Depuis des années, nous lançons cette mise en garde : si vous dépensez l’argent que vous n’avez pas, l’inflation arrivera… et cette inflation entrainera inévitablement une récession.
Nous savourons l’élégante symétrie de la vie réelle :
« Le dollar flambe à un plus haut sur 20 ans, dans un contexte où les investisseurs parient sur les décisions de la Fed », clame un titre du Financial Times, en page 7.
Parallèlement, voici ce que l’on apprend en page 11 :
« Le yen chute à un plus bas sur 20 ans dans un contexte où la Banque du Japon rejette une hausse des taux ».
On récolte ce que l’on a semé. Ce qui grimpe dégringolera. Tout acte entraine une réaction équivalente et opposée.
Ce genre de choses.
Nous nous délectons également de cette rare satisfaction : on nous donne raison. L’inflation est arrivée.
Oui… cher Lecteur. Cela n’arrive pas très souvent. Depuis des années, nous lançons cette mise en garde : si vous dépensez l’argent que vous n’avez pas, l’inflation arrivera… et cette inflation entrainera une récession.
Mais c’est comme être gentil avec ses grands-parents. Il faut toute une vie – jusqu’à ce que l’on devienne soi-même grand-père ou grand-mère – pour en apprécier l’importance.
Des contractions douloureuses
Il y a quelques jours, les Etats-Unis ont annoncé que l’économie reculait, désormais.
Selon Busines Insider :
« L’économie américaine s’est contractée pour la première fois depuis le début de la pandémie, alors qu’une inflation historique s’est abattue sur la reprise économique par ailleurs vigoureuse.
Le produit intérieur brut du pays a reculé de 1,4% en rythme annuel, au premier trimestre, selon le Département du Commerce. Les économistes interrogés par Bloomberg ont maintenu une estimation médiane de 1,1% de croissance sur cette période. Ce chiffre montre que la reprise ralentit énormément, par rapport aux 6,9% enregistrés au quatrième trimestre. »
Naturellement, l’équipe Biden n’a pas vu arriver le marasme. Pas plus qu’elle n’a vu arriver l’inflation, d’ailleurs. On s’étonne que ses membres parviennent à traverser la rue sans se faire renverser : ils ne voient rien venir.
Mais ils gardent sous la main tout un catalogue d’explications malhonnêtes, juste au cas où…
Selon Bloomberg :
« Le président Joe Biden a imputé la première contraction économique survenant aux Etats-Unis depuis 2020 à des ‘facteurs techniques’, déclarant que l’emploi, les dépenses de consommation et l’investissement demeuraient tous vigoureux.
‘L’économie américaine – sous l’impulsion des ménages actifs – continue de bien résister face à des défis historiques’, a déclaré Biden. ‘Même si la croissance du trimestre dernier a été affectée par des facteurs techniques, les Etats-Unis font face aux défis du COVID-19 dans le monde entier, à l’invasion non provoquée de l’Ukraine par la Russie, et à l’inflation mondiale en partant d’une solide position’ ».
Il n’y a là rien de technique. Les gens ont moins d’argent à dépenser. Et les salaires progressant d’environ 3 points de pourcentage de moins que l’inflation, les gens ont moins de pouvoir d’achat.
Lorsque les gens ont moins d’argent à dépenser, ils dépensent moins. Et comme ces dépenses représentent 70% du PIB, on peut s’attendre à ce que l’économie se contracte quand elles diminuent.
Et il n’y a là rien de surprenant, non plus. Les économistes de plusieurs grandes banques – ainsi que l’ex-Secrétaire du Trésor américain, Larry Summers – ont tous dit qu’une récession était inévitable.
Il n’y pas de magie. Il n’y a pas de chance. Il y a symétrie. La Fed a dopé l’économie. Et à présent, elle débranche la musique.
Parallèlement, au lieu de faire reculer l’inflation, les Japonais « augmentent le volume », quant à eux.
Selon CNBC :
« La Banque du Japon a déclaré mercredi qu’elle avait décidé de proposer le rachat d’un nombre illimité d’obligations souveraines japonaises à 10 ans à 0,25%, troisième mesure depuis le mois de février visant à défendre son objectif de rendement.
La hausse des rendements intervient alors que le yen chute à un plus bas sur vingt ans face au dollar, obligeant les marchés à tester l’engagement de la banque centrale vis-à-vis de sa très accommodante politique de contrôle de la courbe des rendements. »
Quelle merveilleuse expérimentation ! Quelle opportunité d’apprentissage ! C’est « l’inflation ou la mort », pour les banques centrales, dans le monde entier. Les Japonais, bénis soient-ils, optent pour « l’inflation ». Le yen s’apprécie alors qu’ils signalent qu’ils vont le laisser mourir plutôt que renoncer à leur programme de rachat d’obligations ballot.
La Fed, du moins pour l’instant, prend le pari opposé. Elle déclare qu’elle va « retirer le saladier de punch » et que la fête est finie.
Déjà, l’Indice Dow Jones Industrial Average a perdu 8% cette année. Quant au Nasdaq, où se trouvent les valeurs technologiques surévaluées, il est en baisse de 20%. Ces indices masquent les véritables dégâts. Les actions lambda sont en baisse de 40%. Mais le dollar – anticipant la hausse des taux – s’apprécie.
Selon Bloomberg :
« L’un des indicateurs Bloomberg du billet vert a bondi à son plus haut niveau sur près de deux ans, et progressé de 4,5% ce mois-ci, en passe d’enregistrer sa meilleure performance depuis mai 2012. Le dollar a grimpé face au yen, atteignant un plus haut sur 20 ans, après que la Banque du Japon a maintenu ses taux d’intérêt à un niveau ultra bas pour défendre sa politique monétaire accommodante. Voilà qui tranche avec la Réserve fédérale qui annonce un relèvement des taux agressif en vue de combattre l’inflation. »
Que va-t-il se passer, ensuite ? Qui sera le gagnant ?
Qui fléchira la première ? La Banque du Japon ou la Fed ?
Est-ce que la Fed sera capable de respecter son « programme de resserrement » ?
Ou est-ce que la Banque du Japon sera obligée de se faire hara-kiri, une sorte de suicide rituel de banque centrale, où elle expierait 30 ans de manipulations stupides ?
A suivre…
2 commentaires
Je ne comprends pas, tant que le chômage n’augmente pas, les gens ont toujours autant à dépenser, c’est ce qu’ils obtiennent pour cette somme qui diminue et cela n’impacte pas le PIB
Alain, pour calculer la croissance, le pib est corrigé de l’inflation. Il diminue donc.
Demandez aux Vénézuélien ou Libanais s’ils ont de la croissance. Et pourtant, ils sont tous devenus multimillionnaire en monnaie local, et ont n’ont pas « toujours autant », mais « bien plus » à dépenser.
Mais d’une année sur l’autre, inflation déduit, ils s’appauvrissent. Le pib reflète cet appauvrissement.