Les autorités sont prêtes à tout pour « relancer » la croissance – tant pis si le concept même de relance est une escroquerie totale…
Tout frais sorti de l’hôpital, lundi dernier, le président des Etats-Unis a mis fin aux négociations autour du plan de soutien.
Nous avons été surpris. Nous pensions que l’équipe Trump ne voudrait pas plus s’interposer entre les électeurs et leur argent gratuit qu’entre un doberman affamé et un beau steak…
Mais une fois mercredi arrivé, les couards de l’entourage de Trump lui avaient clairement fait passer le message : « Hé, vous prenez du retard dans les sondages. »
Quelques heures plus tard, le président jetait de la viande à pleines mains. Il a déclaré être « prêt à signer » pour distribuer 1 200 $ par électeur.
Une escroquerie totale
En tant que mesure de « relance », c’est une escroquerie totale. Tout ce que cela relancera vraiment, ce sont les traders Robinhood, les dealers de drogue du quartier, les détaillants internet… et l’inflation.
Cependant, cette fausse monnaie, fournie sous de faux prétextes, pourrait donner aux électeurs un faux sentiment de sécurité. Les économistes regarderont alors les dépenses qui suivront inévitablement – et qui selon eux représentent 70% du PIB – et diront : « Sapristi… quelle reprise ! »
Si on pouvait réellement « relancer » la croissance en larguant de l’argent par hélicoptère, les cieux en seraient pleins.
Même en tant que mesure de « soutien » – aux pauvres Américains qui « travaillent dur » et qui ont perdu leur emploi et leurs revenus suite au confinement Covid-19 –, ces chèques sont une fraude.
Le taux de chômage officiel aux Etats-Unis n’est que de 8%. Si c’est vrai, cela signifie que 92% de la main d’œuvre est encore au travail. Pourtant, M. Trump se propose d’envoyer 160 millions de chèques – portant tous son nom.
En d’autres termes, le Grand Bienfaiteur enverrait 1 200 $ par tête à environ 150 millions de personnes ayant encore un emploi. Comme mesure de soutien d’urgence !
Larguez les bombes !
Le président ne s’en est pas tenu là. Il a également proposé de donner immédiatement quelque 25 Mds$ au secteur du transport aérien.
Pourquoi ?
Parce que les quatre grandes compagnies aériennes US – American, Delta, Southwest et United – tiennent environ 50 000 employés par les pieds… et menacent de lâcher prise.
En collusion avec leurs syndicats, elles affirment que soit elles obtiennent de l’argent du gouvernement… soit elles larguent les bombes.
La dernière fois que les travailleurs de l’air ont fait du chantage au gouvernement US, on était le 3 août 1981, quand les contrôleurs aériens se sont mis en grève. Ils voulaient plus d’argent, moins d’heures… bref, les réclamations habituelles.
A la place, Ronald Reagan leur a donné 48 heures pour se présenter à leur poste. Ceux qui ne l’ont pas fait – ils étaient 11 000 – ont été licenciés. Pas de suspension. Pas de petite tape sur la main. Ils ont perdu leur emploi – de manière permanente. Pas de questions, pas de discussion. Les avions ont continué à voler. De nouveaux contrôleurs ont été engagés. Problème résolu.
Cette fois-ci, aucun problème ne sera résolu. Le président n’a pas défié les maîtres-chanteurs… il leur a cédé.
Vraie menace…
De toutes les choses idiotes qui ont été faites avec l’argent public, cela doit faire partie des plus bêtes. C’est toutefois une phase naturelle et inévitable du capitalisme mûr et dégénéré.
Pour commencer, le gouvernement détruit le vrai capitalisme. Ensuite, il soutient un ersatz de capitalisme. Les entreprises… le gouvernement… les dirigeants et les dirigés – tous sont altérés par une nouvelle réalité.
Prises ensemble, les quatre grandes compagnies aériennes américaines ont empoché environ 13 Mds$ de trésorerie disponible durant les six dernières années. On pourrait croire qu’elles auraient gardé un peu de cet argent… au cas où elles se retrouveraient face à des vents contraires.
Non. A la place, elles ont dépensé jusqu’au dernier centime et – leur réalité ayant été altérée par les taux d’intérêt ultra-bas de la Fed – ont emprunté 14 Mds$ supplémentaires pour acheter leurs propres titres (récompensant ainsi leurs actionnaires).
A présent, manquant de capital propre, elles se tournent vers les autorités pour être renflouées… et menacent de jeter leurs salariés par-dessus bord si l’argent ne leur arrive pas.
… Et vraies pertes
Pourquoi le public devrait-il payer pour plus d’employés que ce dont le secteur a besoin ?
Donner de l’argent à quelqu’un pour faire quelque chose qui n’a pas de réelle valeur – gérer un programme anti-pauvreté… attaquer l’Irak… fournir des services de relations publiques à un sénateur… assister à une conférence sur le dérèglement climatique… verser des prêts dans le cadre du programme PPP… siéger au conseil de la Réserve fédérale – cela revient à peu près à le jeter par les fenêtres.
Attendez une minute… c’est de la fausse monnaie, de toute façon. Quelle différence est-ce que cela fait ?
Certes, mais… même de la fausse monnaie peut être utilisée pour acheter des choses.
La monnaie n’est que la mesure de la perte. La perte réelle, c’est le temps, la nourriture, le carburant, les places de parking, les machines et toutes les autres choses qui sont utilisées et consommées.
Celles-là sont réelles… et ne peuvent pas être récupérées. Le temps passe. Il ne revient pas.
Toujours plus d’argent distribué
Mais à mesure que la semaine avançait, l’altération est devenue de plus en plus claire. Personne au gouvernement – républicains ou démocrates – ne se soucie de gaspiller de l’argent… du temps… ou quoi que ce soit d’autre.
Tous semblent plutôt avoir hâte de dilapider ce qui reste de la solvabilité du pays.
L’homme de Trump au Trésor US, Steven Mnuchin, a déclaré jeudi dernier qu’il était prêt à augmenter le montant du plan de soutien.
Il valait la peine de laisser les démocrates gagner cette manche, a-t-il semblé dire, si cela signifiait que l’argent serait chez les électeurs avant novembre.
Puis, vendredi, le président lui-même a sorti des steaks encore plus épais. Bloomberg :
« Trump déclare qu’il veut une plus grande relance que ce qu’offrent les démocrates.
‘J’aimerais voir un plan de relance plus grand, franchement, que ce qu’offrent les démocrates ou les républicains’, a déclaré Trump durant [une émission de radio], disant qu’il allait dans une direction ‘diamétralement opposée’ à ses positions précédentes.
‘Je vous dit quelque chose que je ne dis à personne d’autre, parce que peut-être que ça aide ou peut-être que ça nuit aux négociations’, a dit Trump […]. ‘Je voudrais voir un plan plus important’. »
Eh bien… quel homme ! Quelle semaine !
Quel pétrin sans issue !