Une réduction du chômage par le biais d’une hausse des dépenses publiques permet-elle vraiment de stimuler la croissance de l’économie ?
Certains experts soutiennent que l’amélioration de la situation sur le marché du travail constitue la clé du retour à la croissance économique. Ce raisonnement repose sur l’idée qu’une réduction du nombre de chômeurs permettrait à davantage de consommateurs d’augmenter leurs dépenses, alimentant ainsi une reprise de la croissance économique.
La clé de la croissance économique
Cependant, le principal moteur de la croissance économique est en réalité l’accroissement du volume d’épargne et non l’état du marché du travail. Résorber le chômage sans régler le problème de l’insuffisance d’épargne n’aura pas d’impact positif sur la croissance économique.
Le réservoir d’épargne permet de financer la modernisation et le développement des moyens de production, entrainant une augmentation de l’offre des biens et services nécessaires au maintien et à l’amélioration des conditions de vie de la population.
Si la baisse du chômage était le principal facteur à l’origine de la croissance économique, alors il serait logique de chercher à éliminer le chômage à l’aide de programmes gouvernementaux de soutien à l’emploi. Par exemple, les décideurs politiques pourraient suivre la recommandation de John Maynard Keynes consistant à employer des individus pour creuser des trous, ou autres activités subventionnées par le gouvernement, dans l’unique but d’employer autant de gens que possible.
Etant donné que l’Etat ne crée pas de richesses, une telle politique implique de détourner l’épargne accumulée par les créateurs de richesses vers les individus employés dans ces programmes d’emplois publics. Ce détournement des richesses doit être financé par des impôts et taxes ou par la création monétaire.
Une telle politique de détournement des richesses a pour conséquence d’épuiser le réservoir d’épargne. Cela conduit à un affaiblissement du processus de création de richesses et donc à compromettre les perspectives de croissance économique réelle.
Réglementation du marché du travail et chômage
Le problème du chômage pourrait être résolu relativement facilement si le marché du travail n’était pas soumis à autant d’entraves et interventions gouvernementales. Dans un marché de l’emploi sans entraves, toute personne souhaitant travailler pourrait trouver un emploi rémunéré en fonction de ses compétences.
Si quelqu’un demande un salaire déconnecté du marché et n’est pas prêt à déménager, il n’y a aucune garantie qu’il trouvera un emploi. Par exemple, si le salaire de marché pour John, boulanger de profession, est de 80 000 $ par an mais qu’il insiste pour demander un salaire de 500 000 $ par an, il risque probablement de rester au chômage.
Dans la durée, un marché du travail libre de toute entrave garantit que chaque travailleur soit rémunéré en fonction de la valeur de sa production. Tout écart significatif par rapport à cette valeur déclenche des mécanismes concurrentiels correctifs.
Au final, ce qui détermine le bien-être des individus, ce n’est pas qu’ils aient ou non un emploi, mais plutôt leur niveau de pouvoir d’achat. Or, toutes choses étant égales par ailleurs, la capacité des individus à générer des revenus est largement conditionnée par l’efficacité des moyens de production qu’ils utilisent. De meilleurs moyens de production permettent d’obtenir une meilleure productivité, et une productivité plus élevée implique que les travailleurs pourront obtenir de plus hauts salaires.
Les injections de liquidités réalisées par la banque centrale, qui visent soi-disant à favoriser l’amélioration des conditions de vie des travailleurs, produisent en réalité l’effet exactement inverse étant donné qu’une politique monétaire laxiste entraine une érosion du réservoir d’épargne. En conséquence, une telle politique réduit la capacité des créateurs de richesses à développer et moderniser les moyens de production.
La productivité des travailleurs est donc mise sous pression et leur pouvoir de négociation salariale s’affaiblit. De plus, une politique monétaire laxiste finit par entrainer une inflation des prix des biens et des services, érodant encore davantage le pouvoir d’achat des travailleurs.
La réduction du chômage a-t-elle un coût ?
Une fois qu’une économie tombe en récession et que le taux de chômage commence à augmenter, la plupart des commentateurs économiques estiment qu’il est du devoir du gouvernement et de la banque centrale d’intervenir pour contrer la hausse du chômage. Certains économistes pensent même que le coût d’une politique de réduction du chômage est inexistant étant donné que les chômeurs sont inactifs. Dans une interview sur CNBC le 31 août 2010, Paul Krugman avait ainsi affirmé :
« Si vous mettez immédiatement 100 000 chômeurs américains au travail en leur faisant creuser des trous, ce n’est pas comme si vous preniez 100 000 travailleurs qui étaient déjà employés dans d’autres activités productives. Vous les remettez au travail alors qu’ils n’avaient rien à faire. »
Mais comment cette baisse du chômage est-elle financée ? Qui paie la facture pour ce programme ? Krugman et d’autres commentateurs semblent croire que la banque centrale pourrait facilement en assurer le financement au moyen de la planche à billets.
Encore une fois, contrairement à ce que pensent Krugman et d’autres, la capacité de financement d’une économie ne dépend pas de la quantité de monnaie créée mais de la quantité d’épargne, c’est-à-dire le différentiel entre la valeur des biens produits et la valeur des biens consommés par leurs propriétaires.
Pour vivre et maximiser leur bien-être, les individus ont réellement besoin de biens et de services de consommation finale, et non d’argent en tant que tel, l’argent n’étant qu’un moyen d’échange. L’argent ne fait que faciliter les échanges de biens et services entre producteurs, il ne produit directement aucun bien tangible.
Contrairement à ce qu’affirment Krugman et d’autres, créer artificiellement des emplois n’est pas gratuit. Les individus employés dans des projets improductifs doivent être rémunérés. Etant donné que le gouvernement ne produit aucune richesse, il ne peut évidemment pas épargner et ne peut donc financer aucune activité nouvelle.
Par conséquent, pour que le gouvernement s’engage dans de nouvelles activités, il doit détourner des capitaux existants, c’est-à-dire l’épargne accumulée par les créateurs de richesses. Cette politique a cependant pour conséquence d’affaiblir le processus de création de richesses.
Le sophisme de l’insuffisance de demande
Chaque fois que l’économie montre des signes de faiblesse, la plupart des experts estiment qu’il faut stimuler la demande globale de biens et de services afin d’empêcher l’économie de sombrer dans une récession. Si l’augmentation de la demande du secteur privé est jugée insuffisante, alors le gouvernement doit venir lui suppléer.
Emboîtant le pas de Keynes, la plupart des experts associent la croissance économique à l’augmentation de la demande de biens et de services. Cependant, la notion d’insuffisance de demande est un mythe. La demande d’un individu est nécessairement limitée par sa capacité à produire des biens, et plus un individu peut produire de biens, plus il aura la capacité d’acquérir d’autres biens en échanges.
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Notez que la demande ne peut se suffire à elle-même et être indépendante : elle est nécessairement limitée par la production. Par conséquent, la production de biens et de services est le moteur de l’économie, et non la définition keynésienne de la demande. Ainsi, les producteurs, et non les consommateurs, sont le moteur de la croissance économique, et s’il veut réussir, un producteur doit fournir les biens et des services demandés par les autres producteurs.
Si une population de cinq individus produit dix pommes de terre et cinq tomates, c’est tout ce qu’ils peuvent demander et consommer. Aucun tour de passe-passe des gouvernements et des banques centrales ne pourra augmenter leur consommation effective. La seule façon de consommer plus est de produire plus.
La dépendance nécessaire de la demande vis-à-vis de la production de biens ne disparaît pas en raison des injections de liquidités de la banque centrale et des dépenses publiques. Au contraire, des politiques budgétaires et monétaires laxistes ne feront qu’appauvrir les créateurs de richesse et réduire leur capacité à produire des biens et des services, affaiblissant ainsi la demande effective.
Par conséquent, relancer la croissance économique nécessite de réduire les dépenses publiques et de mettre fin à tous les mécanismes de création monétaire ex nihilo. Une telle politique permettrait aux créateurs de richesse de produire plus de biens et ainsi de relancer l’économie. Nous pouvons conclure en notant que si nous parvenons à renforcer la capacité de l’économie à produire des biens et des services, alors nous renforcerons également la demande globale et favoriserons une croissance économique réelle.
La réduction du chômage ne constitue pas la clé du retour à la croissance économique. L’accroissement du volume d’épargne est en réalité au cœur du processus de croissance économique étant donné qu’il joue un rôle déterminant dans le développement et la modernisation des moyens de production. C’est seulement par le développement et la modernisation des moyens de production qu’une croissance économique plus robuste pourra être assurée.
Article traduit avec l’autorisation du Mises Institute. Original en anglais ici
5 commentaires
Tout à fait d’accord avec vous, sauf sur un point : la croissance économique peut tout à fait passer par une réduction du chômage, à condition que les emplois créés soient des emplois productifs de « création de richesse », par opposition aux emplois de fonctionnaires ou de services qui consomment la richesse créée.
Cette création d’emplois productifs ne peut avoir lieu que si l’on retire toutes les taxes sur le travail de l’homme, et là où je vous rejoins, c’est que cela va avec la réduction des dépenses publiques, la lutte contre la corruption, et un état centré sur ses missions régaliennes.
La richesse productive réelle est certes une bonne chose mais ne doit pas estomper la richesse intellectuelle des populations car cela en ferait des arguments et de la main d’oeuvre pour le pire ennemi du libéralisme : le totalitarisme.
La production de richesses réelles, certaines multinationales la connaissent et l’ont escamotée avec optimisation en tout genres aux états pour les affaiblir, les endettés et les corrompre ce qui en fait des états impotents, incompétents et prisonniers de la planche à billet et de leur propre turpitude électorale et promesses dépensières infructueuses et onéreuses aussi bien envers leurs donateurs qu’envers des populations ignares jusqu’au point de non-retour c’est à dire le foutoir, la tiers-mondisation et la dictature.
Les réductions du chômage, des dépenses publiques, et de la gabegie /corruption ne se feront JAMAIS, car c’est le fond de commerce de la classe dirigeante, qui maintient le peuple en servitude et en assistanat grâce aux promesses jamais tenues, et aux aides sociales._
Je précise qu’un état compétent est un état régalien incorruptible de façons endogène,exogène, idéologique et pécunière et qui fout la paix aux entrepreneurs, à la compétence du libre marché et ne s’en tient qu’à la protection de la nation , d’un service public efficace et de la coercition des tricheurs également efficace.
Nous devons nous détacher d’un antagonisme état vs marché et comprendre qu’il s’agit d’une guerre économique ou plutôt d’une prédation qui par un pseudo-libéralisme, le monétaire ainsi que d’autres moyens divers et variés dont l’assistanat (peut-être provisoire) dissous les états par la dette, la division et l’ignorance. Un nouvel empitre romain en quelque sorte mais qui utilise d’autres moyens que des légions aguerries et disciplinées.
Vous oubliez juste que les « producteurs de biens » ne peuvent le faire que grâce à l’énergie des hommes et des femmes qui échangent leur force de travail physique et intellectuelle contre une rémunération souvent minimum sauf les contributeurs les plus rentables. Les fonctionnaires que vous sous estimez permettent de donner les conditions de transport de financement de régulation de la ‘force de travail’ et donc participent également à la production de ces biens.
Sinon oui la production de biens (dans la mesure ou ce sont des biens qui apportent du bien être et non du mal être comme la solution ou la maladie) est au coeur de la qualité de la vie économique et sociale.