Par Frédéric Laurent (*)
Monsieur le Marché attendait impatiemment une baisse majeure des taux d’intérêt, seule donnée économique permettant d’espérer sortir de la crise. Ce fut chose faite : le 4 décembre, la BCE a baissé de 75 points de base son taux directeur, le portant ainsi à 2,50%, le plus bas taux depuis mars 2006.
Vous avez compris pourquoi : le but est de favoriser la circulation de l’argent, le crédit, et donc de donner une bouffée d’air aux entreprises et aux consommateurs au bord de l’asphyxie. Mais encore faudrait-il que les banques suivent, répercutent ces baisses et facilitent à nouveau les crédits quand vous, ou les entreprises, en avez besoin.
Cette baisse des taux suffira-t-elle ?
Nous attendons des réponses politiques fortes afin de moraliser le capitalisme financier sans tomber dans un anticapitalisme primaire, ni dans un protectionnisme primaire — notre salut étant d’utiliser au mieux la mondialisation.
Dans les autres pays proches, la menace est sans doute perçue différemment. La Suède n’a pas hésité à baisser de 175 points de base son taux directeur, le ramenant à 2%, et la Banque d’Angleterre, elle, l’a baissé de 100 points de base pour le ramener à 2% — son plus bas niveau depuis 1939 ! Monsieur Trichet insinue même que les anticipations de ralentissement de l’inflation (anticipée à 1,50% l’an prochain) lui laisseraient les mains libres pour ramener son taux jusqu’à 1,50% d’ici mars. Il lui reste donc 100 points de base de marge de manoeuvre. Mais encore une fois, les pays européens agiront-ils de concert ?
Le problème est bien plus profond : qui devra sortir de l’Union européenne ?
Depuis un an et demi maintenant, nous avons vu que chaque pays de l’Union européenne agit dans son intérêt propre. France et Allemagne s’opposent sur la stratégie à tenir. Est-ce que l’Europe montre la limite de ses pouvoirs ? Avec de telles disparités, comment l’euro va-t-il résister à la crise ?
Certains pays sont à la limite au niveau des dettes accumulées. Doivent-ils sortir de la Zone euro et revenir à leurs anciennes devises en les dévaluant ? Réponse sans doute en 2009. En attendant, en tant qu’investisseur, tenez-vous à l’écart de tous les fonds obligataires investis sur des emprunts d’Etats de pays comme la Grèce ou l’Italie dans un premier temps. L’euro flanche, les taux d’intérêt baissent, et si ces pays venaient à être sanctionnés par l’UE, ils en seraient fortement dépréciés.
L’Empire du Milieu déclare la guerre des changes
La baisse du yuan ne vous aura certainement pas échappé. Alors que depuis des mois les économies internationales insistent sur le niveau jugé sous-évalué du yuan, voilà que la Chine est tentée par une dévaluation de sa monnaie afin de favoriser sa propre croissance. Déjà qu’elle possédait un avantage redoutable sur le marché de l’export, la voilà qui laisse filer sa devise par rapport au dollar. Provocation vis-à-vis du nouveau président Obama, ou test vis-à-vis d’une éventuelle envie de protectionnisme ?
En tous les cas, je suivrai l’affaire de très près car pour surmonter la crise actuelle, c’est bien d’une réévaluation du yuan dont le monde a besoin. Evidemment, la Chine oeuvre pour elle, mais cela pourrait devenir une nouvelle source de problèmes majeurs.
Nous verrons pourquoi dès demain…
Meilleures salutations,
Frédéric Laurent
Pour la Chronique Agora
(*) Diplômé d’un DESS de Gestion Internationale de Fortune, Frédéric Laurent exerce ses activités de conseil et de gestion depuis une vingtaine d’années. Il a choisi de se mettre efficacement au service de l’investisseur particulier – bien souvent mal conseillé par les institutionnels. C’est dans ce but qu’il a rejoint les Publications Agora en intervenant régulièrement dans la rubrique Patrimoine de Vos Finances – La Lettre du Patrimoine.