▪ Enfin un peu d’action sur les marchés ! En fin de semaine dernière, les places boursières ont perdu du terrain, tandis que l’or chutait de plus de 50 $ et que le pétrole passait sous les 100 $.
S’agit-il de la vague de baisse que nous attendions ? Peut-être
Pourquoi attendons-nous une vague de baisse ? Parce que nous sommes toujours dans une Grande Correction. Lors d’une correction, les prix baissent généralement. La tendance sous-jacente, c’est la déflation, pas l’inflation. Les dettes sont dévaluées… elles ne sont pas remboursées… et elles finissent par passer en pertes et profits.
Selon nos calculs, le début de la correction a en fait eu lieu il y a plus de 10 ans, quand le Nasdaq s’est effondré en janvier 2000. Depuis, l’économie et les marchés américains ne vont nulle part en termes réels.
Qui s’en est aperçu ? Les autorités ont injecté tant de liquidités — en commençant en 2002, puis avec une gigantesque inondation en 2008-2009 — que tout a été submergé.
Les ordures sont remontées à la surface, mais les ménages ont coulé ; ils étaient enchaînés à des revenus en baisse, tandis que le coût de la vie montait avec la marée.
Lesdits coûts continuent de grimper. La semaine dernière, nous avons entendu à la radio tout le mal que le carburant à 4 $ le gallon avait causé aux classes moyennes et basses des Etats-Unis. Les gens vivent avec des budgets serrés. Si le coût de leur carburant grimpe de 20 $ par semaine… ils en souffrent.
Dans le Wall Street Journal :
« Les prix à la consommation dans les économies développées ont grimpé en mars à leur rythme le plus rapide depuis octobre 2008, nourris par l’inflation de l’énergie et des denrées alimentaires ».
Quelques articles du Financial Times se concentrent sur la réaction des ménages américains. Selon le journal, les consommateurs ne vont plus aussi souvent dans les centres commerciaux.
« Les achats en ligne grimpent aux Etats-Unis à mesure que le coût du carburant freine les voyages dans les centres commerciaux ».
Nous n’avons pas encore entendu parler des centres commerciaux… mais on dit que les ventes en ligne grimpent au rythme de 7%
Parallèlement, « les Américains se débarrassent de leurs télévisions, un geste destiné à économiser », dit un autre titre.
« Les classes moyennes et basses abandonnent leurs télévisions et débranchent leurs téléphones filaires », commence l’article.
Eh bien, voilà une bonne nouvelle ! La télévision a probablement fait bien plus de dommages que les drogues et l’alcool. Et elle a certainement causé bien plus de dégâts que le terrorisme. Pourtant, les autorités américaines ont dépensé 2 000 milliards de dollars pour lutter contre le terrorisme (selon un autre article encore du Financial Times). Combien ont-elles dépensé pour lutter contre la télévision ?
▪ Mais réfléchissons un peu plus à ce qui arrive aux investisseurs.
Si nous sommes dans une Grande Correction…
… et si la liquidité fournie par les autorités est la seule chose qui empêche la correction de plomber les prix…
… on pourrait alors s’attendre à ce que les prix baissent dès que les autorités relâchent leurs efforts, non ?
Eh bien, préparez-vous. Lorsque les autorités cessent d’injecter des liquidités, la correction se réinstalle. C’est ce qui s’est passé l’été dernier. Le QE1 s’est asséché. Les actions ont chuté tout l’été… menant Ben Bernanke à annoncer le QE2 en août.
Que se passe-t-il maintenant ? Le marché anticipe-t-il la fin d’une autre opération d’assouplissement quantitatif ? Les prix vont-ils baisser jusqu’à ce qu’on annonce un nouveau QE ?
Nous verrons bien…
________________________
La Fed s’achète un marché haussier
« Avez-vous vu les données économiques de ces derniers jours ? » Voilà la question que m’a posée par e-mail un lecteur stupéfait. « Peut-on parler de ‘crise’ ? Cela semble incroyable ».
« Le chômage [américain] a atteint un plus haut de huit mois », continue mon lecteur. « En moyenne mensuelle glissante, il est à son plus haut depuis six mois. Les prix des logements ont à présent officiellement ‘connu un double plongeon’ pour être aujourd’hui en dessous du plus bas de mars 2009… et plus d’un tiers du marché sont en REO — real estate owned, système de propriété par les banques — résultat de saisies passées ».
« Et pour la bonne bouche », conclut le lecteur, « le Financial Times nous informe que le Mexique a acheté cent tonnes d’or au premier trimestre. Le Mexique ! Pouvez-vous imaginer un monde dans lequel le pays du peso ne veut pas posséder de dollars !! Je ne trouve plus mes mots car le terme ‘incroyable’ semble bien fade à présent ».
Nous aussi ne trouvons pas les mots… Mais cela ne nous empêchera jamais d’en écrire des milliers chaque jour dans cette chronique.
Ce que mon lecteur appelle incroyable est en fait assez croyable… à condition de chausser des lunettes qui font voir le monde à l’envers. Avec ces lunettes sur le nez, n’importe quel imbécile peut clairement voir que le meilleur moyen d’atteindre la prospérité économique est de dépenser plus que ce qu’on économise, d’emprunter plus qu’on ne produit et d’imprimer de l’argent que personne n’a gagné. Il n’y a rien d’incroyable à cela. Mais surtout il ne faut pas enlever ses lunettes !
Si on le fait, on pourrait commencer à voir des choses que les vilains sceptiques et les indécrottables pessimistes voient… et on pourrait se mettre à douter qu’un pays puisse s’appauvrir vers la prospérité.
En outre, on pourrait commencer à relier des faits inopportuns… comme la hausse des prix des biens et des services, en conjonction avec la valeur du dollar en chute libre. Ou comme les déficits annuels de mille milliards de dollars, identiques aux élus qui s’efforcent de faire des entailles de 80 milliards dans ces déficits.
Si on aime les graphiques — et qu’on ne porte pas ces lunettes — on pourrait déduire un lien entre le bilan de la Fed en rapide expansion et le rally du marché boursier de ces deux dernières années. Le graphique ci-dessous laisse entendre un lien entre l’impression de monnaie par la Fed et la hausse massive du cours des actions.
Ces 10 dernières années, la Fed a maintenu les actifs de son bilan de près de 650 milliards de dollars à 850 milliards de dollars. Mais peu après la crise du crédit, l’équipe de Ben Bernanke a fait marcher à fond la planche à billets et s’est mise à déverser des dollars dans le système bancaire via plusieurs mécanismes — le plus notoire étant « l’assouplissement quantitatif ».
▪ A présent, vous connaissez l’histoire. Voici son déroulement :
1) Dire au public qu’il y a une crise que seule la Fed peut résoudre ;
2) Dire au public que le remède de la Fed est d’imprimer des dollars et acheter des titres du Trésor.
3) Dire au public que ce procédé de contrefaçon est « mesuré » et « économiquement sûr ».
4) Commencer à imprimer de l’argent et acheter des titres du Trésor.
5) Acheter tant de titres du Trésor que vous absorbez 100% de la nouvelle émission d’emprunt du Trésor.
6) Continuer à dire au public à quel point cet assouplissement quantitatif est génial même si le dollar plonge, que les prix des matières premières explosent et que l’activité économique est moribonde.
Sans les lunettes, le programme d’assouplissement quantitatif de Bernanke semble être un énorme échec, à la limite de la catastrophe. Mais au moins le marché est-il beaucoup plus haut… pour l’instant.
________________________
Après le krach des matières premières, qui sera la prochaine victime ?
Philippe Béchade
▪ Après le mini-krach des matières premières survenu jeudi, beaucoup d’opérateurs redoutaient un phénomène de contagion — certains hedge funds s’étant faits « déchirer » sur le pétrole ou l’argent-métal pouvaient être amenés à dégager du cash en soldant des positions sur le compartiment actions.
Peut-être ont-ils d’abord cherché à se refinancer auprès des banques partenaires, avant de procéder à des ventes susceptibles de déclencher une réaction en chaîne. Toujours est-il que sur 48 heures, les indices boursiers n’ont carrément pas bronché !
Malgré une demi-séance de suspense, le CAC 40 n’a pas enfoncé les 4 010 points (risque de rechute sur 3 880 points). Le support a été seulement perforé de façon très ponctuelle.
Faute de valider une chaude alerte à la baisse, il s’est ensuivi un rebond de 50 points en une demi-heure (pratiquement sans transaction) en direction des 4 060 points. Puis l’indice s’est mis soudainement à stagner, et ce durant plus de deux heures, entre 4 052 et 4 062 points. Il s’est comporté comme s’il était emprisonné par les algorithmes — c’est bien évidemment le cas, ne soyons pas naïfs !
Même les plus sceptiques admettent que tout se passe comme si les robots de trading étaient programmés pour propulser les indices vers un objectif très précis. Une fois ce dernier atteint, c’est comme si les robots employaient à éradiquer la volatilité (les exemples abondent depuis avril 2009).
L’indice terminait la semaine un peu en-deçà de son zénith des 4 068 points du 8 avril dernier (ou de janvier et avril 2010), mais les oscillateurs hebdomadaires restent négatifs.
▪ Il est assez troublant d’observer à quel point la phase haussière de mi-mai 2010 à mi-février 2011 présente des similitudes (vague pour vague) avec celle de la mi-mars 2009 à mi-janvier 2010. C’est pratiquement du « copier/coller ».
C’est comme si les scénarios étaient littéralement pré-programmés afin de se répéter à l’identique. Les mêmes points de résistance ont été testés à quatre reprises. Tout se passe en totale déconnexion par rapport aux fondamentaux et même par rapport aux fluctuations majeures des devises et des matières premières (hausse inexorable sur fond de pressions inflationnistes).
Le CAC 40 n’a pas validé de signal baissier cette semaine ; il demeure donc en mesure de retenter l’aventure en direction des 4 150 points.
C’est exactement ce que les permabulls (haussiers systématiques) anticipent, quelle que soit l’évolution du dollar et du pétrole. Les indices boursiers resteraient totalement déconnectés de la sphère du réel tant que la fausse monnaie de la Fed continue d’alimenter leur progression.
▪ Wall Street semblait pourtant devenir instable à la veille du week-end. Contrairement aux places européennes qui n’avaient strictement rien lâché par rapport à leurs sommets du milieu de l’après-midi, les indices américains effaçaient en une heure près de deux tiers de leurs gains initiaux.
Le Dow Jones est revenu de +1,4% vers +0,5%, le Nasdaq de +1,6% vers +0,75% et le S&P de +1,45% vers +0,5%.
▪ La cause du pic d’euphorie du début de l’après-midi est évidente pour tous les opérateurs. L’économie américaine a créé bien plus d’emplois que prévu, à la lecture des derniers chiffres hebdomadaires.
Le département du Travail US recense 244 000 nouveaux emplois au lieu de 190 000 anticipés. Mais le total a été opportunément gonflé par les 65 000 embauches réalisées par McDonald’s en début de mois. On ne peut pas dire qu’il s’agisse là d’emplois pérennes…
La véritable bonne surprise provient de la révision à la hausse du chiffre de février (+46 000), et plus modestement de celui du mois de mars (+5 000).
Il fallait bien un prétexte pour justifier des rachats à bon compte après trois séances de consolidation. Au-delà du contrepied à la hausse, voici une nouvelle illustration du phénomène de disparition des acheteurs quand le marché baisse et des vendeurs quand les indices montent.
▪ Les actions ont largement échappé à la contagion des marchés de matières premières qui ont subi un véritable mini-krach jeudi, voire un krach tout court. En effet, sur la semaine écoulée, le baril de pétrole a perdu 12% en moins de 24 heures (94,5 $ au plus bas vendredi matin et 99,55 $ le soir, encore plus 6% de volatilité intraday). L’once d’argent a fait le grand plongeon (-30%) entre 49,5 $ lundi et 34,3 $ jeudi soir sur le CME (36 $ ce vendredi).
La rechute du WTI au contact des 100 $ (soit -13% sur la semaine, après un trou d’air jusqu’à -16% en matinée) éloigne le spectre du gallon d’essence à 5 $ aux Etats-Unis d’ici la driving season. Rappelons que le récent franchissement du cap des 4 $ a constitué pour les économistes une sérieuse alerte concernant le pouvoir d’achat des ménages.
Le dollar continuait de grimper au-delà de 1,44/euro vendredi soir sur des rumeurs de sortie volontaire de la Grèce de la Zone euro propagées par des sites d’information économiques allemands. Cela fait longtemps que ce serpent de mer émerge épisodiquement des flots –surtout quand l’euro apparaît trop cher contre le dollar.
Mais les arbitrages systématiques en faveur de Francfort et des Bunds allemands depuis 18 mois nous conduisent à accorder une probabilité de 50% à ce scénario, ce qui revient en fait à le valider. Gare à la secousse, car personne dans ce cas ne voudrait prendre le risque de rester acheteur sur les marchés, compte tenu de l’onde de choc pouvant se propager à l’ensemble du compartiment actions par le biais des valeurs bancaires créancières d’Athènes.
________________________
Pétrole : misez sur notre « havre de paix », loin des troubles du Moyen-Orient
Jean-Claude Périvier
▪ Vous avez remarqué comme l’information est cyclique ? Chaque année, nous pouvons être sûrs que nous connaîtrons :
1. Un mariage princier (deux pour le prix d’un cette année) ;
2. Une guerre déclenchée par les Etats-Unis ;
3. Un accident naturel ou politique qui enflammera le prix du baril.
C’est ce dernier point que je voudrais aborder avec vous. Que ce soit les vitupérations nauséabondes du président iranien, un accident sur une plate-forme, ou un cyclone dans le golfe du Mexique, vous pouvez être sûr que le pétrole connaîtra au moins un accès de fièvre dans l’année.
Pourtant, nous devrions être capables de profiter de la hausse des cours sans serrer les dents chaque année. Et pour ça, j’ai trouvé la solution. Je vous propose une « assurance » sur le pétrole.
Investir dans un producteur pétrolier en bonne santé, qui opère dans un pays stable, à proximité des lieux de consommation, ça existe. Ces quelques lignes vous indiqueront où se trouve ce havre de paix.
▪ La menace se précise dans le Golfe
Aujourd’hui, le secteur pétrolier ne craint même plus les fameux « regains de tensions » dans la région, il vit carrément dans la peur. Cette peur à un nom : l’Iran.
Téhéran fait régulièrement naviguer ses bâtiments militaires autour du détroit d’Ormuz. Or ce détroit est considéré comme le nouveau canal de Suez du XXIe siècle. La moitié du pétrole de l’Arabie Saoudite y transite. Couper cette artère signifierait l’asphyxie du seul moteur économique encore en marche actuellement, la Chine.
On assiste par conséquent à une sur-militarisation de la région depuis quelques années. Pays du Golfe, Iran, Etats-Unis, France, Inde, Chine, toutes les grandes nations affichent ostensiblement la modernité de leurs équipements militaires dernier cri. Rien de bien rassurant pour les prix du pétrole…
▪ Le grand saut dans l’inconnu des révoltes arabes
Au cycle annuel des crises du Moyen-Orient, on peut rajouter désormais le cycle mensuel.
Nous entrons dans le cinquième mois de crise dans le monde arabe. Les termes d' »enlisement », de « révolutions sanglantes », de « monarchie déstabilisée » apparaissent de plus en plus…
Ces révoltes étaient un vent frais au mois de janvier. Elles m’apparaissent désormais de plus en plus comme un grand saut dans l’inconnu.
▪ Les cyclones menacent constamment la production américaine
Dans le golfe du Mexique, la production pétrolière pourrait être ralentie dans les années à venir. Les centaines de plates-formes pétrolières qui opèrent au large des côtes américaines vivent désormais sous le coup d’une double menace :
– les ouragans et les cyclones. La fréquence de ces phénomènes est de plus en plus rapprochée. Pour mémoire, le cyclone Katrina avait amené à l’arrêt total des exploitations. Certaines plates-formes avaient même été emportées par l’ouragan, et projetées sur des villes de la côte ;
– l’effet Deepwater Horizon. Les nouvelles règles de sécurité imposées par le gouvernement américain renchérissent le coût d’exploitation. Les marges des opérateurs se sont considérablement réduites depuis un an.
▪ Un pays de cocagne parmi les pays les plus développés
Je vous propose d’investir dans un pays qui a su conjuguer deux caractéristiques réputées inconciliables : une production abondante de pétrole et une démocratie apaisée. Ce pays est si calme que je défie quiconque de me citer le nom du Premier ministre. Démocratie solide, infrastructure développée, relatif suivisme dans les affaires du monde, on a trouvé notre perle rare : le Canada !
▪ Une production bientôt indispensable
Le Canada est en passe de devenir un producteur majeur de pétrole. Le pays possède les deuxièmes réserves de pétrole au monde, soit 170 milliards de barils. Cette richesse, il la doit aux fameux « sables bitumineux ».
Dans un contexte de raréfaction de nouveaux gisements géants de pétrole, les ressources canadiennes seront bientôt indispensables à l’économie internationale.
▪ Profitez désormais des sursauts du pétrole
Investir dans les sables bitumineux, c’est acheter une assurance contre la poudrière du Moyen-Orient. A chaque soubresaut dans le Golfe, les sociétés installées au Canada profiteront de l’augmentation des prix sans avoir à bouger le petit doigt. Des sociétés comme le Canadien Suncor sont idéalement placées pour profiter oisivement de la hausse du baril.
Restez attentif aux perturbations dans le monde arabes, et protégez-vous en conséquence !
[Jean-Claude Périvier est notre spécialiste de la géopolitique ainsi que des investissements géostratégiques. En tant qu’entrepreneur il a appris que pour réussir il faut être visionnaire : identifier les méga-tendances de demain et y investir avant que le monde entier ne s’aperçoive de tout leur potentiel. C’est avec cette approche qu’il rédige chaque mois la lettre d’investissement Défis & Profits.]
Première parution dans l’Edito Matières Premières & Devises du 04/05/2011.