Le monde change, et ce qui semblait paradoxal il y a quelques années est désormais normal : il va falloir s’adapter…
Ceci est une sorte de petit cours, de petit enseignement pour la survie.
Le sens général de cet enseignement est transposable à beaucoup de situations et beaucoup de domaines : pour survivre, il faudra que vous vous adaptiez. Que vous vous adaptiez au vrai monde, pas au monde faux, carton-pâte, décor de théâtre qu’ils ont dressé pour vous.
Retour au réel
Nous sommes dans une colossale défaillance de la parole, du discours, de l’intelligence des maîtres.
Ceci n’est pas un article boursier.
Il aurait été très difficile, il y a un an, de prévoir que chaque catégorie d’actifs pouvait performer en même temps. Ce fut le cas en 2019 où les actions, les obligations, les fonds d’Etat, les matières premières, l’or – tout a monté en même temps.
Celui qui voit les marchés au travers du paradigme risk-on/risk-off a bien du mal à expliquer ce qui se passe depuis quelque temps.
Je lis de plus en plus souvent des commentateurs qui soutiennent qu’il est impossible que tout marche en même temps. Ils disent qu’il y a forcément un marché qui se trompe : soit celui du risk-on, soit celui du risk-off.
Dans la pensée classique, historique, c’est vrai : soit on performe sur les obligations, soit on performe sur les actions – et c’est pour cela que la répartition équilibrée/diversifiée des patrimoines est 60% actions, 30% obligations, 10% liquidités. On ne perd pas sur tout en même temps !
Les contorsions doivent être de plus en plus compliquées pour trouver des explications crédibles.
Et en même temps…
En ce moment encore, la forte baisse des rendements des valeurs du Trésor US, véhicule typiquement risk-off, cadre mal avec la performance des actions et les spreads obligataires qui, eux, sont rigoureusement risk-on. On est à la fois frileux, prudent et en même temps audacieux, intrépide et joueur.
Pour parler comme les stratèges, on joue à la fois la déflation et la reflation. L’accélération et le ralentissement.
Ces contradictions apparentes ne nous gênent pas, car nous avons un cadre et une méthode de pensée dialectiques, non mécaniques et non positifs ; c’est-à-dire que nous pensons les courants contradictoires, le mouvement.
Le mouvement, c’est la réalité qui dit qu’une chose est à la fois ce qu’elle est et son contraire. Ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas. Comme le dit Héraclite, nous ne nous baignons jamais deux fois dans le même fleuve.
Nous sommes capables de comprendre et d’expliquer que la communauté spéculative est diverse, qu’elle constate que les risques sont en train de s’accumuler dangereusement et qu’elle le joue en renforçant ses achats de véhicules de sécurité et de liquidité que sont les Treasuries US… et en même temps qu’elle se positionne sur les actions, les véhicules de jeu pour anticiper les nouvelles largesses monétaires, les liquidités qui se préparent à tomber du ciel, qui se préparent à être déversées.
Pas besoin de choisir
Tout cela est cohérent. On n’a pas à choisir puisque la mer de liquidités va faire s’élever tous les bateaux.
Tout comme il est normal face à la perspective d’un ralentissement des échanges mondiaux – regardez le Baltic Dry Index, qui mesure le transport maritime de vrac sec – de penser que l’argent va circuler moins vite, que les débiteurs en dollars vont avoir du mal à faire leurs échéances et qu’ils vont rechercher « le dollar » extérieur.
Et tout comme il est normal que le risque purement financier qui découle de la raréfaction du « dollar » provoque des achats sur l’or, qui est l’assurance contre les craquements monétaires.
En fait ce qu’il faut comprendre et que j’essaie de vous transmettre, c’est l’idée qu’à partir du moment où il y a pléthore colossale de liquidités – la Fed a injecté 400 Mds$ en quelques semaines et la PBOC 300 Mds$ en quelques jours – il y a de l’argent digital pour tout et son contraire.
A suivre…
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]