Nous assistons à la pire liquidation jamais observée sur le marché obligataire…
L’empire américain peut résister à des présidents stupides, à un Congrès constitué d’abrutis et à des dirigeants de la Fed sans cervelle…
… Mais peut-il survivre à des taux d’intérêt de 5% ?
Nous sommes en mode sécurité maximale. Voici pourquoi…
Selon nous, le grand changement s’est produit à l’été 2020. C’est à ce moment-là que la tendance primaire du marché du crédit – c’est-à-dire la plus primaire de toutes les tendances du monde financier – a changé de direction.
Après 40 ans de hausse des prix des obligations (et de baisse des rendements), le rendement de l’obligation américaine à 10 ans a finalement atteint son niveau le plus bas en juillet 2020. Depuis lors, les rendements obligataires sont en hausse et les prix des obligations en baisse. En fait, il s’agit de la pire liquidation jamais observée sur le marché obligataire. Et il s’agit de la plus forte hausse des rendements jamais enregistrée.
Des affaires risquées
L’obligation américaine à deux ans, par exemple, est la référence en matière de financement à court terme. Le dernier jour de juillet 2020, le rendement n’était que de 0,11%, soit à peine un dixième de pour cent. Aujourd’hui, il dépasse les 5%, ce qui est 45 fois plus élevé.
Lorsque l’on peut obtenir 5% sur des prêts à deux ans, les autres investissements apparaissent sous un jour nouveau. Corrigées de l’inflation, les actions ont baissé de 20 à 30% au cours des deux dernières années. Pourquoi en acheter ? Qui voudrait risquer une nouvelle perte de 25% ? Un gain de 5%, garanti, leur coupe l’herbe sous le pied… et réduit la dette de leurs bilans.
Rappelez-vous, l’idée même d’abaisser les taux d’intérêt à des niveaux absurdes était d’encourager les investisseurs à ne pas épargner, mais à placer leur argent dans des « investissements » plus risqués.
Le problème, c’est qu’en occultant le coût réel du capital, les marchés n’imposaient plus aucune discipline. Un taux d’intérêt réel – fixé par des acheteurs et des vendeurs de crédit consentants (prêteurs et emprunteurs) – est le seul moyen de savoir si l’on gagne de l’argent ou si l’on en perd. Ce taux d’intérêt, le taux en vigueur pour emprunter des capitaux, est connu sous le nom de « hurdle rate » [NDLR : taux de rendement minimal].
Si votre investissement rapporte suffisamment pour payer les intérêts, il franchit la barre. Tout va bien. Vous, et par extension le monde entier, vous enrichissez. Mais si vous ne franchissez pas la barre, vous trébuchez… vous tombez sur la tête… et le capital réel est consommé, utilisé et perdu.
Lorsque la Fed a falsifié les taux d’intérêt – dans son effort insensé pour « stimuler » l’économie avec de l’argent fictif prêté à des taux d’intérêt fictifs –, elle a effectivement fait tomber tout obstacle. Il n’y avait alors aucun moyen de savoir si l’on gagnait de l’argent ou si l’on en perdait.
Résultat ? L’argent a été gaspillé, dans des cryptomonnaies sans valeur productive, dans des rachats qui n’ont fait qu’enrichir les actionnaires sans ajouter de capacité de production, dans des entreprises zombies et – pire que tout – dans des « investissements » gouvernementaux qui ont non seulement détruit du capital, mais aussi déformé l’ensemble de l’économie, en l’orientant vers des guerres désastreuses et des ingérences économiques.
Une crise du crédit
Vous vous direz peut-être : « Et alors ? L’argent n’était pas réel de toute façon. » C’est vrai. Mais il aurait pu servir à acheter de vraies ressources, du temps, des compétences… Et il a été gaspillé dans des projets stupides.
Ces ressources précieuses sont irremplaçables. Une fois que vous avez utilisé un litre d’essence, mangé un sandwich, ou qu’une heure est passée, vous ne les récupérerez jamais.
Maintenant que les taux d’intérêt sont (à peine) positifs en termes réels (après inflation), les épargnants sont à nouveau récompensés et un obstacle, aussi modeste soit-il, est à nouveau en place. Mais comment les zombies font-ils pour rester en activité ? Ils doivent emprunter pour pouvoir continuer à fonctionner. Et qu’en est-il des banques ? Elles ont prêté de l’argent à des taux bas. Maintenant, elles sont remboursées à des taux bas, alors que les clients s’attendent à des taux d’intérêt plus élevés sur leurs dépôts. Les banques américaines auraient accumulé jusqu’à 200 milliards de dollars de pertes. Quatre grandes banques ont déjà fait faillite. Qu’en est-il des autres ?
Peut-être – on ne sait jamais ! – que l’économie est en mesure de s’orienter vers des taux d’intérêt plus élevés et une inflation plus faible. Nous en doutons. La dette mondiale s’élève à 307 000 milliards de dollars. Chaque centime représente l’engagement de quelqu’un, à payer quelqu’un d’autre. Et tous ont fait des plans, pris d’autres engagements sur la base d’hypothèses qui ne sont plus correctes. Ils avaient prévu de se refinancer à 3%. Maintenant, ils doivent payer 6%… ou 10%… ou plus.
Il s’agit d’une crise du crédit. Lorsque l’on a changé le dollar américain en 1971, l’économie est progressivement devenue dépendante du crédit.
Au lieu de payer les choses avec l’argent dont ils disposaient déjà, ils ont dû se tourner vers le crédit. Au lieu de payer des choses avec de l’argent déjà gagné, les gens ont commencé à financer leurs maisons, leurs voitures, leurs dîners, leurs rachats d’entreprises, leurs guerres – tout – à crédit. Et lorsque le crédit devient plus difficile à obtenir et plus cher, une crise se déclenche. Et lorsque les investissements tournent mal, les pertes ne sont pas encaissées sur la production passée… mais sur la production future.
L’aggravation du déclin
Des prêts hypothécaires à 8% d’intérêt, des voitures à 10% et les emprunts des entreprises ont également augmenté ; l’indice à haut rendement de la Bank of America a plus que doublé au cours des deux dernières années. Bloomberg rapporte :
« Les obligations de pacotille dont le rendement est supérieur à 10% atteignent 325 milliards de dollars et tentent les investisseurs
Le montant de la dette à rendement à deux chiffres, que les investisseurs peuvent choisir sur le marché américain des obligations de pacotille, a augmenté au cours des six derniers mois, alors que la hausse des coûts d’emprunt et l’affaiblissement de l’économie pèsent sur la qualité du crédit. »
Pendant ce temps, sous le poids des taux d’intérêt plus élevés, l’ensemble de la structure du capital commence à grincer et à vaciller. Cette année, les mises en chantier sont au même niveau qu’en 1959. Les créations d’entreprises sont également en baisse. Bloomberg rapporte :
« Le ralentissement qui affecte le secteur du capital-risque et des start-ups a atteint son point le plus bas au cours des 18 derniers mois, comme le montrent les données du troisième trimestre. Les financements au stade de l’amorçage – le chapitre le plus précoce de l’investissement dans les startups, qui était jusqu’à présent à l’abri des turbulences économiques – ralentissent, signe que la récession s’aggrave. »
Et qu’en est-il du plus grand emprunteur, le gouvernement américain ? Il emprunte au rythme de 2 000 milliards de dollars par an. Il y a trois ans, il aurait payé moins de 1% sur une obligation à 10 ans. Aujourd’hui, ce taux est de 4,7%.
Nous ne savons pas ce qui va faire faillite, ni quand – une banque, une entreprise, un ménage ? Mais nous ne voulons pas être les détenteurs de la reconnaissance de dettes, lorsque nous le découvrirons.