La rivière monétaire continue de couler, toujours dans la même direction. La Fed va-t-elle réduire le courant, voire l’inverser ? Mais, si elle le faisait, combien de temps les digues tiendraient-elles debout ?
Le fleuve du pouvoir et des ressources poursuit son écoulement vers Washington. Joe Biden vient de proposer la plus grosse hausse d’impôt de l’histoire. Fox News nous donne quelques chiffres :
« Le président a présenté les hausses de taux qu’il envisage dans le cadre de son budget, prévoyant 5 800 Mds$ de dépenses fédérales pour l’exercice 2023, qui commencera en octobre.
La proposition prévoit une hausse d’impôt de 2 500 Mds$. Exprimée en dollars, il s’agirait de la plus grosse hausse d’impôt de l’histoire. Le déficit serait de 1 150 Mds$. »
Les inepties s’enchaînent à un tel rythme qu’il est difficile de ne pas en perdre le compte. Encore 2 500 Mds$ siphonnés de l’économie réelle pour financer des guerres, des armes, des aides financières et d’autres futilités ? Pour construire toujours plus de villas sur les rives du Potomac ? Pour alimenter toujours plus l’inflation afin que les gens se précipitent pour dépenser l’argent qu’ils ont gagné à la sueur de leur front ? Pour moins de production réelle ?
Toujours plus de programmes. Toujours plus de projets. Toujours plus de sanctions. Toujours plus d’initiatives. Toujours plus de lois. Toujours plus de réglementations. Plus, toujours plus !
Des taux trop bas pendant trop longtemps
Et pourtant le déficit annuel reste supérieur à 1 000 Mds ! Qui couvrira ce déficit ? La Fed, bien sûr.
Mais la Fed est déjà dos au mur. Voici ce qu’a récemment affirmé l’ancien secrétaire au Trésor Larry Summers :
« Il y a fort à parier que la politique actuelle de la Fed conduira à un épisode de stagflation, avec un taux de chômage et un taux d’inflation moyens supérieurs à 5% dans les prochaines années. À terme, cela devrait provoquer une violente récession. »
Larry Summers avait raison lorsqu’il a prévenu les démocrates que leurs dépenses pharaoniques provoqueraient une poussée d’inflation. Il pourrait là aussi avoir raison, lorsqu’il déclare que les mesures au rabais de la Fed pour lutter contre l’inflation pourraient plomber la croissance et pousser les prix à la hausse.
Larry Summers estime que la Fed a fait une erreur en maintenant les taux à de bas niveaux pendant trop longtemps, une autre en refusant de reconnaître le risque croissant d’une accélération de l’inflation et une dernière en refusant de prendre des « mesures bien plus fortes » pour endiguer l’inflation. Voici son explication :
« Il y a un an, la Fed pensait que l’inflation serait de l’ordre de 2% pour l’année à venir. Il y a six mois, elle se disait confiante dans le fait que l’inflation était transitoire. Il y a deux semaines, elle continuait à acheter des créances hypothécaires titrisées, alors même que les prix de l’immobilier ont augmenté de plus de 20%.
Elle n’a donné aucune explication pour justifier ces erreurs considérables. Et rien ne suggère que la Fed modifiera ses modèles de prévision ou le personnel chargé de faire les prévisions ».
Mais Larry Summers commet également une erreur en pensant que la Fed peut désormais inverser le cours des choses. Cela nous semble impossible. Les oiseaux doivent voler. Les poissons doivent nager. Et, compte tenu des circonstances, le gouvernement fédéral doit poursuivre sa politique inflationniste.
« Comment peut-on être aussi stupide » est une question qui se veut normalement rhétorique. Mais nous avons une réponse à cette question : car cela rapporte gros.
C’est du moins ce que nous pensons. Larry Summers offre des conseils stratégiques. Ce sont de bons conseils. A la Chronique, nous ne prodiguons aucun conseil à la Fed. Nous nous contentons d’observer. Or nous constatons que nous sommes dirigés par une classe qui s’est gavée grâce aux mauvais conseils qui lui ont été prodigués. Il est peu probable qu’elle y renonce.
80% de la population dépend de l’économie réelle pour gagner son pain. Mais les 10% les plus riches et les 10% les plus pauvres dépendent largement du secteur public. Pour les plus riches, les taux d’intérêt négatifs de la Fed ont dopé les performances boursières, tandis que les dépenses publiques offrent des contrats, des emplois et des sinécures.
A l’autre extrémité du spectre, les aides financières de l’Etat fédéral permettent aux plus pauvres de se la couler douce au lieu de chercher du travail.
Le « taux Volcker »
Que devrait faire la Fed pour ramener l’inflation sous contrôle ? Larry Summers partage notre point de vue :
« Il est impossible de lutter efficacement contre l’inflation sans une hausse substantielle des taux d’intérêt, ce qui impliquerait une augmentation temporaire du chômage. Cela fait des décennies que nous n’avions pas eu des taux d’intérêt à court terme aussi faibles. Il faudra les relever à au moins 2% ou 3% pour ramener l’inflation sous contrôle.
Cela signifie qu’avec un taux d’inflation supérieur à 3%, comme c’est le cas actuellement, il faudrait des taux d’intérêt à court terme de 5% ou plus pour contrôler l’inflation. Il s’agit un scénario que les marchés considèrent comme inimaginable ou presque. »
Les investisseurs estiment-ils qu’un taux directeur de 5% est « inimaginable » ? Peut-être. Mais le « taux Volcker », c’est-à-dire le taux requis pour ramener l’inflation sous contrôle, pourrait être bien plus élevé. Si le taux d’inflation était de 8% et qu’il fallait un taux d’intérêt réel de 2% ou 3% pour ralentir l’inflation, il faudrait que la Fed relève son taux directeur à 10% au minimum.
Inimaginable ? Peut-être. Cela provoquerait un krach boursier et les décideurs perdraient au bas mot 25 000 Mds$. Cela plomberait les plans de dépenses pharaoniques du gouvernement fédéral et réduirait considérablement les perspectives de carrière pour les élites politiques.
Comme nous ne cessons de le répéter, la Fed est prise au piège : c’est l’inflation ou la mort. Larry Summers pense que la Fed va reconnaître son erreur et faire l’inimaginable. C’est-à-dire que, lorsqu’elle aura commis toutes les erreurs possibles, elle prendra enfin les mesures qui s’imposent pour ramener l’inflation sous contrôle.
Cela nous semble peu probable. Nous pensons plutôt qu’elle va menacer de contrôler l’inflation. Cela provoquera un krach boursier. Les élites du système pousseront des cris d’orfraie. Et la Fed retombera immédiatement dans ses travers.
1 commentaire
Une hausse des taux n’augmentera pas l’énergie disponible (au contraire, l’investissement diminuera encore plus) ni ne fera pousser du blé. la même chose pour tout le reste. La politique monétaire est impuissante devant une inflation due à la raréfaction de l’offre, surtout celle de ressources premières