** La Fed est désormais en train de "monétiser" la dette américaine pour tenter de faire baisser les taux hypothécaires et entraver la baisse des cours des bons du Trésor américain. Par "monétiser", nous voulons dire qu’elle échange des billets fraîchement imprimés contre des bons du Trésor américain que possèdent d’autres investisseurs.
– La Fed espère que les liquidités vont ainsi pouvoir inonder les marchés du crédit en tant que nouveaux prêts et débloquer les choses. Peut-être bien que oui, peut-être bien que non. Mais il est évident que vous ne pouvez pas injecter quelques centaines de milliards de dollars dans la masse monétaire et espérer que le niveau général des prix ne va pas augmenter.
– En réalité, cette histoire se divise en deux parties. La première, c’est celle du destin du dollar américain et de ce qui va se passer dans le marché du Trésor. La seconde, c’est celle du marché immobilier américain. Occupons-nous d’abord du second.
– L’objectif réel du changement de politique de la Fed est de faire baisser les taux hypothécaires et orchestrer un boom du refinancement. Comment le savons-nous ? La Fed l’a dit.
– "Pour fournir un plus grand soutien aux marchés de l’immobilier et des prêts hypothécaires", peut-on lire dans la déclaration du FOMC (Comité de politique monétaire de la Fed), "le Comité a décidé jeudi d’allonger encore les engagements de la Réserve fédérale en achetant jusqu’à 750 milliards de dollars supplémentaires de titres adossés à des crédits hypothécaires, amenant ainsi le total d’achat de titres à 1,25 millier de milliards de dollars cette année."
– Difficile de voir comment le refinancement peut amener à une liquidation du stock toujours plus grand de maisons neuves et existantes. Mais peut-être que la Fed pense que des taux hypothécaires plus bas vont relancer l’achat de maisons neuves — ou au moins stabiliser la chute du prix de l’immobilier à travers le pays.
– Tout dépend de quel genre de titres adossés à des hypothèques la Fed achète. Est-ce qu’elle achète des nouveaux trucs vintage à Fannie et Freddie ? Ou bien est ce qu’elle trempe l’orteil dans les bassins toxiques, espérant établir un cours pour tout ça qui permettrait de clarifier la valeur des banques et des capitaux privés ?
** Parallèlement, la Fed a ajouté que, "pour améliorer les conditions sur les marchés privés du crédit, le Comité a décidé d’acheter jusqu’à 300 milliards de dollars de titres du Trésor à plus long terme au cours des six prochains mois".
– "J’ai le sentiment profond", écrit notre collègue américain Dan Amoss, "que la décision de jeudi a scellé le prochain gros mouvement de l’or, du pétrole et d’autres actifs tangibles (par gros mouvement, je veux dire une multiplication des prix actuels au cours des prochaines années). Il se peut que nous ayons assisté à la fin de la crainte de la déflation, ou nous en sommes du moins assez proches".
– "Qui a aujourd’hui les tripes de vendre à découvert le marchés des obligations américaines ? Je ne crois pas que Bernanke bluffe à propos de la monétisation du déficit cette fois-ci, contrairement au mois de décembre".
– "Les Chinois et les autres créditeurs vont donc certainement se contenter d’accélérer leurs mouvements dans le petit marché pour les biens concrets. Ils peuvent anticiper et voir la dévaluation imminente du dollar. Ils vont peut être répondre à l’offre de la Fed dans les marchés des obligations américaines et réinvestir les recettes dans quelque chose dont la valeur dure. Ils peuvent utiliser une grosse partie de leur portefeuille de T-Bonds sans que cela n’ait de conséquences de façon internationale sur le taux des T-Bonds. Alors pourquoi pas ?"
– "A plus long terme, on peut se demander comment les grands investisseurs obligataires institutionnels vont réagir, en sachant qu’ils investissent dans un marché beaucoup plus truqué (même si, depuis qu’ils sont tous Keynésiens — y compris Bill Gross –, ils aiment travailler dans des marchés truqués)".
– "Les manuels d’économie nous disent que les planchers de cours imposés par le gouvernement (dans ce cas précis, pour les bons du Trésor américain) entraînent un engorgement/surplus persistant. Cette action va donc encourager les escrocs du Congrès à émettre encore plus de bons du Trésor pour leurs projets".
– "[Les Etats-Unis sont] encore plus proches d’une république bananière depuis jeudi. La seule issue qui me vienne à l’esprit face à cette décision, c’est la chute accélérée de la valeur du dollar face à tout ce qui existe de concret".