Assouplissement quantitatif, « impression monétaire », rachats d’actifs… Quel que soit le terme employé, les outils des banques centrales ne fonctionnent pas pour relancer l’économie.
Les politiques monétaires pratiquées par les banques centrales sont inefficaces.
Inefficaces à la fois pour relancer la croissance réelle au rythme antérieur à la crise de 2007 – et, en même temps, pour produire l’inflation tant souhaitée par les responsables de la conduite des affaires.
Nous restons sous l’emprise des forces de déflation.
La seule manifestation visible de résultat de ces politiques, c’est l’inflation spectaculaire et scandaleuse des prix des actifs financiers et l’accroissement des inégalités – lequel produit le populisme. Ces politiques monétaires fracassent nos sociétés.
Cette inflation des prix et des indices boursiers n’est pas le fruit d‘une liaison directe, organique, traçable, entre la politique monétaire et les Bourses. Non, elle est le résultat d’une sorte de croyance alimentée par la baisse des taux et par l’impression/illusion de liquidité, qui persuade que la banque centrale créerait de l’argent et que cet argent irait mystérieusement se placer dans les marchés.
Langage trompeur
Une telle croyance se réalise d’être crue ; elle stimule l’esprit de jeu et de spéculation mais elle ne repose pas sur un lien direct. En effet, en réalité la banque centrale s’imprime pas de monnaie, elle ne fait pas fonctionner la planche à billets. C’est une facilité de langage trompeuse.
La banque centrale retire du portefeuille financier mondial des titres qui rapportent, qui ont un rendement ; en paiement de ces titres, elle donne de la monnaie qui elle ne rapporte rien.
Elle retire donc du rendement du portefeuille mondial ce qui, en vertu ensuite d’un effet de recherche de rééquilibrage, produit une quête de rendement par ailleurs. Comme le dit le gestionnaire de fonds John Hussman : la monnaie qui ne rapporte rien est un « mistigri » dont on cherche à se débarrasser pour acquérir quelque chose qui rapporte.
Les banques centrales retirent du rendement et les détenteurs de portefeuilles cherchent, eux, à récupérer du rendement. Ils achètent donc des actifs plus risqués qui eux rapportent.
Moi-même j’utilise cette approximation de langage – celle de l’impression monétaire – après avoir souvent expliqué que c’était inexact, car il n’est pas possible de répéter à l’infini les mêmes explications. Disons que nous utilisons un raccourci de langage faux mais communément accepté.
Le but des assouplissements quantitatifs
Le but des QE (assouplissements quantitatifs) est d’acheter des titres, des valeurs du Trésor (UST) ou des titres hypothécaires (MBS) à des courtiers. Ainsi, la Réserve fédérale encourage activement ces courtiers à se lancer dans les parties les plus risquées des marchés du crédit et à remplacer les titres sans risque qui ont été vendus par des titres plus risqués (obligations/ titres à risque ainsi que prêts).
Ce sont ces segments plus risqués qui bénéficient des achats et, ainsi, sont censés encourager la reprise et la croissance économique, et non les UST.
En retirant les actifs sûrs des mains des courtiers/concessionnaires, la banque centrale compte sur ce qu’on appelle les « effets de portefeuille » ou « rééquilibrage ». La motivation présumée du profit est censée pousser les banques concessionnaires (encourageant ainsi les autres banques à les accompagner) hors de ces actifs sans risque à faible rendement.
Dans la pratique, le QE ne fait rien pour modifier les perceptions (et la réalité) des risques de liquidité – malgré tout le battage médiatique constant sur « l’impression monétaire ».
Les concessionnaires/courtiers, comme toute autre entreprise, prennent des décisions sur la base des bénéfices ajustés en fonction du risque.
Par conséquent, s’il peut être nominalement plus rentable de vendre des actifs sûrs à la Fed (ou à toute autre banque centrale qui entreprend un QE) tout en achetant des actifs plus risqués et moins liquides pour les remplacer, cela n’est pas perçu comme étant profitable après ajustement en fonction du risque.
Le risque est trop élevé pour la différence de rendement.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]