** Les gens sont en train de découvrir que le boom n’était qu’une illusion. La majorité des gains sur l’immobilier américain pendant les 10 dernières années n’était en fait que des sommes astronomiques résultant de l’inflation et dont la fonction était de financer le boom hypothécaire qui a lui même entraîné une bulle des prix. Aujourd’hui, la valeur des actifs dégringole. La valeur nette des ménages chute elle aussi.
– Selon des données publiées jeudi dernier par la Réserve fédérale américaine, la valeur nette totale des foyers a chuté de 1 300 milliards de dollars au premier trimestre de cette année ; elle est passée de 51 700 milliards de dollars à 50 400 milliards. Le plus effrayant, c’est que la chute du premier trimestre était en réalité un progrès par rapport au chiffre du quatrième trimestre de l’année dernière, au cours duquel la valeur nette a chuté de 4 900 milliards de dollars lors de l’effondrement de la bourse. Même si ce sont seulement les chiffres des Etats-Unis, nous pensons qu’ils illustrent une situation qui touche la plupart des pays occidentaux : le cycle du crédit nous a laissés pauvres en actifs et riches de dettes.
– Prenons 2002 comme point de départ. C’est un peu arbitraire. Mais c’était juste après la longue hausse des Bourses et au début du marché haussier des matières premières.
– Les taux d’intérêts avaient été baissés dans le monde entier à la suite des attentats du 11 septembre. Et le boom de la dette qui a entraîné, parmi d’autres choses, le boom des prêts hypothécaires aux Etats-Unis, était en route. Le boom des prêts hypothécaires aux Etats-Unis était, bien évidemment à l’origine de tous les actifs titrisés et adossés à des créances hypothécaires qui ont mis le système financier mondial à genoux.
– En 2002, la dette totale des foyers américains était de 8 500 milliards de dollars "seulement". 6 000 milliards en dettes hypothécaires, et 2 000 milliards en dettes sur cartes de crédit. Sur chacune des années qui ont suivi, les foyers américains ont fait grimper leur dette jusqu’à la dizaine de milliards de dollars. En 2007, la dette totale des foyers avait atteint les 12 900 milliards de dollars, dont 10 500 milliards en dettes hypothécaires et 2 400 milliards en dettes sur cartes de crédit.
** Si l’on fait le compte, la dette hypothécaire a augmenté de 75% en cinq ans et la dette sur cartes de crédit a augmenté de 20%. Au total, la dette des foyers a augmenté de 51% en cinq ans — elle est passée de 8 500 milliards de dollars à 12 900 milliards. Et qu’est ce que l’économie avait à montrer en échange de cette dette ?
– Et bien, sûrement pas autant que les gens l’espéraient. Mais en 2007, cela semblait être une bonne affaire. L’augmentation de 51% de la dette était dépassée par une augmentation de 54% de la valeur nette des foyers (de 40 400 milliards de dollars en 2002 à 62 500 milliards de dollars en 2007). A priori, pas de quoi s’enthousiasmer. Mais peut-on vraiment mettre un prix sur le regain de confiance en soi et le sentiment de s’en être sorti ?
– Depuis le pic de 2007 et depuis le début de la crise du crédit, la valeur nette des foyers américains a chuté de 12 200 milliards de dollars, ou 20%. La mauvaise nouvelle, c’est que la deuxième vague de saisies sur les prêts hypothécaires à taux variables de type Alt-A et ARM signifie certainement des prix encore plus bas dans l’immobilier américain, et une chute encore plus grave de la valeur nette.
– Nous ne récitons pas cette litanie de mauvaises nouvelles uniquement pour vous plonger dans la déprime. Mais c’est simplement que l’on ne l’entend pas beaucoup dans les médias financiers et de la bouche des politiciens professionnels : le modèle économique qui consiste à amasser les dettes pour acheter des actifs ne rend pas les gens plus riches. Les actifs perdent irrémédiablement de la valeur quand le crédit cesse d’affluer, et la dette demeure.
– Voilà où nous en sommes aujourd’hui. Et c’est la raison pour laquelle nous pensons que l’inflation pointe de plus en plus sûrement son nez à l’horizon. C’est probablement le seul chemin pour sortir de la dette, en dehors de la solution qui consisterait à la rembourser et à augmenter l’épargne.