▪ Une tendance se dessine de plus en plus dans les gros titres. Cette tendance, une fois de plus, tourne autour de la Chine :
– Les exportations chinoises ont augmenté de 48,5% d’avril à mai, la plus grosse augmentation d’un mois à l’autre en six ans. Ce signe d’une demande continue de la part des consommateurs américains et européens a fait grimper les principaux indices d’actions américaines.
– La Chine a une fois de plus nié les rumeurs selon lesquelles elle prévoirait de réduire ses réserves de change en euro. Ce qui met un plancher à l’euro, du moins pour l’instant, à 1,207 $.
– Tim Geithner, secrétaire au Trésor US, se plaint encore auprès du Congrès au sujet du taux de change yuan-dollar.
De plus en plus, la Chine est le pays qui fait bouger les marchés du monde entier. C’est pour ça que nous sommes allés à Pékin en début de mois pour y évaluer les opportunités commerciales. C’est aussi la raison pour laquelle Chris Mayer est venu avec nous… pour voir si la bulle chinoise est réelle et chercher de bonnes opportunités d’investissement pour nos lecteurs.
▪ C’est également pour ça que le président de Morgan Stanley Asia, Stephen Roach, a mis Geithner en garde récemment, en lui disant de "se méfier de ce qu’il désire".
La Chine n’est qu’un des 90 pays avec lesquels les Etats-Unis sont en déficit commercial, a fait remarquer Roach. Si la Chine réévalue le yuan, cela signifie seulement que la part de la Chine sur le déficit se réduit.
"La Chine va se transformer en société dirigée par les consommateurs", écrit Roach. "Ils vont absorber davantage de leur épargne excédentaire et en avoir moins à nous envoyer pour financer notre consommation excessive et notre déficit, ici aux Etats-Unis. Qui va nous aider à remonter la pente ?"
Roach déclare que quand il soulève cette question, on lui répond habituellement par une autre question : "que vont-ils faire d’autre avec leur argent ?" La réponse, c’est qu’ils vont investir dans leurs propres industries et infrastructures, et continuer à construire cette société menée par la consommation. Ils vont investir dans les matières premières et les ressources dans le monde entier et nourrir leur propre moteur.
▪ De fait, en raison de la demande chinoise, le charbon est désormais un acteur plus important dans le secteur de l’énergie mondiale qu’il ne l’a été depuis 1970.
Le Rapport annuel de Statistiques sur les énergies mondiales publié par BP affirme que la demande chinoise en charbon a augmenté de 10% l’année dernière (et celle de l’Inde de 7%). Résultat, le charbon représente maintenant 29% de l’utilisation mondiale d’énergie.
Il y a plus remarquable : la quantité de charbon brûlé dans le monde au cours de l’année 2009 a diminué par rapport à l’année précédente. Simplement, tout le reste — le pétrole, le gaz naturel, le nucléaire et l’hydroélectrique — a encore plus baissé.
Pour la première fois depuis 1982, la demande mondiale d’énergie a baissé (l’utilisation de gaz naturel a enregistré une chute record.) Mais en Chine, la consommation a augmenté. Beaucoup augmenté.
"Pensez qu’en 2000", déclare Chris Mayer, "la Chine a utilisé autant de charbon que les Etats-Unis. Aujourd’hui, dix ans plus tard, la Chine consomme trois fois plus de charbon que les Etats-Unis".
"Après avoir été autosuffisante en charbon pendant des années, la Chine a commencé à importer du charbon. Cette année, elle va en importer 150 tonnes, le double du total de l’année dernière. Cela peut sembler une taupinière comparé à ce qu’elle brûle, mais cette taupinière représente 60% des exportations en charbon de l’Australie — et l’Australie est le plus grand exportateur de charbon du monde, et ça ne fait qu’augmenter".
"Cela signifie", d’après Richard Heinberg du Post Carbon Institute, "que si les importations chinoises doublent encore l’année prochaine — ce qui n’est pas un scénario surréaliste –, la Chine va devoir importer plus de charbon que l’Australie ne peut en fournir. Un doublement supplémentaire de la demande en importations et la Chine devra importer 600 millions de tonnes par an, près de la totalité du charbon exporté par tous les pays l’année dernière".
Bien évidemment, la Chine n’a pas seulement besoin de charbon. Elle a besoin de pétrole, de gaz naturel, d’uranium, etc.
▪ Il y a bien sûr aussi des signaux contraires. Le fabricant de métal le plus négocié sur le marché chinois vient de réduire ses prix pour la première fois en huit mois. C’est incroyable quand on pense que les prix du minerai de fer sont actuellement plus élevés de 147% que pendant l’année fiscale 2009.
"Certains producteurs de fer sont déjà au bord de la faillite", a annoncé Zhang Lin, analyste spécialisé dans le fer basé à Pékin, au China Daily. "Il va leur falloir réduire les coûts de production ou en passer par le chômage technique, si les prix continuent à chuter".