** Nous parlions hier des chiffres — et du fait qu’on peut leur faire dire n’importe quoi. Nous en avons trouvé la preuve dans un article de John Crudele, dans les pages du New York Post :
* "Le problème c’est que le PIB [US] s’est développé aussi rapidement uniquement parce que le gouvernement a organisé, d’une manière ou d’une autre, une chute de l’inflation".
* "Selon les chiffres du département du Commerce US, l’inflation n’était que de 0,8% au troisième trimestre".
* "Lorsqu’on regarde la véritable croissance économique — c’est-à-dire après inflation — chaque baisse de l’inflation génère une hausse de la croissance économique".
* "Le taux d’inflation était de 2,6% au deuxième trimestre 2007 et 4,2% au premier trimestre de cette année. Wall Street attendait 2% d’inflation cette fois-ci".
* "Une inflation à un taux de 0,8% seulement serait très certainement la bienvenue — si seulement elle était crédible".
* "Mais il y a encore moins crédible : le fait que l’inflation ait chuté à pic alors que les prix du pétrole se dirigeaient vers les 90 $ le baril — un seuil qu’ils ont désormais dépassé".
* "En réalité, donc, la croissance économique est probablement bien plus lente que les chiffres annoncés. Et l’inflation est bien plus élevée".
* Nous sommes convaincu : la réalité et les chiffres ne vont plus de concert. Peut-être même que ça n’a jamais été le cas.
** Voici quelque chose d’intéressant… La semaine dernière, Wal-Mart a affirmé avoir comblé la "fracture numérique" en offrant un ordinateur pour moins de 200 $. Oui, cher lecteur, c’était un grand jour pour nous autres à la Chronique Agora. Dorénavant, n’importe qui ayant 200 $ en poche pourra lire ce que nous écrivons. C’est également un grand pas pour la société, déclarent les commentateurs, parce qu’à présent, nous aurons "l’égalité numérique" — c’est-à-dire que tout le monde peut accéder à toutes les informations, les actualités et les opinions numériques disponibles.
* De toutes les idées idiotes de ces dernières années, la "fracture numérique" faisait partie des plus fêlées. Sans accès à internet, disait-on, vous seriez laissé en arrière… condamné à vivre dans la misère et l’obscurité toute votre vie.
* Mais que font vraiment les gens lorsqu’ils ont un ordinateur ? Se rendent-ils sur des forums pour échanger des interprétations de la Critique de la Raison Pure de Kant ? Commencent-ils à lire le récit de la bataille de Pydna écrit par Posidonius… ou cherchent-ils des solutions au dernier théorème de Poincaré ? Non, ils jouent au poker… ils regardent des vidéos ineptes… ou visitent des sites pornographiques. En d’autres termes, combler la fracture numérique n’améliore pas les gens ; cela leur permet simplement de s’adonner plus encore à l’oisiveté.
* La liste de gens célèbres et prospères n’ayant jamais posé les yeux sur un ordinateur est aussi longue que l’Encyclopedia Britannica. Et aujourd’hui encore, bon nombre de gens intelligents et ayant parfaitement réussi les considèrent comme des distractions tout juste bonnes à perdre du temps.
* Mais nous commençons à déblatérer, pas vrai ? Revenons-en au vif du sujet — de quoi s’agissait-il, déjà ?
* Ah oui… l’inflation des prix et la perfidie des nombres. Eh bien… que croyez-vous que les employés du département du Commerce pensent des ordinateurs à 199 $ de Wal-Mart ?
* Nous n’en savons rien non plus… mais nous pouvons faire des suppositions.
* Il y a des années de ça, les ronds-de-cuir qui torturent les chiffres pour le gouvernement ont décidé qu’ils devaient faire quelques ajustements pour améliorer la qualité. La théorie était assez simple : si le prix d’une chose reste le même, mais que la chose elle-même a plus de valeur… c’est comme si son prix avait baissé. L’ordinateur est arrivé, et les prix se sont effondrés. Les gens dépensaient toujours autant, mais chaque année, les ordinateurs devenaient plus puissants. Chaque année, les consommateurs d’informatique en avaient plus pour leur argent… donc, en théorie, le coût de la vie baissait (même si, en réalité, il grimpait).
* Et voilà un ordinateur dont le prix est réellement plus bas. 199 $ — un chiffre qu’on n’a même pas besoin de triturer à la baisse. O bonheur ! Avec les manœuvres d’amélioration de qualité, cet ordinateur — selon le département du Commerce — coûte probablement moins que rien ! Lorsqu’ils en auront terminé, il sera sans doute pris en compte dans le calcul de l’inflation comme un ordinateur gratuit offert avec une année de pétrole en prime.
** "J’envisage d’acheter une maison aux Etats-Unis", nous disait un Français lors d’un dîner récemment. "Les prix sont si bas, ça pourrait être une bonne occasion. Vous ne me croirez peut-être pas, mais lorsqu’on rentre dans quasiment n’importe quelle agence immobilière à Paris, on trouve des maisons à vendre en Floride. Et c’est incroyable tout ce qu’on a… une maison avec vue sur la mer et piscine… dans la région de Tampa — pour seulement 300 000 $. On ne pourrait rien avoir de semblable en France, pour cette somme".
* "Ce qui nous étonne souvent, en Europe, c’est que les Américains n’ont pas vraiment beaucoup d’argent. Ils en gagnent beaucoup… ou ils en ont beaucoup gagné… mais ils n’ont pas grand’chose pour le prouver. Je connais des gens en Californie qui ont des salaires très élevés. Ici en Europe, même avec nos prix très hauts, vous pourriez vivre très bien en gagnant ce genre de sommes. Mais les Américains ont des enfants dans des écoles privées… ils paient une fortune en assurance santé… et ils ont ces prêts immobiliers gigantesques. Après avoir payé tout ça, il ne leur reste plus grand’chose".