L’un est très utilisé depuis 40 ans, tandis que l’autre a été abandonné. Les investisseurs pourraient cependant être forcés d’y revenir, si le premier termine dans un ravin.
Cette semaine, les investisseurs se sont une fois de plus retrouvés face à une bifurcation…
Sur le premier chemin, le plus fréquenté, les indices boursiers finissent toujours par rebondir et par atteindre de nouveaux sommets. C’est ce qu’ils ont fait après chaque correction depuis 1987. C’est cette année-là qu’Alan Greenspan a créé le fameux « put Greenspan », c’est-à-dire la quasi-garantie que la Fed volera au secours des marchés en cas de besoin.
Depuis – que ce soit en 2003, 2003, 2016 ou 2020 –, à chaque fois que les actions ont chuté, la Fed a abaissé ses taux d’intérêt, entraînant un rebond des indices boursiers dans la foulée.
Ce chemin est un sentier battu, très emprunté par les investisseurs qui aiment acheter sur des creux. Ils ont tous l’espoir que cette voie les mènera là où elle les a toujours menés par le passé : vers des profits financiers toujours plus importants.
Le sentier moins fréquenté
Mais, plusieurs excursions sur ce chemin depuis le début de l’année n’ont pas mené aux résultats escomptés. À chaque fois, après un bref rebond, les cours ont rechuté, laissant les acheteurs confrontés à des pertes encore plus importantes.
Impassibles, les investisseurs se sont positionnés de nouveau à l’achat début octobre. Jusqu’à vendredi dernier, il semblait que, cette fois, leur obstination finirait par porter ses fruits : les indices actions avaient ainsi gagné 17% depuis le mois d’octobre.
Mais, dès lundi, la situation s’est gâtée. Marketwatch sonnait l’alerte dans la journée :
« Les indices boursiers américains étaient en passe d’enregistrer leur baisse journalière la plus brutale depuis presque un mois, alors que le S&P 500 affichait un niveau inférieur aux 4 000 points.
Les statistiques économiques meilleures que prévu ont pesé sur les cours de Bourse, car les stratégistes boursiers pensent que cela pourrait inciter la Réserve fédérale à poursuivre ses hausses de taux de manière plus agressive. […]
Les trois indices [Dow Jones, S&P 500 et Nasdaq Composite] étaient partis pour signer leur pire performance journalière depuis le 9 novembre, d’après les données fournies par FactSet. »
À la clôture des marchés, les dégâts étaient moins graves. Mais de nombreux analystes pensaient que le rally avait pris fin. « Il est temps de prendre ses bénéfices », affirmait ainsi Michael Wilson de Morgan Stanley.
Mais il est trop tôt pour savoir si cela marque la fin du rebond des marchés. Au cas où, cependant, il convient d’analyser plus minutieusement la voie alternative.
La plupart des investisseurs ne savent même pas qu’elle existe. Pour eux, il n’y a qu’une seule voie à suivre, celle qu’ils ont toujours suivie. « Les cours finissent toujours par augmenter sur le long terme », s’exclament-ils. « Rejoignez le chemin et restez-y. »
Mais, si vous prenez la peine d’écarter les lianes et autres branches basses, vous constaterez qu’il existe un autre chemin, qui est resté le même qu’il y a 40 ans, lorsqu’il a été abandonné.
À la japonaise
En regardant de vieilles cartes, nous constatons que ce sentier était autrefois très fréquenté, et dans les deux sens. Les investisseurs s’y positionnaient à l’achat et à la vente… et les cours évoluaient à la hausse, puis à la baisse. Contrairement au chemin plus fréquenté, qui mène inexorablement vers de nouveaux sommets, l’autre sentier menait les investisseurs vers l’inconnu. Souvent, induits en erreur par l’inflation, les investisseurs ne savaient pas où ils se trouvaient même après y être arrivés.
Par exemple, la période de 16 ans entre 1966 et 1982 a été une période de collines abruptes. En fin de parcours, les investisseurs regardèrent autour d’eux et aperçurent un paysage familier. Ils étaient convaincus d’avoir tourné en rond et d’être revenus à leur point de départ. Mais ils se trompaient. L’inflation avait profondément distordu le décor. Après ajustement, ils avaient perdu de 70% à 90% de leur argent.
C’est ce qui caractérise ce second chemin : il est plein de virages inattendus, de lacets et de détours prêtant à confusion. Non seulement les investisseurs n’ont pas la garantie de gagner de l’argent, mais il y a de nombreux pièges et tentations susceptibles de leur faire perdre.
Par exemple, en 1982, tout le monde savait que la Fed allait mettre un terme à l’inflation et que les cours des obligations allaient augmenter (en corollaire de la baisse des taux d’intérêt). Mais les investisseurs s’étaient habitués à l’autre chemin – où les taux obligataires n’avaient cessé d’augmenter depuis les années 1940.
Ils refusaient de croire à un changement de direction aussi radical. Deux ans après le début de cette tendance baissière, les bons du Trésor américain à 10 ans, toujours considérés comme des « certificats de confiscation », s’échangeaient avec un taux d’intérêt de 14% (il s’est replié à 0,6% par la suite).
Au Japon, les investisseurs suivent ce chemin depuis 1990 et la fin du miracle économique japonais. Le gouvernement a fait tout ce qu’il a pu pour les décourager, y compris endetter le pays à un niveau sans précédent dans le monde. En vain. L’indice Nikkei dépassait les 38 000 points en décembre 1989. Au moment où j’écris ces lignes, il est proche des 27 000 points. Il a perdu près d’un tiers de sa valeur.
Quelle voie préférez-vous suivre ?
Cela n’a aucune importance. Vous n’avez pas le choix. Et peu importe si les Bourses évoluent à la hausse ou à la baisse à partir de maintenant. L’époque des gains faciles est révolue. Les investisseurs se lancent sur un autre chemin, plus accidenté et plein de virages imprévisibles.
Enfilez vos chaussures de randonnée et équipez-vous d’un spray anti-ours. Vous pourriez en avoir besoin.