La création monétaire a un prix : pour l’instant, la facture n’est pas encore tombée… mais l’arrivée du coronavirus menace de rapprocher l’échéance.
L’inflationnisme que je vous décris depuis maintenant plusieurs dizaines d’années, c’est cela : la croyance que tous les problèmes humains peuvent être traités par la création de nouvelle monnaie tombée du ciel – et l’avilissement potentiel qui en découle pour les unités monétaires.
Certes, cet avilissement ne manifeste pas immédiatement mais il se stocke, il se met en réserve en attendant : en attendant que les peurs se dissipent, en attendant que les gens cessent d’être frileux, en attendant que l’argent circule… il se stocke dans les marchés financiers.
La hausse des Bourses, retenez mon expression, c’est de l’inflation qui se met en réserve. Inscrivez cela dans votre mémoire.
La hausse des Bourses, c’est la hernie, l’excroissance qui témoigne de la réalité de l’inflationnisme et qui, en tant que telle, constitue le coût de l’inflationnisme.
Comment, en quoi est-ce donc le coût de l’inflationnisme ?
Tout simplement parce que l’inflation ne se manifestant pas sur les prix des biens des services et des revenus, elle va gonfler les valeurs boursières, sans lien avec la réalité économique sous-jacente.
En se gonflant, les valeurs boursières s’écartent des valeurs normales, justifiées, défendables – et ce faisant, elles créent un risque colossal pour ce que l’on appelle la stabilité financière.
On en a eu un avant-goût en décembre 2018 quand en quelques jours, sur un colmatage de la plomberie boursière, les marchés ont chuté de 20%… et que tout s’est arrêté.
Comprenez bien, assimilez cela : l’inflationnisme a un coût, un coût différé. Il ne se manifeste que plus tard mais il est là, il se stocke pour l’avenir.
Ce sont les cours de Bourse qui pointent le coût de l’inflationnisme et son ampleur. Car le jour de l’addition, on verra que ce coût est énorme, destructeur.
La vraie inflation des prix des biens et des services se stocke, se met en position d’attente dans les parkings des marchés financiers parce que l’argent ne sert pas à acheter des biens et services : il sert à spéculer.
Risque de liquidation massive
L’inflation qui est stockée se manifestera après, plus tard, lorsque les valeurs boursières s’écrouleront sous leur propre poids et que les irresponsables interviendront pour stopper la chute en créant de la monnaie de base – laquelle, à ce moment-là, la confiance ayant disparu, ira à la recherche de ses contrevaleurs : les biens et les services.
C’est le potentiel d’une liquidation massive du marché qui ébranlera la confiance à un moment critique du cycle économique – tandis que la spéculation sur la reflation que tout le monde anticipe semblera de plus en plus fragile.
Oui, le coronavirus (dont nous parlions hier), espérons-le, sera finalement temporaire. Il aura un effet à court terme, mais le risque lui, est plus large ; il est constitué par l’excès créé par des politiques monétaires ultra-laxistes, lâches, et qui pousse les spéculateurs à faire preuve d’insouciance en gonflant les prix des actifs à des niveaux de valorisations insoutenables.
Ceci va laisser les banquiers centraux à court de munitions pour faire face à une véritable crise. Il n’y a pas eu de véritable crise l’année dernière ; un ralentissement tout au plus, un petit accident, mais les banquiers centraux n’étaient même pas prêts à accepter cela.
Pourquoi ? A cause de leur dépendance vis-à-vis des marchés, à cause de leur peur.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]