▪ Vous avez entendu ce bruit, cher lecteur ? C’était une explosion. Vous ne l’avez peut-être pas remarquée. C’était juste un petit "pop"… comme celui du pistolet qui a tué l’archiduc Ferdinand en 1914. Environ 80 milliards de dollars de dette gouvernementale US ont explosé cette semaine.
Mais d’autres choses doivent être prises en compte, dans l’actualité. Nous continuons donc notre veille solitaire. Tous les jours, nous nous asseyons à notre bureau… sous notre drapeau d’Alerte au Krach… noir et bleu… portant crâne et tibias entrecroisés… dans l’immeuble aux boules dorées.
Si si.
Pour une raison étrange, nos bureaux londoniens sont ornés de deux gigantesques boules dorées sur le toit. Elles ont l’air ridicule. Mais personne ne peut se tromper de bâtiment : il est posé au bord de la rivière comme un jouet tape-à-l’œil ; on cherche la manivelle sur le côté, et on attend qu’un clown monté sur ressort surgisse du toit.
Oui, nous étions d’humeur morose, en cette journée de Thanksgiving. Elizabeth est à New York avec sa famille et notre fille Maria.
Notre fille Sophia est avec sa grand-mère dans le Maryland. Will, Henry et Jules sont tous à Buenos Aires. Ne restent plus que votre correspondant et Edward, âgé de 16 ans, en Europe. Loin de leur foyer. Dans un exil auto-imposé.
Nous sommes à Paris, où nous passerons le week-end de Thanksgiving avec Edward. Nous dînerons avec des amis. Puis, samedi, nous irons en Normandie faire un autre festin.
Inutile de nous plaindre, donc, cher lecteur… à moins que vous ne soyez en région parisienne et sachiez faire une bonne tarte à la citrouille !
▪ Ah oui… le monde financier… Nous avons failli oublier. Vous vous rappelez ces 80 milliards de dollars de dette US venant tout juste d’exploser ? Eh bien, il en reste encore 4 992 milliards dans le stock de munitions. Lorsqu’ils exploseront… ce sera très excitant !
En attendant, tout le monde semble grimper dans le train de l’or. Franchement, il en devient un peu bondé… un peu lourd. Tout ça nous met… eh bien… un peu mal à l’aise.
A la Chronique Agora, nous n’avons jamais vu de foule à laquelle nous voulions nous joindre… ou de file dans laquelle nous voulions nous tenir. Nous n’aimons même pas nous trouver du côté de l’équipe gagnante lors d’un match de foot — trop de gens, trop de bruit.
Non, donnez-nous les causes perdues, les jusqu’au-boutistes et les perdants. Nous sommes bien plus à l’aise en tant qu’outsider… exilé… isolé. Non seulement on respire plus à l’aise, mais c’est aussi ainsi qu’on fait les meilleures affaires — là où les autres ne regardent pas.
Le souci, c’est qu’en ce moment, tout le monde où presque regarde dans la même direction que nous. Vers l’or.
Le prix de l’or continue de battre des records. Un article de l’Associated Press :
"Cela devient quasi quotidien : les investisseurs ont délaissé le dollar, étayant la demande de matières premières, or en tête. De nombreuses matières sont cotées en dollars, si bien que lorsque ce dernier s’affaiblit, cela rend le prix des matières plus attractif pour les investisseurs étrangers"…
"Le dollar est tombé en disgrâce parmi les investisseurs alors que la Réserve fédérale poursuit sa politique de taux d’intérêt à des planchers historiques afin de relancer l’économie."
Il y a dix ans, seuls les fanatiques de l’or — les rares qui étaient encore solvables et encore sains d’esprit — ont acheté de l’or. A présent, les gens intelligents les imitent. Des gens comme David Einhorn et John Paulson. Bon sang, même les Banques centrales en achètent. Pour la première fois depuis un quart de siècle, les Banques centrales achètent plus d’or qu’elles n’en vendent.
Pourquoi ? Parce que l’histoire est excellente. Si simple à comprendre. Si convaincante.
Si la reprise est réelle, la demande augmentera, diminuant les stocks et transformant l’argent brûlant de la Fed en inflation des prix à la consommation. Les investisseurs se tourneront vers l’or pour se protéger.
Si la reprise échoue, les autorités augmenteront leurs efforts de relance, plantant le décor pour une inflation encore plus grande un peu plus tard.
Si cette analyse est correcte, l’or est un pari à sens unique. L’argument est bon. Nous y croyons. Mais le fait que tant d’autres y croient aussi nous tracasse.