Les marchés sont en équilibre entre la falaise des cours boursiers et celle des anticipations de croissance et d’inflation. Attention à la chute !
Le mois de septembre démarre sur une note indécise sur le compartiment boursier des actions, et franchement négative sur l’obligataire.
Wall Street a fini le mois d’août sur les chapeaux de roue – avec une hausse de 2% en moyenne en quatre séances – et n’a rien cédé vendredi, malgré une envolée 10 points de base sur le bon du Trésor américain à 10 ans vers 4,195%
Le Nasdaq a manqué in extremis (-0,02%) d’inscrire une sixième séance de hausse consécutive ce 1er septembre, mais gagne 2,4% en hebdo… et 42% depuis le début de l’année. C’est sa meilleure performance en 9 mois depuis mars 1999.
Chômage-fiction
Cette consolidation tient d’abord aux 5% perdus par Tesla et n’a que peu à voir avec la publication du rapport sur l’emploi américain, le NFP.
L’économie américaine a généré 187 000 emplois non agricoles au mois d’août, selon le département du Travail, un nombre légèrement supérieur aux attentes (157 000)… mais les créations de postes des deux mois précédents ont été révisées en forte baisse, de 185 000 à 105 000 pour juin et de 187 000 à 157 000 pour juillet, soit un solde de révision total de 110 000 créations en moins pour ces deux mois.
Le taux de chômage s’est également accru de 0,3 point à 3,8%, avec l’arrivée du contingent saisonnier de nouveaux diplômés en recherche d’emploi.
C’est l’occasion de répéter que le taux de chômage « officiel » est une pure fiction statistique. Des dizaines de millions d’Américains en capacité de travailler ne sont pas ou plus « dans l’emploi » depuis des années, ayant renoncé à occuper une job précaire et mal payé, parce que bénéficiant d’aides diverses (allocation handicap ou mère isolée, charité/distribution de nourriture gratuite)… et phénomène très alarmant, parce que sous stupéfiants et transformé en véritable zombie avec une démarche de « mort-vivant ».
La « bonne nouvelle » à retenir du NFP, c’est que le revenu horaire moyen s’est accru à un rythme annuel de 4,3%, un taux légèrement supérieur à l’inflation « brute » (mais cela ne durera pas vu la hausse à venir des carburants avec le franchissement des 86 $ par le baril de WTI et de la barre des 4 $/gallon (3,78 l) dans la plupart des stations-services des Etats-Unis (sauf dans le Midwest, au Texas et en Louisiane où on trouve encore du sans plomb à 3,50 $) et, en Californie, le carburant frôle les 5,5 $ en moyenne.
Indice et réalité
Nous devrions bientôt observer le revers de la médaille côté « moral des ménages » américains, lequel est très étroitement corrélé au prix du plein d’essence (certes, ça ne vole pas haut… mais cela se vérifie à chaque fois).
Le coût moyen d’un loyer vient d’attendre 2 000 $ tandis que la mensualité d’un prêt hypothécaire pour occuper un logement de la même taille vient de franchir le cap des 2 800 $, soit plus de 60% du salaire médian (le prix d’une maison représentant 8 ans de ce même salaire).
Petite anecdote, au plus fort de la crise en 1929, le prix d’une maison, c’était 3 ans de salaire, tandis que le loyer coûtait 15% du revenu.
Conclusion : depuis le lancement des quantitative easing des banques centrales et de la Fed en particulier, le pouvoir d’achat et le « reste à vivre » après paiement des frais pour se loger s’est littéralement effondré.
Dans le même temps, les indices boursiers se sont littéralement envolés… et les instruments obligataires (détenus majoritairement pas ceux qui se font laminer par l’inflation) connaissent leur troisième année de dégringolade, laquelle devient la plus longue et la plus profonde de l’histoire.
Pour conclure, le grand écart entre les anticipations de croissance et le pouvoir d’achat puis le grand écart entre actions et obligations ne peut littéralement pas durer.
Faute de pouvoir encore grimper dans ces conditions, le meilleur scénario, c’est d’enfiler un casque de réalité virtuelle ne diffusant que les dépêches concernant des rachats de titres, de s’asseoir et surtout de ne plus bouger.
C’est peut-être pourquoi les marchés sont littéralement figés depuis six mois : un seul pas dans la mauvaise direction, et ils tombent de la falaise.
Et cette stagnation va au moins durer un jour de plus : Wall Street est fermé ce lundi !
Pour ce mardi, il n’y a plus rien de garanti.
1 commentaire
Toujours un style très fluide pour annoncer les mauvaises nouvelles de l’économie mondiale (merci, la pilule passe mieux). Comme pour tous les chroniqueurs des publications Agora, vos articles sont des chefs-d’œuvre.