Les dernières déclarations de la présidente de la Banque centrale européenne confirment une chose : elle ne sait pas ce qu’elle fait… et c’est dangereux aussi bien pour l’économie que pour votre épargne.
Je soutiens que les banquiers centraux sont plus dangereux que les gouvernements. Pire, ils aveuglent et neutralisent les gouvernements issus de la représentation populaire afin de servir les intérêts des ultra-riches et de la finance en général. Les banquiers centraux détruisent nos arrangements sociaux, nos économies et nos systèmes politiques.
Prenez ceci, publié par Bloomberg le 22 juillet :
« Christine Lagarde a expliqué que la Banque centrale européenne (BCE) a tiré les leçons des erreurs des crises passées et elle a promis qu’elle ne fera pas dérailler la reprise économique actuelle en retirant trop tôt les aides d’urgence.
La présidente de la BCE s’est exprimé jeudi alors que la banque centrale mettait en œuvre la nouvelle stratégie de politique monétaire qu’elle avait élaborée au cours des 18 derniers mois.
Elle a révisé ses orientations sur les taux d’intérêt, liant plus étroitement les changements de politique à son nouvel objectif d’inflation de 2%.
Elle a déclaré qu’il ne réagirait pas nécessairement immédiatement si la croissance des prix dépasse cet objectif pendant une période ‘transitoire’.
Les mesures renforcent les efforts de la BCE pour convaincre les marchés qu’elle maintiendra une politique ultra-accommodante […] aussi longtemps que nécessaire pour rétablir la stabilité des prix. »
J’ai abordé la question des politiques monétaires dans un récent article, que je vous invite vivement à relire.
Mais revenons-en aux déclarations de Christine Lagarde, dont voici l’essentiel :
« Les ménages et les entreprises ont contracté tant de dettes que tout ralentissement causé par l’impatience de la BCE à monter les taux et ralentir les achats d’actifs pourrait entraîner une instabilité financière. Tout ralentissement rapide peut menacer la situation financière de divers acteurs économiques. »
Un aveu qui en dit long
En disant cela, Lagarde confirme cyniquement ce que je ne cesse d’expliquer : la politique monétaire a bien cessé d’être à dominante monétaire. Son objectif a cessé d‘être la gestion saine de la monnaie, pour devenir le maintien des fausses valeurs de la sphère financière et du crédit.
On a choisi de sacrifier la monnaie et sa durée de vie à la finance.
Lagarde nous dit : il faut à tout prix empêcher la dévalorisation du crédit, il faut empêcher le pot aux roses de se découvrir. La masse de créances accumulées est insolvable, certes, et elle l’est de plus en plus, mais nous devons continuer de la noyer sous une mer de liquidités gratuites.
A la suite des déclarations de Lagarde, les taux en Europe ont encore baissé, ce qui signifie que l’incitation donnée aux agents économiques et aux gouvernements à s’endetter encore plus a été renforcée. Plus le crédit est bon marché, plus on s’endette c’est le B.A. BA de l’économie.
Notez bien, donc : d’un côté, on dit que l’excès de dettes empêche de régulariser les politiques monétaires sous peine de crise financière mais en même temps, de l’autre côté, on incite à accroître encore l’excès de dettes.
Incompétence
Lagarde n’y connaît rien à la monnaie, certes… mais tout de même. Personne ne peut se montrer aussi irresponsable : il y a des conseillers.
Donc si l’hypothèse de l’incompétence ne suffit pas pour expliquer que la BCE mène une politique en apparence suicidaire, c’est qu’il y a une autre explication.
La BCE s’enfonce dans une impasse qui conduit à la perte de contrôle de sa politique monétaire parce qu’elle sait que l’issue de l’épisode actuel ne sera pas linéaire, pas classique, cyclique.
Elle sait qu’un jour ou l’autre il va y avoir une rupture, un changement de règle du jeu. Un invariant va céder et quelque chose va se modifier profondément qui fera exploser les contradictions antérieures de la politique suivie.
A suivre…
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]