▪ Pourquoi s’entêter à nier que derrière une « croissance négative » et une consommation qui bat de l’aile depuis six semaines se profile une reprise fulgurante de l’économie américaine qui va nous propulser le Dow Jones à 20 000 points et le CAC 40 à 5 000 ?
Bien entendu, si tous les chiffres américains plaidaient pour un scénario économique de type janvier 2000 ou juillet 2007, ce serait trop facile : 3,5% ou 4% de croissance, ça se voit. Dans le cas présent, il faut faire preuve d’imagination.
Il faut se figurer tout l’argent déversé par la Fed depuis septembre dernier (en pure perte puisque le PIB est passé de +3% à -0,1% dans l’intervalle) ressurgir brutalement d’ici la mi-2013 dans le secteur immobilier… qui semble battre de l’aile depuis novembre.
Nous assistons à un reflux technique (baisse de l’indice NAHB, chute de 8,5% des mises en chantier aux Etats-Unis en janvier) du même type que celui précédant un raz-de-marée. Les flots se retirent avant le surgissement d’une déferlante haussière qui va balayer notre scepticisme et nos persiflages.
De même, la petite tension des taux longs américains (2,04% sur le 10 ans) constitue un signe précurseur de l’arbitrage des T-Bonds en faveur des actions (la fameuse « Grande rotation). Il ne faut pas y voir un accès de nervosité relatif aux perspectives de réduction de la dette si le Congrès à majorité républicaine reprend — comme il en manifeste régulièrement l’intention — sa guérilla contre la Maison Blanche.
▪ En Europe aussi, pas de quoi s’inquiéter !
En Europe, le suspense concernant les élections italiennes est déjà dans les cours, tout comme le défaut et la restructuration de la dette chypriote (18 milliards d’euros). Et qui serait suffisamment paranoïaque pour prétendre qu’un tel scénario plongerait le système bancaire grec, déjà à l’agonie, dans de nouvelles difficultés inextricables ?
Nous avons déjà vu pire (avec 250 milliards d’euros de restructuration), donc rien à craindre dans l’immédiat.
Et puisque « Super Mario » (Draghi) dispose de l’arme du verbe magique qui résout les crises, il n’y a pas lieu de s’inquiéter de ce communiqué du gouvernement portugais qui révise de -1% à -2% le montant de la récession anticipée en 2013 (après -3,2% en 2012).
Nous ne voyons pas comment l’Espagne pourrait en être affectée alors que l’on mesure un peu plus précisément chaque jour les enjeux colossaux et le coût potentiel — sous forme de pertes abyssales pour le pays — de l’éclatement de la bulle immobilière de 2008.
La SAREB, la structure de defeasance ibérique (ou bad bank sur le modèle français du CDR) créée à la demande des autorités européennes, n’a racheté à ce jour que 60 milliards d’euros de biens saisis ou invendus : cela représente un stock d’environ 90 000 logements.
Ce n’est qu’une goutte d’eau en regard des 200 000 logements saisis par les banques et du stock supérieur à un million de logements neufs invendus. A noter que ce dernier chiffre est une estimation de Fitch à la fin 2012… mais un chiffre de deux millions de logements inoccupés circule avec insistance depuis deux ans.
▪ En Espagne, ça va de mieux en mieux
Ce n’est pas le pire : le repli « officiel » de l’immobilier atteint 35% par rapport au sommet de la bulle — cette estimation hédoniste a permis jusqu’à présent de limiter les provisions sur pertes latentes pour les banques, sans quoi elles auraient déjà majoritairement fait faillite. Cependant, les acheteurs potentiels (souvent anglo-saxons de type « fonds vautours ») exigent une décote allant de 60% à 80% en fonction des lots immobiliers proposés.
Cela peut sembler abusif pour les vendeurs mais une proportion considérable des biens concernés sont invendables (pas achevés, sans eau courante ou pas reliés au tout-à-l’égout, ouverts à tous les vents et déjà fortement dégradés par les intempéries, pillés ou vandalisés…).
La SAREB — qui avait repris nombre d’actifs avec une décote de 50% — a déjà mis en vente 13 000 logements (soit 15% de son stock) en janvier. Les professionnels craignent un nouveau trou d’air sur les prix en 2013 si elle force l’allure.
Les stocks qu’elle détient ne sont que la partie émergée de l’iceberg : ils ne représentent que 6% des 1 200 000 logements que les banques détiennent sous forme d’hypothèque ou de biens saisis.
C’est sans compter avec les créances bancaires portant sur des centaines de centres commerciaux déserts en périphérie de quartiers fantômes et des millions de mètres carrés de bureaux inoccupés.
Fort de ce constat, Mariano Rajoy s’est légitimement réjoui hier devant le Parlement espagnol, résumant d’une formule la situation : « le naufrage a été évité ».
Avec un déficit proche de 7% du PIB en 2012 et 300 milliards de pertes immobilières latentes, à chacun de se faire son idée sur la question.
Nous avons le sentiment que c’est surtout le sens des réalités qui fait naufrage… Mais ce syndrome n’est pas plus sévère au sud des Pyrénées qu’outre-Atlantique, où la moindre statistique — bonne et surtout mauvaise — donne lieu à des interprétations complètement alambiquées dont il ressort que la crise et la récession sont bien derrière nous et que la fausse monnaie des banques centrales va faire merveille.
Des indices emblématiques comme le Russell 2000 ou le Dow Transport battent chaque jour de nouveaux records à New York. Le DT n’a d’ailleurs pas manqué d’en inscrire un 20ème consécutif à 6 021 points à l’ouverture hier.
▪ Et l’or ?
L’une des prédictions des permabulls est en train de se réaliser : face au gigantesque potentiel de hausse des actions cette année puis en 2014, les investisseurs bradent leur or.
Voici l’once qui dévisse sous les 1 600 $, et, ce qui semble plus décisif, sous le support des 1 585 $ (c’est-à-dire la base du canal baissier moyen terme).
Ceci dit, la chute de l’or jaune n’avait rien à envier à celle de l’or noir : le baril coulait à pic de -2,4% sous le support des 95 $ pour s’enfoncer jusque vers 93,8 $.
Mais pour rien au monde nous n’irions suggérer que le recul général des matières premières résulte de la prise de conscience que la croissance que l’on nous promet n’existe que dans les discours destinés à piéger les épargnants… c’est-à-dire ceux que l’on presse d’acheter des actions maintenant qu’elles sont revenues au zénith tandis que les initiés se délestent allègrement.
Quelles vilaines pensées ! Même Goldman Sachs ne saurait s’abaisser à tant de cynisme.
Comment ça, nous sommes naïfs ?
3 commentaires
La physionomie du Baltic Dry Index est des plus intéressantes, il est au plus bas depuis 5 ans, à l’exception
d’un sursaut début janvier du sans doute à une frénésie eschatologique.
Il serait intéressant le le mettre en miroir avec les grands indices internationaux.
Monsieur Bechade,
sur Bfm, à cet instant, je ris…
Un grand « spécialiste » Evariste Lefeuvre, sort des arguments tellement grotesques…. tout cela pour annoncer que tout va bien… Waouw, il est convainquant, tout va tellement bien que je ne comprends pas pourquoi le chômage augmente à nouveau aux USA, que les Philly fed se détériore encore plus et que le secteurs « home » US se replie pour terminer son rebond…
Natixis prend-t-elle les gens pour des idiots parfaits ? ou sont-ils idiots ?
Cordialement
Dans un contexte de crise économique et de taux de chômage record, le prix immobilier en Espagne a lourdement chuté depuis leur point haut atteint en 2007 et la chute n’est pas terminée.
La SAREB (structure de défaisance des actifs immobiliers toxiques des banques espagnoles – bad bank) pourrait se débarrasser d’environ 42 500 logements (8 500 logements/an) sur un total global de 76 000 unités.
Vous pouvez consulter : http://www.immobilier-finance-gestion.com
– Espagne : baisse de 8% à 15% à venir sur l’immobilier
– Achetez un village en Espagne pour le prix d’un appartement
– Espagne : baisse de 20% des prix immobiliers à venir selon S&P
– Espagne : baisse de 20% des prix immobiliers à venir selon S&P
– Immobilier Espagne : chute de 31.3% des permis de construire
…..