Le meilleur indicateur de la santé d’une économie capitaliste est en baisse constante… démontrant ainsi les limites du système. Quelle sera la suite ?
Le capitalisme est un moment de l’Histoire. Peut-être – sûrement – qu’un jour, un autre régime plus satisfaisant et plus adapté à la résolution de nos problèmes lui succédera… mais en attendant c’est non pas le meilleur, mais le moins mauvais.
Et c’est celui que nous avons.
Je n’écris pas ici pour discuter du capitalisme, de ses mérites, de ses dérives, de ses perversions, de sa légitimité perdue. Non, je veux vous parler du profit – plus précisément du taux de profit du capital… et, plus précisément encore, de la tendance à long terme à la baisse de la profitabilité du capital.
Le taux de profit est le meilleur indicateur de la « santé » d’une économie capitaliste. Il est le moteur de son dynamisme.
Il fournit une valeur prédictive significative sur les investissements futurs et la probabilité de récession ou de marasme. Ainsi, le niveau, la tendance, la direction du taux de profit mondial peuvent être considérés comme un guide important pour le développement futur de l’économie capitaliste mondiale.
Honteux, le profit ?
Personnellement si les données étaient disponibles en temps utile, c’est-à-dire sans trop de retard, je considère que ce serait le meilleur outil de prévision économique.
Hélas, le profit étant honteux, le taux de profit n’est pas un indicateur disponible. Les comptabilités nationales et internationales, les gouvernements, s’efforcent de ne pas le calculer, de le brouiller et donc de ne pas le communiquer. Ils n’en parlent jamais, c’est tabou ; ils nous parlent de compétitivité, de dettes, de l’offre – ce qui revient toujours à parler du profit, mais indirectement, sans prononcer son nom.
Pour mesurer par approximation des taux de profits du capital il faut s’en remettre à des chercheurs qui, patiemment, collectent les données, les triturent, les rendent significatives et les publient… avec beaucoup de retard.
Une mesure correcte du taux de profit du capital mondial devrait additionner tout le capital constant et variable dans le monde et estimer la plus-value totale appropriée par ce capital. Vaste tâche, qui a été réalisée par quelques-uns.
Esteban Maito est un de ces chercheurs. Il avait réalisé des travaux novateurs en utilisant une méthode de mesure des taux nationaux pondérés par le PIB pour 14 pays, en utilisant des statistiques nationales. Il est remonté à 1870 pour certains pays.
Maito a confirmé la nette tendance à la baisse du taux de profit mondial.
Vous savez que la tendance à la baisse du taux de profitabilité du capital mondial constitue la base de mon cadre analytique.
Une évolution contre-intuitive
La tendance à la baisse de profitabilité du capital est contre-intuitive, car les gens ont l’impression au contraire que le capital gagne de plus en plus d’argent : les marges bénéficiaires par rapport aux chiffres d’affaires progressent ! La part des salaires dans les valeurs ajoutées chute.
Mais justement, c’est parce que la profitabilité chute inexorablement que le capital est obligé, pour contrecarrer, d’augmenter ses marges et surtout de baisser la part qui revient aux salaires. Par ailleurs, il se financiarise – c’est-à-dire qu’il fait des profits fictifs par la finance et le levier.
Ce que les gens ne peuvent pas voir c’est que la masse de capital dans le monde progresse plus vite que la masse de profits dans le système : globalement, donc, le ratio profit/masse de capital s’érode.