▪ Les Chinois ont-ils fait le deuil des 14% croissance atteints en 2007 ?
Depuis ce sommet, il faut reconnaître que la croissance chinoise ne cesse de ralentir. Il était un peu naïf de croire que la Chine était immunisée par la crise de 2008. Pékin comme Brasilia ou New Delhi ont été affectées. Si la croissance chinoise est restée élevée un peu plus longtemps, c’est que Pékin l’a acheté à crédit.
Aujourd’hui, le retour de bâton est rude. Du moins le pense-t-on. C’est tout l’objet du récent dossier consacré par le Financial Times à la Chine. Son angle : la dette. Pas n’importe quelle dette, la dette des entreprises. Les chiffres sont terrifiants. Pourtant en parallèle, le pays affiche un léger mieux sur le front industriel. A qui faut-il se fier, à l’analyste londonien ou au manutentionnaire chinois ? Petit décryptage.
▪ Le fardeau des entreprises
En Europe, nous avons choisi d’endetter les Etats. Les Etats-Unis ont choisi d’endetter les ménages. En Chine, on a choisi d’endetter les entreprises. Si la dette chinoise tous secteurs confondus est passée de 130% à 200% du PIB depuis 2008, la responsabilité est largement portée par les entreprises. Leur part représente désormais 124% du PIB selon JP Morgan, cité par le Financial Times, contre 90% en 2007.
Le FMI souligne pour sa part que le ratio dette/fonds propres des entreprises a augmenté de 110% l’année dernière, ce qui fait des entreprises chinoises les entreprises les plus endettées des pays émergents.
Ces chiffres inquiétants risquent d’ailleurs de s’aggraver. En juin 2013 les investissements étaient encore en hausse de 20% par exemple. Pourtant l’excès de monnaie en circulation commence à faire réagir l’Etat.
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▪ Un navire lent à changer de cap
Des premières mesures ont été prises. La Banque centrale chinoise a par exemple annoncé un resserrement du crédit cet été. L’impact fort qu’a eu cette annonce a témoigné de la capacité d’intervention de l’Etat. De même, Pékin a annoncé des aides aux PME et aux collectivités locales, démontrant que le problème de l’endettement des petites unités est également une préoccupation.
Sur les réformes de fond, le navire chinois est en train de changer de cap… lentement. Le président Xi Jinping et le premier ministre Li Keqiang étaient connus avant d’être nommés à la tête de l’Etat chinois en novembre dernier pour être de fervents défenseurs du virage de l’économie chinoise vers la consommation intérieure. Pourtant les espoirs provoqués par leur arrivée ne se sont pas encore traduits par des bouleversements.
Il se trouve que les réformes ne font pas l’unanimité au sein du Politburo chinois. A la tendance réformatrice s’oppose une tendance plus conservatrice, accrochée à ses acquis. Le sinologue François Godement rappelle que le duo de l’exécutif a nommé récemment un ancien employé d’un groupe pétrolier à la tête de la Sasac, l’organisme qui gère les participations de l’Etat. Ce n’est pas franchement un signe de modernité de nommer un ancien employé d’un des secteurs qui a incarné l’ère du tout-investissement.
Des mesures fortes ont été promises pour le prochain Congrès automnal du Parti communiste chinois, qui se tiendra en novembre prochain. Il ne reste plus qu’à confirmer.
▪ Des matières encore hésitantes
L’indécision qui domine encore sur le rythme des reformes en Chine a été une des raisons pour laquelle les matières premières louvoient. Les derniers chiffres de l’industrie sont certes meilleurs que ceux de l’année dernière. Ainsi en juillet l’activité manufacturière a atteint un plus haut en quatre mois, alors que les commandes ont bondi.
Cette bonne santé a été confirmée par HSBC, dont l’indice de l’activité manufacturière est passé pour la première fois depuis des mois au-dessus de 50, synonyme d’expansion. Ces bonnes nouvelles estivales ont fait se redresser le cuivre. Le métal rouge a gagné plus de 7% sur le mois passé.
Pourtant on sait que la Chine sera obligée un jour ou l’autre de modifier le mode de fonctionnement de ses entreprises. Le surinvestissement dans le photovoltaïque a par exemple fait une première victime, Suntech Power. On peut s’attendre dans les mois à venir à voir les héros d’hier tomber de leur piédestal. La mise en cause récente de quatre membres de l’équipe de direction du géant pétrolier Petrochina est peut-être un nouveau signe de réforme des entreprises publiques. A noter que le titre a perdu 5% à Hong Kong à la suite de ces arrestations.
Une opération main propre de plus grande ampleur visant à rationaliser la gestion des entreprises chinoises pourrait peser sur la croissance à court terme.
▪ Mon conseil
Il est encore bien trop tôt pour miser sur un rebond de la croissance chinoise. Je vous conseille de miser sur des matières qui sont moins dépendantes de la santé de l’industrie chinoise. Une matière reste un bon pari, le pétrole.
Selon les derniers calculs de l’analyste pétrole et gaz Wood Mackenzie, la Chine importera 500 milliards de dollars de pétrole d’ici 2020, soit l’équivalent du PIB de Taïwan. En volume, ces importations représenteront 9,2 millions de barils par jour. Le pétrole est la matière avec laquelle on ne perd pas.