Le « couple maudit » fait tout ce qu’il peut pour que le marché continue de grimper et pour que les risques soient faussés – mais les résultats ne seront pas forcément à la hauteur des attentes…
Le système est-il pourri et méchant volontairement, nous demandions-nous hier ?
La réponse est nuancée : le système est pourri, méchant, partiellement. L’autre partie n’est pas du domaine du choix, elle est imposée par l’ordre des choses. C’est un peu compliqué, cependant ; il faut faire un peu de technique financière.
Lorsque le couple maudit banque centrale/gouvernement assure les risques du capital, en particulier ceux du système bancaire et shadow bancaire, il permet à ces deux comparses de prendre plus de risques. Si vous êtes assuré, vous prenez plus de risques, c’est l’évidence.
Grâce à l’assurance fournie par le couple maudit, le système financier peut prendre plus de risque ; comme on dit en jargon technique, sa capacité bilancielle est fortement augmentée. Il peut produire plus de crédit, il peut gonfler ses actifs.
Nous sommes là au cœur du fonctionnement du système, concentrez votre attention.
Pour tourner, le système a besoin de XXXX milliards de crédit par an. Les fonds propres du système, constitués par les fonds propres des banques et du shadow banking, sont devenus totalement insuffisants pour supporter à la fois la masse de risques accumulés et la production de milliers de milliards supplémentaires de risques.
En clair et pour simplifier, le système est insuffisamment capitalisé pour faire face aux risques qu’il a accumulés et aux risques qu’il doit continuer de produire bon an mal an.
Le risk-off est devenu impossible
Normalement, le système devrait être, depuis dix ans, hyper-prudent. Il devrait fuir le risque – il devrait, comme on dit maintenant, se mettre en risk-off.
Hélas, c’est impossible. Si cela se produisait, ce serait la catastrophe déflationniste.
Il faut donc à tout prix le mettre sous assistance ; comme les malades du Covid, il faut l’oxygéner perpétuellement – et l’assistance en question, quand on parle de finance, c’est celle de la banque centrale.
Je résume. Spontanément, le système a tendance à se mettre en risk-off ; nous ne pouvons plus supporter le moindre épisode de fuite devant le risque ; il faut donc mettre en première ligne la banque centrale et le Trésor afin de protéger le système, afin d’absorber le risque, afin que les primes de risques ne soient pas contenues, gravées, intégrées dans les prix boursiers.
Si vous m’avez suivi, vous avez compris que les autorités constituées par le couple banque centrale-Trésor public n’ont plus le choix, donc elles ne sont pas méchantes et vicieuses volontairement. En revanche, elles ont commis des erreurs dramatiques dans le passé en laissant se créer ces situations.
Un passé regrettable
C’est peut-être là, dans le passé – il y a 40 ans, quand elles ont dérégulé, ou il y a 12 ans quand elles ont sauvé de la crise des subprime – qu’elles ont été méchantes et vicieuses.
C’est dans le passé qu’a pris naissance la situation scandaleuse et asymétrique.
Une précision. Vous entendez les médias dire que l’on passe sans cesse du risk-on au risk-off.
C’est imbécile : la situation ne change pas.
Elle est toujours incertaine et dangereuse, il y a toujours besoin de supporter une masse colossale de dettes. Il y a toujours besoin de produire XXXX milliards par an de nouvelles dettes, ce qui signifie que l’on est toujours et que l’on sera toujours en risk-off.
Ce qui change, c’est l’affirmation et la réaffirmation périodique par les autorités qu’elles sont là, qu’elles protègent les marchés et que le système financier peut jouer, spéculer et s’enrichir à l’abri du parapluie qu’elles fournissent.
Le marché n’est jamais en risk-on et il sera toujours en risk-off jusqu’à la crise finale… mais il y a des moments privilégiés où, les autorités ayant réaffirmé leur présence et celle du parapluie, il est possible de vivre des épisodes qui passent pour du risk-on.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]