vitesse dans le secteur qui opère un virage à 90° ! Hausse des stocks, effondrement de la demande, fermetures d’usines… un état des lieux s’impose.
1. La demande d’aluminium s’effondre
Pourquoi la demande d’aluminium faiblit-elle ? Tout simplement parce que l’économie est en berne. Une activité qui ralentit est une activité qui consomme moins. L’économie est en train de tomber lentement mais sûrement en récession. Alors forcément, l’industrie broie du noir.
L’industrie broie du noir
Aux Etats-Unis, l’activité industrielle touche un plus bas depuis 1982. Elle est confrontée à un recul violent de la consommation intérieure et externe (exportations).
Même constat dans la Zone euro, où la production industrielle recule de 1,6% en septembre. C’est surtout l’Allemagne qui souffre de la baisse de la demande mondiale. Elle affiche une baisse de 3,6% de sa production industrielle ce mois-ci, contre une hausse de 3,2% encore en août ! La production industrielle de biens durables a chuté de plus de 7% ! Et pour couronner le tout, les commandes à l’industrie ont baissé de 8%…
Côté Chine, grand atelier mondial, le tableau n’est pas plus réjouissant. La production industrielle chinoise n’en finit plus de décélérer. Elle atteignait des taux de croissance de 16% sur les premiers trimestres de l’année. Elle n’affiche plus qu’un petit 8% sur octobre. Le ralentissement est net et s’accélère…
Au placard la théorie du découplage. Quand les Occidentaux ne consomment plus, la Chine est au chômage technique !
La construction et l’immobilier au plus mal
Et je ne parle même pas du BTP, de la construction et de l’immobilier ! Ces secteurs (avec l’industrie) absorbent habituellement une grande partie de la production d’aluminium. Or ces secteurs sont en crise, des Etats-Unis à Shanghai, en passant par Dubai, l’Espagne, l’Angleterre et maintenant la France ! Le krach immobilier est à l’oeuvre, les prix chutent, les chantiers sont arrêtés, les investissements reportés…
Les secteurs consommateurs d’aluminium sont au plus mal et la demande chinoise s’est effondrée. Voilà pourquoi l’aluminium souffre…
2. La production d’aluminium a explosé
Vous le savez, le marché des métaux fonctionne avec des cycles relativement longs. Face à la demande exubérante d’aluminium ces dernières années et devant le manque chronique d’aluminium, d’énormes investissements ont été réalisés pour accroître les capacités de production, en Chine et au Moyen-Orient notamment. Egalement en Russie.
Au Moyen-Orient, des milliards ont été investis. Les fonderies d’aluminium ultramodernes et gigantesques ont été installées directement sur les puits de pétrole ! En effet, je vous rappelle que rien n’est plus énergivore que la production d’aluminium ! Comme l’énergie est de très loin le premier poste de coûts, ces producteurs ont un avantage compétitif majeur sur leurs concurrents.
Il faut dire que les perspectives étaient intéressantes
Jusqu’à il y a quelques mois encore, on s’attendait à un doublement de la demande d’aluminium jusqu’en 2020.
Ajoutez à cela l’envolée des prix de l’aluminium en 2007-2008 qui a attiré les capitaux et aiguisé les appétits. Le prix moyen de l’aluminium se situant à 1 700 $ la tonne sur le long terme, forcément, quand il franchit successivement les 2 000 $ puis 3 000 $, les capitaux sont attirés comme des aimants ! C’est le fondement même de notre système capitaliste : la recherche du profit !
Mais la crise des subprime est passée par là…
Elle nous a laissé un cadeau empoisonné dont nous commençons à peine à goûter l’amertume : la crise économique. Du coup, toutes les belles perspectives sur lesquelles étaient basés de beaux business models s’envolent. Temporairement du moins, j’insiste sur ce point.
Effet de ciseau meurtrier
Je résume : nous assistons donc depuis quelques mois à une hausse importante de la production. Or celle-ci arrive juste au moment où la consommation tombe soudainement en panne sèche.
Il y a quelques mois, on avait terriblement besoin de cette production qui n’arrivait pas. Aujourd’hui, alors que nous n’en avons plus besoin, elle arrive massivement. Forcément, le marché implose !
Voilà un véritable cas d’école : bel effet de ciseau !
Demain, nous verrons quelles sont les conséquences de cette situation sur le marché de l’aluminium et sur son prix, et nous essayerons de faire un point sur les perspectives de ce marché.
Meilleures salutations,
Isabelle Mouilleseaux
Pour la Chronique Agora
(*) Isabelle Mouilleseaux rédige chaque jour l’Edito Matières Premières & Devises (Publications Agora), une lettre internet gratuite consacrée au marché des matières premières. Passionnée depuis toujours par la Bourse et par tous les marchés financiers, Isabelle s’est spécialisée dans les matières premières et veut permettre à l’investisseur particulier de découvrir et de comprendre l’investissement sur ce marché des matières premières.
L’Edito Matières Premières & Devises est bien plus qu’une chronique quotidienne. C’est un pôle d’activités centré sur les matières premières qui vous donne les moyens de suivre et de maîtriser ces marchés ! Vous pouvez recevoir gratuitement l’Edito Matières Premières & Devises en cliquant ici.
