Par Isabelle Mouilleseaux (*)
Qui prendra le relais ?
Les entreprises ne pourront pas éternellement tailler dans le vif. De même les stocks finiront bien par atteindre un niveau satisfaisant. Or tous ces plans de relance qui soutiennent artificiellement — mais si salutairement ! — la consommation, auront une fin. Et la question centrale reste : qui prendra le relais pour soutenir la croissance ?
1. Les consommateurs américains ?
Qui génèrent à eux seuls 70% du PIB américain ! Permettez-moi d’avoir des doutes. Si vous étiez obnubilé par une montée explosive du chômage, sur endetté de surcroît, et sans la moindre épargne devant vous, que feriez-vous ? Iriez-vous vous jeter sur des crédits à la consommation pour consommer un peu plus encore ? Non. Vous n’auriez qu’une seule idée en tête : épargner pour vous protéger des coups durs à venir… C’est ce qu’ils font d’ailleurs.
Voilà pourquoi j’ai du mal à imaginer que le consommateur américain puisse à nouveau être le moteur de la croissance mondiale à venir, comme il l’a été ces dernières années. Il est "gavé" et doit d’abord se désendetter. L’ennui est que cela peut prendre du temps…
2. Les entreprises ?
En effet, elles pourraient investir, repartir de l’avant, se mettre à recruter et développer de nouveaux projets, partir à l’assaut de parts de marchés… C’est le moteur qui fait habituellement tourner les économies japonaise et allemande par exemple. Mais voilà, elles n’ont qu’une chose en tête : réduire les coûts par quelque moyen que ce soit, et assurer le refinancement des lignes de crédit qui arrivent à échéance…
Sans compter qu’obtenir un crédit auprès de son banquier en ce moment, et dans des conditions décentes de surcroît, relève du parcours du combattant. Les banques ont un besoin urgent de se recapitaliser. Elles font payer leurs services au prix fort ! Et trient les candidats sur le volet.
3. L’Etat ? Encore ? A coups de déficits et d’endettement ?
Après tout… Si les deux autres moteurs de la croissance ne fonctionnent pas, il reste toujours celui-là ! Refaire des plans de relance, continuer de "perfuser" l’économie pour la maintenir à flots, creuser les déficits, imprimer des billets… c’est si facile !
Partir sur cette voie revient à creuser notre propre tombe, car ce sera source de dépréciation massive des monnaies, dollar en tête, avec risque d’implosion du système monétaire planétaire déjà fortement sous pression. Ce sera source d’inflation galopante, avec flambée des cours des matières premières et toutes les conséquences que cela implique, socialement et économiquement.
C’est surtout reporter une charge écrasante sur les générations futures qui seront déjà confrontés aux conséquences financières des dérèglements climatiques et à la charge des retraites à venir.
Quant aux pays émergents sur lesquels tant d’espoirs résident, ils sont dans la même situation que nous, et n’ont pas de demande intérieure suffisante qui puisse faire office de moteur de croissance.
Alors rebond technique ou reprise pérenne ?
Rebond technique certainement. Reprise pérenne, je n’en suis pas encore convaincue.
Voilà pourquoi peut-être Nouriel Roubini pronostique une reprise en W… Je vais tenter de trouver son article récemment paru à ce sujet pour en avoir le coeur net. Si aucun des moteurs de la croissance ne peut prendre le relais des plans de relance, l’hypothèse d’une récession en W est plus que réaliste.
Quoi qu’il en soit, ce n’est à mon avis pas le moment de rentrer sur les marchés actions si vous avez une optique moyen long terme. Cantonnez-vous au trading court terme. Il est fort probable que la hausse actuelle soit alimentée par les investisseurs rongés par les remords de n’avoir pas su saisir le train au bon moment, et qui se disent aujourd’hui : j’y vais.
Une aubaine pour les investisseurs entrés tôt sur le marché qui prennent à présent leurs bénéfices…
Meilleures salutations,
Isabelle Mouilleseaux
Pour la Chronique Agora
(*) Isabelle Mouilleseaux rédige chaque jour l’Edito Matières Premières & Devises (Publications Agora), une lettre internet gratuite consacrée au marché des matières premières. Passionnée depuis toujours par la Bourse et par tous les marchés financiers, Isabelle s’est spécialisée dans les matières premières et veut permettre à l’investisseur particulier de découvrir et de comprendre l’investissement sur ce marché des matières premières.
L’Edito Matières Premières & Devises est bien plus qu’une chronique quotidienne. C’est un pôle d’activités centré sur les matières premières qui vous donne les moyens de suivre et de maîtriser ces marchés ! Vous pouvez recevoir gratuitement l’Edito Matières Premières & Devises en cliquant ici.