▪ Nous n’avions pas bien compris par quel prodige les places européennes étaient parvenues à rouvrir en hausse de 0,5% mardi matin. Nous n’avions pas plus compris comment elles étaient parvenues à renouer avec leurs meilleurs niveaux du mois de février après une demi-heure de cotation.
Leur rechute au cours des heures suivantes faisait en revanche parti du scénario que nous vous avions exposé dès jeudi dernier. La bonne tenue des cours lundi en début de journée, puis de nouveau ce mardi, nous a permis de mettre en oeuvre les stratégies de couverture que nous avions recommandées dans des conditions optimales… avec des indices boursiers testant nos objectifs pratiquement au point près, à Wall Street comme sur le Vieux Continent.
Il faut parfois un peu de réussite… mais cette fois-ci, la main invisible semble s’être ingéniée à actionner tous les leviers de façon à nous permettre de réaliser un « cinq sur cinq » (trois achats et deux ventes en 48 heures) sans le moindre déchet par rapport aux limites que nous avions indiquées.
C’est peut être dû à une bonne interprétation du comportement des indices dans une tentative de rebond à contre-tendance, caractérisée par des volumes faibles et une série de retracements de 50% de pertes subies depuis la mi-janvier. Son principal moteur aurait été la hausse du pétrole, censée préfigurer de meilleures conditions économiques aux Etats-Unis.
▪ Mais depuis lundi matin, nous focalisons notre attention sur la Chine et la Bourse de Shanghai en particulier. Elle vient de signer deux séances de repli après une semaine complète de congé… et le cadeau de bonne année de Pékin, c’est une réappréciation symbolique — mais bien réelle — du yuan par rapport aux devises occidentales.
Les compteurs étaient bloqués depuis le milieu de l’été 2008 — en fait, très précisément depuis que le pétrole avait inscrit un record historique à 148 $ le baril sur le NYMEX : le dollar était alors tombé bien bas ! Il a commencé à se redresser le lendemain même de la décision de geler la parité du yuan par rapport au billet vert, lequel venait d’inscrire le 15 juillet 2008 son plancher historique par rapport à l’euro vers 1,6050.
Le message était clair : priorité aux exportations, et tant pis pour l’inflation ! C’est une variable facile à maîtriser : le prix des carburants et de nombreux matériaux de base était fixé administrativement par le gouvernement chinois, soucieux d’éviter une valse des étiquettes avant l’ouverture des Jeux olympiques programmés quelques semaines plus tard.
Le renchérissement du yuan — même si pour l’heure, répétons-le, il ne s’agit que de variations symboliques — pourrait avoir comme effet de limiter à terme la hausse des prix importés, l’essentiel de la facture étant représenté par le pétrole.
L’autre interprétation possible, c’est que la Chine mise effectivement tout sur son marché intérieur. Elle partirait du constat que le rebond de la croissance aux Etats-Unis et en Europe n’est qu’une fraude statistique et que la consommation des ménages occidentaux va inexorablement se dégrader au cours des prochains mois et des prochaines années, sous l’effet conjugué de la hausse du chômage et de l’alourdissement de la facture fiscale. Ce serait à l’image de ce qui se met déjà en place en Grèce, au Portugal et en Espagne… et qui a déjà été imposé aux pauvres citoyens irlandais dès l’entame de l’année 2009.
▪ Les pays du « Club Méditerranée » ont simplement bénéficié d’un an de grâce en matière de taxes et d’impôts. La France et l’Angleterre préserveront le statu quo jusqu’au début de l’été… mais dès que les échéances électorales seront passées (en avril pour les régionales dans l’Hexagone, le 3 juin prochain pour les législatives outre-Manche), il va falloir que les contribuables préparent leur carnet de chèques.
A ce petit jeu, on peut se demander combien de temps l’Oncle Sam pourra tenir, avec sa douzaine d’Etats en faillite et pratiquement le double en fâcheuse posture budgétaire ! Wall Street a encore un peu de temps pour y réfléchir, mais certainement pas de longs trimestres de neutralité fiscale pour encaisser des dividendes en toute quiétude.
Toute embellie ponctuelle constitue donc une bonne opportunité pour s’alléger, surtout lorsque les nouvelles — comme ce fut le cas mardi — ne sont pas bonnes !
▪ Après l’annonce d’un nouveau recul des prix immobiliers aux Etats-Unis en décembre 2009, la publication de l’indice de confiance du Conference Board (en chute libre de 10 points à 46 contre 56,5 fin janvier) a littéralement assommé les marchés. Le CAC 40 n’a pas tardé à chuter de 1,5%, testant les 3 700 points dès 16h30 avant d’enfoncer ce seuil vers 17h15.
Malgré de piètres chiffres américains, l’euro a continué de s’enfoncer vers de nouveaux plus bas annuels : -0,85% à 1,3500 $ tout rond. Les cambistes n’ont retenu que la dégradation de notation de quatre des plus grandes banques grecques annoncée par Fitch et la déception causée mardi matin par l’IFO. Le baromètre du moral des milieux d’affaires allemands s’est inscrit en léger recul à 95,2 contre 95,8 au mois de janvier au lieu d’une petite appréciation vers 96, la hausse de la composante « anticipations » passant complètement inaperçue.
En France, les dépenses de consommation des ménages en produits manufacturés ont chuté de 2,7% en volume, après une hausse de 1,3% en décembre. Si les soldes ont bien fonctionné (hausse de 1,6% des ventes de textile/cuir), les immatriculations de véhicules ont plongé de 16,7%… un des effets prévisibles de la diminution de la prime à la casse.
Cette statistique a littéralement plombé le compartiment automobile à Paris. D’une hausse initiale de 1% en début de séance, l’indice sectoriel est passé à une correction de -3%.
▪ Le CAC 40 préserve in extremis le seuil des 3 700 points (-1,32% à 3 707), alors qu’il flirtait avec les 1% de hausse après une demi-heure de cotation — un plus haut pour le mois de février a même été inscrit à 3 791,5 points.
Il a ensuite subi un violente rechute — de pratiquement 100 points, jusque sur 3 696 points –, et semble bien parti pour s’en aller refermer le gap des 3 669 points du 16 février, alors que tous les gains accumulés depuis l’ouverture du 17/02 (à 3 707 points) ont été effacés d’un seul coup. Wall Street a chuté de 1% et s’en sort mieux que Paris ou Francfort.
Les jeux étaient faits dès la publication de l’indice du Conference Board. Les pertes se sont ensuite encore creusées peu avant l’heure du déjeuner (-1,4% en moyenne), légèrement réduites à l’heure du café… mais les vendeurs sont revenus à la charge en fin de séance et les scores n’apparaissent pas démesurés compte tenu des déceptions relatives aux statistiques du jour.
Les investisseurs américains n’ont pas encore lâché l’affaire. Ils comptent toujours sur Mister Big Ben pour leur ménager encore six mois de récréation sous azote et leur permettre de rêver à un bouquet final — avant que la psychologie du marché passe en mode dépression.