Les grand schémas de la mégapolitique montrent que les dépenses excessives et l’ingérence contribueront au déclin de l’empire américain.
Le PIB américain a atteint la moitié de ce qui était prévu… et l’inflation a été bien plus forte que prévu. C’est ce que rapporte Bloomberg :
« L’économie américaine ralentit et l’inflation bondit, ce qui réduit les espoirs d’atterrissage en douceur
L’inflation de base du premier trimestre s’accélère pour atteindre un taux de 3,7%. Le produit intérieur brut a augmenté à un taux annualisé de 1,6%, ce qui est inférieur à toutes les prévisions des économistes, selon l’estimation initiale du gouvernement. Le principal moteur de croissance de l’économie – les dépenses personnelles – a augmenté à un rythme plus lent que prévu, de 2,5%. L’aggravation du déficit commercial est le facteur qui a le plus pesé sur la croissance depuis 2022. »
Nous voyons ici clairement l’illustration du piège de l’inflation ou de la mort.
La Fed veut réduire les taux. Les banques veulent des taux plus bas. Wall Street veut des taux plus bas. Le gouvernement américain a désespérément besoin de taux plus bas.
Mais l’inflation n’a que faire de la Fed. A 3,7%, elle est près de deux fois supérieure à l’objectif de la Réserve fédérale. Par conséquent, une baisse des taux coûterait probablement à la Fed le reste de sa crédibilité, signalerait des niveaux d’inflation plus élevés à l’avenir et pourrait affoler le marché obligataire, ce qui rendrait encore plus difficile pour les autorités fédérales de renouveler leur dette de 34 000 milliards de dollars et de financer de nouveaux déficits à hauteur de plusieurs milliards de dollars.
Le taux de croissance des Etats-Unis représente à peine un tiers de celui de la Russie. Mais si la Fed réduit ses taux pour tenter de relancer le PIB, elle risque de provoquer une hausse de l’inflation et un effondrement du marché obligataire, ce qui l’obligerait à « imprimer » davantage d’argent pour couvrir les déficits de l’Etat fédéral.
Mort de la bulle
Si elle ne réduit pas ses taux, elle risque une récession/dépression d’une gravité inconnue… et la mort de l’économie de bulle que ses taux d’intérêt ultra-bas, pratiqués de 2009 à 2021, ont créée.
L’inflation ou la mort. Nous sommes convaincus qu’elle mourra un peu sans rien faire, jusqu’à ce que la douleur d’une bulle mourante devienne insupportable.
Dans nos articles précédents, nous avons vu qu’il était possible de descendre de la montagne de la dette, de façon plus ou moins sûre. La Jamaïque l’a fait. La Grèce semble y parvenir. L’Argentine a commencé à le faire.
Mais cela ne peut se faire qu’en réduisant fortement les dépenses. Avec insistance. Suffisamment, pour dégager un excédent qui servira à réduire la dette.
Comme le dit Javier Milei, un budget équilibré est « non négociable ».
Ce qui rend les 95 milliards de dollars d' »aide étrangère » – à des gens qui n’en ont pas besoin (Israël), qui ne peuvent rien en faire (l’Ukraine) ou qui n’en ont pas vraiment l’utilité (Taïwan) – encore plus aberrants.
George Will affirme qu’il est « ignoble » de s’opposer au programme d’aide à l’étranger. D’autres affirment qu’il « favorise la sécurité des Etats-Unis ». D’autres encore pensent qu’il aidera à « protéger la démocratie », d’une manière ou d’une autre.
Que ces affirmations soient vraies ou non, nous n’en avons aucune idée. Ce ne sont pas des affirmations qui peuvent être vérifiées.
Le salaire de la dette
Le point de vue opposé est que les bénéfices de ces dépenses seront nettement négatifs.
Les Américains seront blâmés pour le massacre des innocents à Gaza. En Ukraine, certains reprocheront aux Américains de ne pas avoir donné aux Ukrainiens suffisamment de puissance de feu pour gagner… et d’autres, de promouvoir une guerre perdue d’avance qui a fait des centaines de milliers de victimes.
Et en Asie, les Etats-Unis se couperont d’un commerce amical avec l’économie la plus innovante et la plus productive de la planète. Au lieu de bénéficier des avantages d’un commerce gagnant-gagnant avec la Chine, les Etats-Unis récolteront les coûts amers d’une rivalité gagnant-perdant.
Quel que soit le point de vue choisi, ce qui est indiscutable, c’est qu’aux Etats-Unis comme en Argentine, « no hay dinero » (il n’y a pas d’argent). Les 95 milliards de dollars devront donc être empruntés. La dette américaine augmentera… et la tendance primaire à la baisse des prix des actifs réels, à la hausse des taux d’intérêt, à l’augmentation des niveaux d’inflation et à l’extension de la pauvreté se renforcera.
Les modèles de la mégapolitique suggèrent également, tout en laissant une grande place à l’interprétation et à l’argumentation, que ce type de dépenses excessives et d’ingérence dans les affaires des autres contribuera au déclin de l’empire américain.
Les poissons doivent nager. Les oiseaux doivent voler. Et les empires doivent décliner. Comme s’ils étaient guidés par une main invisible, les autorités fédérales font ce qu’elles ont à faire, quand elles ont à le faire, détruisant la position financière de l’Amérique, sapant sa position morale et, en fin de compte, détruisant sa position de premier hégémon du monde.
Demain, nous parlerons de Francis Fukuyama, et de ce qui pourrait remplacer l’ordre de l’après-Seconde Guerre mondiale. Les hommes qui le composeront seront tout aussi stupides que ceux qui le dirigent aujourd’hui. Mais peut-être qu’il s’agira d’un autre type de stupidité.