▪ Hier, nous étions en route pour Sea Island, en Georgie. De l’autre côté du pont, nous apercevions une autre île — Jekyll Island. C’est là que le monstre a été créé…
Un groupe des banquiers américains les plus riches, les plus importants et les plus puissants s’y sont réunis — en secret — en novembre 1910. Ils se disaient qu’il était temps de mettre en place quelque chose qui leur permettrait de gagner de l’argent un peu plus facilement. Au lieu de se faire une concurrence frontale, sans filet de sécurité pour les protéger quand les choses tournaient au vinaigre, ils décidèrent de mettre en place une banque centrale.
La réunion était enveloppée d’un tel mystère que peu de gens croient qu’elle a eu lieu. Bizarrement, le poète Ezra Pound a été le premier à la raconter. Comment en a-t-il entendu parler… et pourquoi l’a-t-il rapportée… nous n’en savons rien. Mais c’est ce qui se dit.
B.C. Forbes nous en a fait un récit en 1916 :
« Imaginez un groupe des plus grands banquiers de la nation se faufilant hors de New York dans un wagon ferroviaire privé, en pleine nuit, parcourant discrètement des centaines de kilomètres vers le sud, embarquant sur un vaisseau mystérieux, abordant une île désertée de tous à part quelques domestiques, vivant là pendant une semaine entière dans un secret si strict qu’aucun de leurs noms n’a été mentionné une seule fois, de peur que les serviteurs n’apprennent leur identité et ne révèlent au monde cette expédition — la plus étrange et la plus secrète de l’histoire de la finance américaine. Je n’invente rien ; je révèle, pour la première fois, la véritable histoire de la manière dont le fameux rapport monétaire Aldrich, la fondation de notre nouveau système de devise, a été écrit… La plus stricte discrétion a été exigée de tous. Le public ne devait absolument pas soupçonner ce qui allait être fait. Le sénateur Aldrich enjoignit à chacun de se rendre discrètement dans un wagon privé, que les chemins de fer avaient reçu l’ordre de mettre sur un quai peu fréquenté. L’attention incessante des reporters new-yorkais avait été déjouée… Nelson (Aldrich) avait confié à Henry, Frank, Paul et Piatt qu’il les garderait prisonniers de Jekyll Island, en dehors du reste du monde, jusqu’à ce qu’il aient élaboré et compilé un système monétaire scientifique pour les Etats-Unis, la véritable naissance du système actuel de Réserve fédérale, le plan fait sur Jekyll Island durant la conférence avec Paul, Frank et Henry »…
A présent, cette réunion est passée dans le domaine public. Ben Bernanke s’y est rendu pour y donner un discours en 2010, marquant le centième anniversaire de la réunion.
▪ A quoi sert la Fed ?
La Fed était censée avoir pour rôle — à part graisser les rouages pour les riches banquiers — de protéger la valeur du dollar. Pourquoi ce dernier avait-il besoin de protection ? Voilà qui n’a jamais été expliqué. Au cours des 100 années précédentes, il avait été relativement solide — sauf pendant la guerre de Sécession, durant laquelle Lincoln en imprima bien trop pour payer son attaque contre le sud. Mais les dollars papier de Lincoln repartirent aussi vite qu’ils étaient arrivés. Le jour où la Fed fut officiellement mise en place, en 1913, le dollar valait à peu près autant que lorsque Napoléon Bonaparte s’est lancé dans la campagne de Russie.
Peu importe ce que la Fed ait été censée faire — ce qu’elle n’a pas fait, c’est protéger le billet vert. Il a au contraire glissé et dégringolé tout au long du XXe siècle, et ne vaut à présent que trois cents environ.
Ce n’est pas garanti, mais nous avons le sentiment que le dollar va continuer à perdre du terrain. Peut-être pas tout de suite… mais tôt ou tard.
Il y a un temps pour emprunter, et il y a un temps pour prêter. Tant que la Grande Correction se poursuit (et nous pensons que ce sera le cas pendant encore quelques années… peut-être 10), les taux d’intérêt tendront à baisser, plutôt qu’à grimper. C’est la leçon du Japon, où les obligations sont le seul investissement valant la peine d’être mentionnée depuis 22 ans.
Mais grâce à cette réunion clandestine sur Jekyll Island il y a 102 ans de ça, les Etats-Unis ne resteront probablement pas éternellement dans une ornière à la japonaise. Ben Bernanke l’a promis. Il a « une petite technologie » appelée la planche à billets. Et il sait s’en servir !
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Cette réunion secrète, à la suite de celles de Bâles qui ont permis de rédiger le Protocole des Sages de Sion, a créé le Monstre (Cartel bancaire) cité par John Steinbeck au début de son roman « Les raisins de la colère » que je suis, par un heureux hasard, en train de relire : « Quand le Monstre s’arrête de grossir, il meurt »