Les autorités se sont engagées dans une voie sans issue en matière de politique monétaire. Puisque l’accident est inévitable, elles ont donc décidé… d’appuyer sur le champignon. Qui vivra verra !
Toute la politique actuelle des autorités monétaires s’explique si vous avez la conviction que la voie suivie est une impasse et que, nécessairement, une rupture se produira qui changera la donne.
Fort de cette conviction, vous vous dites : autant aller jusqu’au bout du système actuel et tirer avantage de la situation présente. Elle a un coût considérable certes, mais il ne sera pas payé. Quelque chose va intervenir qui fait que nous ne supporterons pas le coût de cette politique.
Il y a aura discontinuité majeure, il y aura une nouvelle donne structurelle, le système va muter – ou mieux encore, la nature même de la monnaie va changer. Les dettes ne peuvent être remboursées ni roulées ; elles seront donc, par un processus ou un autre, détruites.
Dictature conjointe
Nos monnaies étant des monnaies de crédit et le crédit ayant été pourri, on passera à un système qui ne reposera plus sur la monnaie/dette.
On voit ce nouveau système se profiler. Il reposera sur la dictature conjointe des banques centrales associées aux gouvernements, le tout sous la tutelle et la supervision d’une sorte de « grand maître » international.
La monnaie cessera d’être un bien public, un bien commun dépendant du consensus des peuples. Elle deviendra ce que les fascistes de la TMM disent qu’elle est déjà : une monnaie d’Etat, une monnaie-registre, une monnaie serve avec fil à la patte personnalisé. Une monnaie dans laquelle l’obligation d’utilisation sera tracée et imposée par la force.
Du « coûte que coûte » au chaos
Le « coûte que coûte » de Mario Draghi est toujours en place mais il a changé de contenu. Le jusqu’au-boutisme quantitatif dérivable a été remplacé et le nouveau jusqu’au-boutisme se formule.
Les autorités iront jusqu’au bout de ce que le système actuel peut supporter. Par ailleurs, elles se préparent subrepticement, d’une part à limiter les dégâts quand le chaos va arriver, et d’autre part à mettre en place un nouveau système qui détruira les excès et même les traces du système antérieur tout en renforçant leur contrôle pour l’avenir.
Dans ces conditions, toute la logique s’inverse… et on le voit, plus cela va mal, plus les apparences sont souriantes :
Les rendements du Bund allemand ont terminé la semaine dernière à un plus bas de cinq mois négatif, à -0,42%. Les rendements italiens ont encore baissé de neuf points de base à 0,62%, et les rendements grecs de deux points de base à 0,65%.
Les rendements des bons du Trésor US à dix ans ont quant à eux terminé la semaine à 1,28%, malgré les preuves surabondantes des rapports trimestriels sur les bénéfices des entreprises qui pointent dans le sens d’une intensification des pressions inflationnistes et de nouvelles augmentations des prix.
Graves déformations
Le QE, l’excès de liquidité et les promesses que cela va durer qui y sont associées ont gravement déformé les marchés obligataires et boursiers mondiaux.
Tout est inversé : le Covid revient, les signes de reprise s’estompent, la stagflation se dessine à l’horizon.
La Fed et les banques centrales n’impriment pas d’argent, n’est-ce pas : elles gonflent les comptes et les ressources des banques, elles monétisent les dettes des gouvernements, ce n’est pas la même chose. On n’imprime pas d’argent, on joue sur les écritures comptables, on change les zéros dans les livres de comptes.
A suivre…
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]