** La devise de réserve mondiale a profité d’un petit rally la semaine dernière, sous l’impulsion de l’optimisme du camp Bernanke et de ventes au détail plus importantes que celles que l’on attendait pour le mois de mai.
– Le dirigeant de la Fed nous assure que le risque d’un ralentissement économique plus profond est de moins en moins présent… malgré un pétrole à des prix record et un système financier gravement constipé.
– Alan Rusky, chef de la stratégie monétaire internationale chez RBS Greenwich Capital Markets nous dit que "le consommateur refuse de mourir", ce qui "rend service au dollar".
– Mais une crise, même si elle n’est "pas si grave", reste une crise. Des consommateurs qui dépensent plus à crédit, et des maisons dont le prix chute, ne sont pas les signes d’une économie solide.
– Même si votre correspondant accueille avec plaisir un petit soubresaut dans la valeur de la devise qui prédomine sur son chèque de salaire, nous ne sommes pas encore prêts à déboucher le champagne et à porter un toast à la fin de la chute du dollar.
– Que se passe-t-il si, par exemple, les gouvernements étrangers se joignent à la tendance du "lâchons le dollar" ? Se pourrait-il que la devise de réserve du monde entier devienne un jour un vague souvenir, comme les T-shirts délavés, les gadgets Star Trek et les albums de Vanilla Ice ?
** Au Moyen-Orient, où les cinq ou six pays qui forment le Conseil de coopération du Golfe (CCG) lient leurs dinars, leurs dirhams et leurs riyals au dollar, la confiance envers le billet vert commence à battre de l’aile. Même si les cheiks, les rois et les sultans du CCG prétendent apporter un soutien à toute épreuve au dollar, la plupart des analystes s’accordent à dire qu’il ne s’agit que d’une question de temps avant qu’ils ne suivent Gisele Bündchen et Jay-Z et optent pour une devise qui bénéficie d’un peu plus de "crédibilité" mondiale.
– Pour l’instant, l’Arabie saoudite, le Sultanat d’Oman, Bahreïn, le Qatar et les Emirats arabes unis gardent leur devise liée au dollar à un taux fixe. Aux Emirats arabes unis, par exemple, il faut 3,67 dirhams pour acheter un dollar. De même, les banques centrales du CCG sont obligées de baisser et d’augmenter leurs taux d’intérêts en même temps que le "cheik Bernanke", afin de maintenir la valeur de leur devise proportionnelle à celle du dollar.
– Mais tandis que la Fed traîne le dollar dans la poussière pour tenter de stimuler une économie qui lutte, les états du CCG se retrouvent dans une position étrange. Les prix record du pétrole ont entraîné un boom des économies au Moyen-Orient… des économies qui surchauffent, bouillonnent et crachent des taux d’inflation à deux chiffres.
– Les taux d’inflation en Arabie saoudite, le plus gros exportateur de pétrole du monde, et au Qatar, le plus gros exportateur de gaz, atteignent tous les deux des niveaux record que l’on avait plus vus depuis plusieurs décennies. Et le reste du Golfe n’est pas loin derrière. L’envie de réévaluer leur devise, sinon d’éliminer carrément le lien avec le dollar, augmente à chaque montée de l’inflation.
– Avec 1,7 milliers de milliards de dollars de réserve qui débordent des coffres du Golfe, les acteurs et les dirigeants de ce petit champs de pétrole pourraient faire beaucoup de bruit s’ils décidaient d’abandonner le billet vert. Et si, au lieu d’accepter les dollars pour leurs exportations de pétrole, les états du CCG commençaient à demander des euros… ou même de l’or ?
– Cela peut sembler tiré par les cheveux, mais ce ne serait pas la première fois que ceux qui ont la marchandise demandent à être payés avec autre chose que des bouts de papier sans valeur…