Avec la Théorie monétaire moderne, on entre dans une nouvelle dimension de l’endettement et de l’inflation… et les Etats-Unis sont toujours partants.
Une révolution a besoin de penseurs en plus d’exécuteurs. Ils identifient les ennemis. Ils justifient de nouvelles interventions. Ils rassurent les foules. Après tout, ils savent ce qu’ils font !
Les gens ont besoin d’explications aux étranges phénomènes provoqués par la fausse monnaie. Il leur faut des « solutions » bidon aux problèmes qu’elle cause.
Réduire la fausse monnaie n’est pas envisageable… si bien qu’on invente des théories permettant de faire des choses toujours plus étranges et nocives.
Et voilà qu’arrive l’économiste Stephanie Kelton, conseillère de Bernie Sanders.
« Nous avons augmenté les dépenses et nous avons désormais des déficits budgétaires à 1 000 Mds$ », a-t-elle souligné lors d’une interview télévisée la semaine dernière. « Pourtant, nous n’avons assisté à aucun des désagréments attendus par les économistes traditionnels. Pas d’étouffement. Pas de pic des taux d’intérêts. Pas d’inflation ».
Il ne s’est encore rien passé de mal, croit-elle. A partir de là, elle extrapole qu’il ne se passera probablement rien de mal…
Autoroute vers nulle part
Comme nous l’avons vu la semaine dernière, Rudolf von Havenstein aurait pu dire la même chose en 1920… tout comme Arthur Burns en 1970… ou Hugo Chavez en 2001. Personne ne sonne de cloche à la fin d’un marché haussier… pas plus qu’au début d’un désastre inflationniste.
Et puis une fois qu’on est sur cette autoroute vers nulle part… pourquoi ne pas accélérer ?
Mme Kelton affirme que les politiciens pourraient sans problème ajouter 500 Mds$ au déficit actuel. Il se peut qu’elle ait raison. On ne sait jamais quand les problèmes se manifesteront.
Elle a raison à coup sûr sur un point, cependant. La TMM – Théorie monétaire moderne – va être un succès. Dans un entretien au Globe Post, Mme Kelton donnait quelques explications :
« […] Un pays comme les Etats-Unis n’a pas besoin de taxer ou d’emprunter pour obtenir l’argent nécessaire à ses dépenses. Ce n’est donc pas une question de pouvoir se permettre un programme en termes financiers. On peut toujours se le permettre. Il faut savoir si dépenser pour financer ce programme causera un problème d’inflation.
Cela peut arriver si on essaie de mettre en place des choses ambitieuses et que l’économie n’a pas les gens ou les machines, les usines, ou le béton et l’acier pour absorber ces dépenses. On peut alors déclencher un problème d’inflation ; la TMM reconnaît que ce sont nos ressources réelles qui sont limitées, et non nos ressources financières. »
Dommage qu’elle n’ait pas compris. Ce sont les ressources réelles qui imposent les limites. La monnaie ne fait que les représenter…
Une situation faussée
Les marchés utilisent la monnaie – les prix – pour nous dire quand les choses réelles sont bon marché, et quand elles sont chères. Cette information signale quand il faut accélérer – acheter, investir, embaucher – et quand il faut ralentir.
Imprimer plus de « monnaie » ne fait que fausser la situation. Cela trompe les gens, les poussant à penser qu’ils ont plus de temps et de ressources avec lesquels travailler.
Mais Mme Kelton ne s’en soucie pas. Ajoutez simplement de la « liquidité », chargez la mule avec de la dette… et au galop, jusqu’à ce que les roues de la charrette se détachent :
« Le gouvernement peut toujours payer ses factures et, dans le même temps, dépenser plus sur d’autres choses. Rappelez-vous, il ne peut pas se retrouver à court d’argent.
Nous devrions équilibrer l’économie, pas le budget. Or actuellement, nous avons une myriade de déséquilibres dans notre économie. Nous avons un déficit d’infrastructures. Nous avons un déficit de soins de santé, d’immenses disparités de revenus et de richesse, et je pourrais continuer encore longtemps. »
Inutile d’en dire plus, en ce qui nous concerne. Nous avons bien compris – et c’est un thème familier…
Nouvelles lunettes
Mme Kelton pense savoir ce dont les gens ont besoin. On ne devrait pas les laisser décider par eux-mêmes, en dépensant leur propre argent comme bon leur semble. A la place, les autorités devraient couvrir les « déficits », comme elle les appelle. Comment ? En imprimant de la monnaie.
Et qu’en est-il de l’inflation ? Tant que l’économie fonctionne « en sous-capacité », Mme Kelton pense que les prix à la consommation n’augmenteront pas. Tant qu’il y a des sièges vides dans le restaurant, en d’autres termes, les autorités devraient essayer de les remplir en imprimant de l’argent.
Mme Kelton pense que les dépenses du gouvernement – même lorsqu’il s’agit de fausse monnaie qu’il imprime lui-même – sont une forme de production. A mesure que le gouvernement imprime de plus en plus, croit-elle, le restaurant se remplit. Lorsqu’il est plein, les convives se battent pour une place… les prix grimpent… et les autorités devraient alors reculer.
« Nous avons besoin de nouvelles lunettes [pour observer les questions économiques] », affirme-t-elle. « Et je pourrais donner ces lunettes aussi bien à un républicain qu’à un démocrate. Elles devraient fonctionner pour les deux. »
Imaginez ça : Mme Kelton déclare que lorsque les autorités « investissent » dans l’éducation, les routes et l’infrastructure, elles pourraient dépenser une quantité presque infinie d’argent, parce que les dépenses augmentent la « capacité de portance » de l’économie.
Les autorités dépensent, la capacité de portance augmente, et elles peuvent dépenser plus ! Youpi !
Oui, l’inflation est partout et toujours une arnaque. Actuellement, tant les républicains que les démocrates cherchent des moyens de l’augmenter. La TMM leur donne les verres teintés dont ils ont besoin.