Entre vérités officielles, calculs stratégiques et illusions diplomatiques, le brouillard de la guerre s’épaissit.
En début de semaine, Donald Trump a déclaré qu’un cessez-le-feu entre Israël et l’Iran était « désormais en vigueur », après plusieurs jours de bombardements intenses. Le Huffington Post rapporte :
« L’annonce est intervenue peu après que les Etats-Unis se sont officiellement impliqués dans le conflit en prenant le parti d’Israël, lançant samedi des frappes sur trois sites nucléaires iraniens.
A 6h08 (heure de Londres), le président américain écrit sur Truth Social : ‘LE CESSEZ-LE-FEU EST MAINTENANT EN VIGUEUR. VEUILLEZ NE PAS LE VIOLER !’ »
Mais quelques minutes plus tard, revirement de situation. Le Tehran Times publie : « L’Iran n’a accepté aucun cessez-le-feu. Trump ment à nouveau. »
Selon le journal iranien, le président américain aurait inventé cette déclaration dans l’espoir de forcer Téhéran à accepter une trêve, misant sur une réaction populaire interne contre les dirigeants iraniens.
Alors, qui dit vrai ? Quelle est la part de vérité dans cette guerre ? Quelle est la part de manipulation ?
Les frappes américaines ont eu lieu alors que les deux parties semblaient engagées dans des négociations – mais qui, rétrospectivement, paraissent n’avoir été qu’un simulacre.
Des sources affirment que les Iraniens avaient été prévenus de l’arrivée des bombes américaines – s’il y en a vraiment eu. Ils auraient eu le temps de mettre à l’abri à la fois le personnel et le matériel scientifique précieux. En retour, l’Iran aurait évité de frapper directement la base américaine au Qatar lors de sa contre-attaque.
Et maintenant, un faux cessez-le-feu ? Des bunkers détruits, des morts, des tensions exacerbées… pour quoi, au fond ?
Finalement, il n’existe que deux voies possibles : la paix ou la guerre. Soit on choisit la négociation, la justice, les lois, les conventions, les usages – autrement dit, la décence commune propre aux sociétés civilisées. Soit on choisit de bombarder.
Chacun a ses raisons. Demandez à un meurtrier pourquoi il a tué ; il aura une réponse logique, du moins à ses yeux. « Il s’en prenait à ma compagne », dira-t-il. Les menteurs fabriquent leurs récits pour servir un but. Et tout voleur a besoin d’argent, ne serait-ce que pour prouver qu’il peut se débrouiller seul.
La Russie affirme vouloir protéger les populations russophones d’Ukraine. Est-ce une bonne raison ?
Les Etats-Unis ont envahi l’Irak en prétendant combattre le terrorisme ou construire une démocratie. Les plus cyniques diront qu’il s’agissait plutôt de garantir l’accès au pétrole ou de nourrir les profits de l’industrie de l’armement. Quelles étaient, au fond, les « bonnes » raisons ?
Mais même les raisons dites légitimes sont souvent mal comprises.
En 1965, le président Lyndon B. Johnson lance l’opération Rolling Thunder. Le général Curtis LeMay en résume l’objectif : « Bombarder [le Nord-Vietnam] jusqu’à ce qu’ils retournent à l’âge de pierre. » A l’époque, le Nord-Vietnam est vu comme le principal responsable de l’insurrection communiste au Sud. L’idée : faire pression par les airs pour forcer Hanoï à renoncer. Une stratégie censée protéger le Sud-Vietnam du communisme. Etait-ce une bonne raison ?
Des décennies plus tard, une rencontre historique a lieu à Hanoï : Robert McNamara, ancien secrétaire américain à la Défense, 79 ans, retrouve le général Vo Nguyen Giap, 83 ans. Son objectif : comprendre ce qui avait échoué.
« Vous n’avez pas compris ? demande McNamara. Quand nous avons bombardé Hanoï, nous voulions vous envoyer un message. »
Giap lui répond : « Je suppose que nous n’avons pas compris. Nous pensions que vous vouliez simplement nous tuer. »
Plus tard, aux Etats-Unis, McNamara se présentera en conférence de presse. Les larmes aux yeux, il fait ce que peu de responsables américains ont osé : il s’excuse.
Certaines raisons d’agir sont meilleures que d’autres.
Trump affirme avoir frappé l’Iran parce que « l’Iran ne doit pas avoir l’arme nucléaire ».
Le sénateur James Lankford, lui, évoque la nécessité de protéger les milliers d’Américains vivant en Israël.
Quant à Lindsey Graham, il explique que les Etats-Unis « se battent pour leur liberté ».
Mais aucune de ces raisons n’a la hauteur morale de slogans comme « Rendre le monde sûr pour la démocratie » ou « Empêcher l’effet domino » au Vietnam.
C’est peut-être le député Pat Harrigan qui résume le mieux, par l’intermédiaire du général LeMay, la logique de ces frappes : « Faire monter la pression… pour la faire redescendre. »
Ou, comme l’a dit Donald Trump lui-même, après avoir frappé : « Oui, nous vous avons donné un coup de poing dans le nez. Mais… LE TEMPS DE LA PAIX EST VENU. »
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Trump a fait semblant de faire la guerre à l’Iran pour contenter Netanyahou, c’est à dire une partie influente, sinon populaire, de son électorat.