Derrière les récits anxiogènes, les faits montrent un monde en constante amélioration. Encore faut-il savoir distinguer les fictions inquiétantes et les réalités mesurables – un exercice essentiel, y compris pour bien investir.
Quiconque lit régulièrement ces chroniques sait que je suis un optimiste fondé sur les données.
Malgré les nombreux défis auxquels nous faisons face, la plupart des grandes tendances de long terme sont positives.
Les gens vivent plus longtemps que jamais. Le niveau de vie mondial n’a jamais été aussi élevé. Le taux d’éducation a connu une progression historique. La pauvreté mondiale recule. La criminalité violente est en déclin sur le long terme. La qualité de l’air et de l’eau s’est améliorée de manière constante depuis des décennies. La plupart d’entre nous, en Occident, vivons aujourd’hui dans des conditions de paix et de prospérité inégalées.
Et pourtant, chaque fois que je rappelle – comme je le fais régulièrement – que la plupart des choses s’améliorent pour la majorité des gens, dans la majorité des lieux, et sur la majorité des aspects, je reçois des objections de lecteurs : « Mais qu’en est-il de tous les problèmes que nous connaissons ? »
Il est vrai que nous faisons face à de nombreux défis sérieux, bien trop nombreux pour être énumérés dans une seule chronique.
Il est impossible de l’ignorer. Comme vous, je regarde les informations.
Mais trop peu de gens adoptent une posture réellement sceptique vis-à-vis de la manière dont les médias grand public présentent l’état du monde.
Beaucoup, au contraire, estiment que le tableau n’est pas encore assez sombre – et cela même si leurs propres conditions de vie sont, bien souvent, largement positives.
Trop nombreux sont ceux qui oublient aussi de réfléchir à la nature universelle des problèmes… et aux progrès spectaculaires accomplis pour les résoudre.
Tout commence par des récits apparemment crédibles, mais profondément erronés. Permettez-moi de vous en donner un exemple…
Les médias, dans leur grande majorité, proposent un récit sur l’état du monde qui semble tout droit sorti du manuel du Mouvement romantique vert.
Cela ressemble à quelque chose comme ceci :
Nous vivons sur une planète qui, pendant des millions d’années, nous aurait offert un système de survie idéal.
Nos ancêtres bénéficiaient du soleil, d’une eau pure, d’une nourriture saine, à condition de la chasser ou de la cueillir.
Mais, en développant nos sociétés modernes – à travers la construction, l’industrie, le consumérisme –, nous aurions gâché ce paradis naturel, au détriment de notre propre qualité de vie.
Or, presque chaque élément de ce récit est faux. A l’exception notable du soleil, qui – comme vous l’avez sans doute remarqué – continue de briller.
La Terre n’était pas un paradis pour les premiers Homo sapiens. Elle ressemblait bien davantage à un piège mortel permanent. Par exemple, bon nombre de lecteurs vivent aujourd’hui à des latitudes où, par une nuit d’hiver typique, ils mourraient en quelques heures sans vêtements appropriés, sans véhicules, sans bâtiments, sans aucune des technologies humaines modernes.
Qualifier des températures glaciales d’ »environnement de survie idéal » est pour le moins absurde.
Certes, la Grande Vallée du Rift, en Afrique de l’Est – berceau de notre espèce – offrait un climat nettement plus clément.
Mais nos ancêtres n’avaient ni accès à une eau potable sûre, ni à des logements confortables, ni, bien entendu, aux soins médicaux, même rudimentaires.
L’environnement naturel était infesté de prédateurs, de parasites et d’organismes pathogènes. Il blessait, empoisonnait, affamait et rendait les hommes malades.
Dans la nature, l’être humain n’est ni particulièrement fort, ni rapide, ni habile à se camoufler, ni même un nageur compétent.
Nous étions des proies faciles pour les tigres à dents de sabre, les crocodiles du Nil et d’autres charmantes créatures de ce « système de survie idéal ».
La plupart des enfants ne survivaient pas à la petite enfance – les maladies étant la principale cause de mortalité.
Quant à l’idée même de retraite, elle était si étrangère qu’elle ne relevait même pas du domaine du fantasme : la grande majorité de nos ancêtres mouraient bien avant l’apparition des rides.
La plupart n’atteignaient même pas l’âge de 30 ans, succombant à ce que nous appellerions aujourd’hui des « causes non naturelles » – bien que, pour l’époque, cela fût parfaitement « naturel ».
Certains pourraient rétorquer que si la nature est dure envers les humains, elle est au moins clémente avec les autres espèces.
Vraiment ?
La plupart des animaux sauvages vivent des existences brèves, angoissées et misérables, constamment menacés par les éléments, les prédateurs, les maladies et l’échec reproductif.
Et leur fin est souvent brutale et atrocement douloureuse.
Je l’ai constaté récemment, en observant un faucon à queue rousse se poser sur une branche devant la fenêtre de mon bureau, tenant un écureuil dans ses serres. Je revois encore la scène : il arrachait la chair sanglante du corps de l’animal et en avalait les morceaux.
Voilà notre biosphère en action. (Le poète Alfred Tennyson n’a pas qualifié la nature de « rouge de crocs et de griffes » par hasard.)
Ou encore, pensez aux guêpes parasitoïdes : ces insectes injectent leurs œufs dans des chenilles. Quand les larves éclosent, elles consomment progressivement les fluides corporels de l’hôte, en évitant soigneusement ses organes vitaux pour le maintenir en vie le plus longtemps possible… avant de le tuer en sortant de son corps.
Ah, l’harmonie exquise de la nature.
De fait, au fil des millénaires, le monde naturel est devenu encore plus cruel pour les animaux.
Les scientifiques estiment que, depuis l’apparition de la vie sur Terre, environ 10 espèces disparaissent chaque année en moyenne – un chiffre qui grimpe considérablement lors des « événements d’extinction massive ».
La vitesse à laquelle de nouvelles espèces apparaissent a, en moyenne, tout juste compensé celle des extinctions.
Résultat : plus de 99 % de toutes les espèces ayant jamais existé sont aujourd’hui éteintes. Des analyses génétiques suggèrent même que notre propre espèce, Homo sapiens, a failli disparaître.
Quant à nos proches cousins, comme les Néandertaliens, ils ont été rayés de la surface de la Terre.
Notre environnement naturel soi-disant « parfait » les a tout simplement anéantis.
Vous vous demandez peut-être ce que tout cela a à voir avec l’investissement.
La réponse est claire : c’est essentiel. Trop de gens acceptent des récits mensongers, appuyés par de mauvaises explications.
Et cela a des conséquences catastrophiques dans le domaine de l’investissement : ils placent leur argent dans de mauvaises idées… et passent à côté des meilleures.
Il est crucial de comprendre que c’est le savoir humain – renforcé par la révolution scientifique, la révolution industrielle, l’état de droit et le capitalisme – qui rend notre planète, à peine, habitable pour les êtres humains.
Ces avancées ont considérablement prolongé et amélioré nos vies.
Mais qu’en est-il de tous les problèmes ?
Des problèmes – graves – ont toujours existé. Et il y en aura toujours.
Dans ma prochaine chronique, j’expliquerai pourquoi c’est une bonne chose… et comment ces problèmes créent souvent les meilleures opportunités d’investissement.