Le système est fichu selon quasiment tous les critères… et pourtant, il tient bon. Comment est-ce possible, et est-ce que cela peut durer encore longtemps ?
Le maintien en vie de la monnaie et de ses avatars financiers comme la Bourse produit le besoin de sa destruction future.
La solution de la financiarisation comme solution aux problèmes de l’accumulation et de ses limites tels qu’ils ont surgi dans le milieu des années 60 – cette solution de la financiarisation a produit l’impossibilité de continuer le système ancien fondé sur l’inflation continue douce.
Avec la financiarisation, on a trouvé une solution, certes, mais c’est une solution qui détruit le mode d’ajustement ancien qui se produisait grâce à l’inflation douce, continue.
En effet, si on financiarise, on doit maintenir la confiance dans les actifs financiers, on doit faire en sorte que les taux d’intérêt ne montent pas – au contraire, il faut qu’ils baissent toujours ; on doit produire un cycle très long de baisse des taux quasi en continu.
Ce cycle n’est possible que si et seulement si… il n’y a plus d’inflation ! D’où la surexploitation des salariés, les délocalisations, la globalisation, le remplacement des hommes par les machines – tout cela empêche l’inflation.
On triche avec les limites
Ce cycle de baisse des taux est obligatoire pour maintenir la demande d’actifs financiers puisque l’offre ne cesse de gonfler. Au point qu’un jour on bute sur… la limite du zéro !
Certes, on peut tricher un peu, se maintenir sur le zéro nominal et faire baisser le taux réel, mais cela ne dure qu’un temps car le besoin de passer aux taux franchement négatifs pour maintenir la pyramide financière ne cesse de croître.
Nous sommes dans cette phase.
Un lecteur fait la remarque à propos d’un texte du grand rebelle Marc Faber (analyste en investissement et rédacteur du Doom, Boom & Gloom Report), déplorant qu’il est toujours pessimiste et que cela dévalorise son travail.
Je m’insurge contre cette remarque. Faber est pessimiste pour une raison simple : la situation s’aggravant de plus en plus, le système devenant de plus en plus fragile, on se rapproche sans cesse de sa destruction.
Comment se départir de son pessimisme dans ces conditions ?
Cette destruction, c’est vous qui la subirez.
Pessimisme
Comment et pourquoi Marc changerait-il d’avis alors que la pente devient plus en plus forte et glissante, comme en ont témoigné les événements de mars 2020?
Le fait que Marc ne cherche pas à fixer un calendrier est normal et raisonnable de sa part.
Pour ma part, je suis radicalement pessimiste – et même beaucoup plus que Faber –, mais il y a un « mais », un grand « mais » : je ne cesse de justifier mon pessimisme… et en même temps j’affirme que le seul pouvoir des élites et de leurs apprentis sorciers est de retarder l’inéluctable.
Je prends mes précautions à cause de ma méthode de travail qui est une méthode journalistique. Je constate un fait et ce fait m’interpelle : le système tient.
Il tient bon alors qu’il devrait chuter et sombrer. C’est un mystère. L’analyse de ce qui fait mystère constitue ma valeur ajoutée et, finalement, c’est ma capacité à montrer en même temps :
– que le système est foutu et condamné et que vous serez ruiné…
… Mais…
– que les subterfuges, les ruses, sont à l’œuvre et qu’il y en a encore beaucoup à la disposition des élites. Leur arsenal n’est pas vide. Cela peut encore durer.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]